Mercredi 19 octobre, on fêtait le centenaire de la Grande Mosquée de Paris ; plus exactement la pose de la première pierre. Dans un contexte particulier suite à l’assassinat de la jeune Lola, l’événement, avec la présence du président de la République, est brandi tantôt comme une énième promotion d’un vivre-ensemble que d’aucuns se sont échinés à rendre obligatoire et impossible, tantôt comme une dénonciation de cette politique, bien souvent avec une forte connotation islamophobe, amalgamant islam et immigration incontrôlée et de masse (et tous les problèmes bien réels qui en découlent). Nous mettons donc en lumière les cent ans de cet événement avec un article paru il y a quelques années.
Cet édifice hispano-mauresque n’a rien à envier aux plus belles mosquées du Maroc ou de Tunisie. Et pour cause : ce sont des artisans marocains qui l’ont bâti au cœur de la capitale. La Grande Mosquée de Paris a été édifiée par la volonté conjointe des musulmans et des Français, à l’époque où la France possédait des colonies et des protectorats au Maghreb.
Dès le XIXe siècle, l’idée fut lancée par le calife de Constantinople, le sultan Abdul Hamid, qui avait rendu visite à l’empereur Napoléon III, de construire à Paris un lieu de culte pour les musulmans. Il ne s’agirait pas d’une simple salle de prière mais d’un ensemble de bâtiments destiné à accueillir à la fois les musulmans résidant en France et leurs coreligionnaires de passage. Les voyageurs venus d’Orient y trouveraient une hôtellerie ainsi qu’un lieu d’étude et de méditation. Ce bâtiment aurait aussi valeur de manifeste pour les traditions artisanales de l’Empire ottoman. La mosquée de Paris devait s’inspirer des traditions architecturales turques et des savoir-faire marocain et tunisien, reprenant les motifs en arabesque, les faïences et les mosaïques qui font la célébrité des mosquées de Fès ou de Cordoue.
Mais le financement se révélera introuvable. Le sultan est en prise à des difficultés à l’intérieur de son propre empire, jusqu’à sa destitution par la révolution jeune-turque en 1909. Quant à la France, elle mène à cette époque de nombreuses campagnes militaires en Afrique du Nord. Le Maroc et la Tunisie deviennent des protectorats tandis que l’Algérie, dont la conquête a nécessité dix-sept années de combats, est transformée en départements français accueillant une partie des Alsaciens fuyant leurs départements devenus allemands après la guerre franco-prussienne de 1870-1871. Le Maghreb est alors la partie la plus proche de l’empire colonial français, permettant de faire pièce à la puissance britannique outre-mer et d’oublier les pertes coloniales du XVIIIe siècle en Amérique.
Survient la Première Guerre mondiale. Les soldats musulmans tombent aux côtés des troupes françaises, des tirailleurs algériens – les fameux « turcos » – aux goumiers marocains. Leur présence à Verdun, en 1916, s’avère décisive pour l’issue de la bataille.
Si bien qu’après l’armistice de 1918, des carrés musulmans sont aménagés dans les cimetières militaires afin de rendre hommage aux soldats tombés au combat. Parallèlement, des travailleurs kabyles sont arrivés sur le sol métropolitain dès avant la guerre et surtout après 1918, afin de reconstruire un pays qui manque cruellement de main-d’œuvre pour effacer les destructions du conflit.
Hubert Lyautey, « Lyautey l’Africain », résident général de France au Maroc depuis 1912 et l’un des acteurs majeurs de la Première Guerre mondiale, éprouve intérêt et curiosité pour les traditions et croyances de l’islam. Cherchant à consolider l’influence de la France au Maghreb par le respect des coutumes locales, il considère que les musulmans de France doivent disposer d’un lieu qui leur ressemble. Il estime également que la France, devenue une puissance coloniale majeure, doit assumer son statut à travers des monuments et des manifestations emblématiques.
La Grande Mosquée sera le prélude à l’Exposition coloniale de 1931, présidée par le maréchal Lyautey. C’est d’ailleurs pendant la construction du nouveau bâtiment à Paris qu’il tente de pacifier le territoire marocain au cours de la guerre du Rif, entremêlant ainsi la force du glaive [1] et la politique de persuasion. Il vient à Paris pour poser la première pierre de la mosquée.
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Emmanuel Macron, très heureux, après s’être frotté le nez, de retrouver le recteur de la Grande Mosquée de Paris pour le centenaire de celle-ci :
Macronie et « islam de France ». Rappel avec ledit recteur (15 avril 2022) :
Le recteur @ChemsHafiz appelle à voter pour @EmmanuelMacron le #24avril2022.
« Nous n’avons pas le droit d’hypothéquer l’avenir de nos enfants en restant des témoins passifs d’une catastrophe politique imminente. Votons Emmanuel Macron ». pic.twitter.com/RpBHwODpMK
— Grande Mosquée de Paris (@mosqueedeparis) April 15, 2022