En préambule, qu’on parle de terrorisme, de djihadisme, ou de sécurisation des populations, toujours avoir en tête l’importance capitale du Niger pour la sécurité énergétique (nucléaire) de la France.
Les événements qui ont frappé Niamey en mai 2014 peuvent être d’origine interne – une volonté d’indépendance réelle des forces vives du pays – ou externe – une déstabilisation « orange » des intérêts français symbolisés par la présence d’Areva dans le pays – une partie de l’opération Barkhane consiste à sanctuariser les zones vitales pour la France.
Les djihadistes d’aujourd’hui s’appelaient autrefois des contrebandiers, et bien malin qui peut aujourd’hui les distinguer, les intérêts politiques des uns croisant parfois les intérêts économiques des autres. Ce que confirme l’interview du général commandant la force Barkhane.
En juin, après un raid meurtrier du groupe jihadiste nigérian Boko Haram à Bosso, dans le sud-est du Niger (24 tués), le président nigérien, Mahamadou Issoufou, avait estimé nécessaire le renforcement de l’opération française Barkhane, qui s’occupe essentiellement des organisations terroristes présentes dans la bande sahélo-saharienne (BSS).
« Face au renforcement de l’activité des groupes terroristes dans la région (…) nous pensons qu’il faut renforcer la présence de Barkhane, y compris autour du lac Tchad », avait en effet déclaré M. Issoufou, dans les colonnes du quotidien Le Monde.
La France est déjà impliquée dans la lutte contre Boko Haram, organisation qui a fait allégeance à l’État islamique (EI ou Daech) en mars 2015.
[...] Jean-Yves Le Drian a estimé que la « fragilité du Niger est essentiellement due à son flanc sud et à Boko Haram ». Et d’ajouter : « Des militaires nigériens ont été tués en grand nombre et les forces nigériennes ont rencontré des difficultés sérieuses. »
Aussi, suite à la demande « de coopération pour régler les difficultés au sud » faite par le président Issoufou, M. Le Drian a précisé que la France avait proposé au Niger la « mise en place d’une capacité d’appui aérien des forces nigériennes contre Boko Haram » ainsi qu’un « ensemble de soutiens ».
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Gal Patrick Bréthous (Barkhane) : au Mali, « les terroristes fuient les forces internationales »
En fin de mission à la tête de Barkhane, le général de division Patrick Bréthous doit quitter le Mali le 31 juillet. Arrivé à Bamako, le 25 juillet dernier pour rencontrer une dernière fois dans le cadre de sa mission les autorités maliennes et françaises, il nous livre sa vision de la situation sécuritaire au Mali mais aussi au Sahel.
Jeune Afrique : En fin de mission à la tête de Barkhane, quel bilan faites-vous de la situation sécuritaire dans le Sahel ?
Patrick Bréthous : Depuis une année, la coopération régionale du G5 Sahel (regroupant le Mali, la Mauritanie, le Niger, le Burkina et le Tchad) a beaucoup évolué, notamment le pilier défense et sécurité, et les armées de ces pays mènent des opérations transfrontalières avec l’appui de Barkhane.
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En un an, plus d’une centaine de terroristes ont été capturés au Mali et au Niger. Malgré ces opérations, les jihadistes sont toujours présents dans la région…
Les groupes armés terroristes n’ont plus de zone de refuge, encore mois de sanctuaire, et donc ils ont du mal à s’organiser, à aller voir leurs familles pour se reposer. Nous démantelons leurs dépôts logistiques dans le grand Nord et dans le centre du Mali. [...] Dans la durée, les terroristes ne sont pas tranquilles. Aujourd’hui, un terroriste ne peut pas dormir sans crainte de voir arriver les forces armées.
Y a-t-il des chiffres, un bilan de ces opérations dont vous parlez ?
En un an, plus d’une centaine de terroristes ont été capturés au Mali et au Niger puis transférés aux autorités nigériennes et maliennes. Plusieurs dizaines de pick-up ont été détruits et des caches de tonnes de munitions et de mines démantelées. [...] Ce n’est pas tant le bilan comptable qui compte, mais plutôt la présence dans la durée, l’acceptation des forces armées par les populations et le fait que les groupes armés terroristes ne sont plus chez eux au quotidien.
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Au mois d’avril dernier, à Kidal, il y a eu des manifestations contre Barkhane et la Minusma. Les manifestants jugent que vos arrestations dans la région sont arbitraires. D’ailleurs, une lettre signée par les chefs de tribus et notables du Nord a été adressée à l’ambassadeur de France à Bamako allant dans le même sens que les manifestants.
Chacun joue sa carte pour se faire libérer. C’est tout ! Barkhane agit contre les terroristes. C’est l’honneur de l’armée française de ne pas tirer sur quelqu’un qui ne l’est pas. Tous les gens que nous arrêtons ou interceptons dans le cadre de nos opérations, c’est parce qu’ils sont liés à des groupes armés terroristes ou à des attaques avec des mines ou les engins explosifs improvisés contre Barkhane, mais pas seulement : contre des convois de civils avec des femmes et des enfants. Ils attaquent aussi les Fama et la Minusma. [...]
- L’armée française détruit de l’armement récupéré aux groupes armés, près de Tombouctou, le 28 mars 2013
À Tombouctou aussi, les jihadistes sont toujours là et ils mènent des attaques de plus en plus violentes…
[...] C’est vrai que, de temps en temps, nous avons mis des coups sévères à la Katiba Alfoughane, comme l’hiver dernier, mais comme nous n’avons pas un dispositif très important dans la durée là-bas, ils ont une certaine liberté d’action. Et c’est le principe. Les terroristes fuient les forces internationales.
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On parle aussi beaucoup de trafic de drogue au Sahara. À chaque fois que les groupes armés signataires de l’accord de paix se tirent dessus, ce sujet revient sur la table… Qu’en pensez-vous ?
Le Sahara est une terre de nomades, de transit et de trafiquants. Ma mission n’est pas la lutte contre la drogue, mais j’observe qu’il y a des flux qui traversent le Sahara. Tout le monde en fait commerce. Ceux qui veulent trafiquer, trafiquent. Mais en un an, entre le nord du Mali et le nord du Niger, il y a eu beaucoup de flux intercepté soit par Barkhane soit par les armées malienne ou nigérienne.