Un rapport remis lundi 19 février 2018 par le député Aurélien Taché (LREM) au Premier ministre et au ministre de l’Intérieur propose que les demandeurs d’asile puissent commencer à travailler six mois après l’enregistrement de leur dossier. Une proposition explosive, qui pourrait clairement avoir des conséquences sur les salaires à court terme, comme nous l’a confié le manager d’un grand groupe hôtelier français.
Ce dernier, qui s’occupe d’un établissement dans le Finistère, mais qui souhaite garder l’anonymat pour des raisons évidentes de sécurité professionnelle, nous explique :
« Il y a plusieurs domaines où il existe un problème de recrutement aujourd’hui en France. L’hôtellerie restauration en fait partie, mais c’est également le cas dans les services à la personne, dans l’agriculture, dans les métiers d’entretien ».
Selon lui, c’est avant tout « la perspective salariale modeste, couplée avec des travaux pas toujours bien perçus, et finalement peu de possibilité d’évolution » qui entraine ces difficultés à recruter.
« Il ne faut pas se mentir : certains immigrés eux, sont prêts à faire n’importe quel travail, y compris temporairement, pour pouvoir obtenir des garanties administratives, des possibilités de rester en France. À court terme, certains employeurs ne vont pas hésiter à les embaucher, tout en se faisant un peu de publicité médiatique “humanitaire”. Et cela plutôt que de faire un travail de fond, pour étudier les possibilités d’augmenter les salaires et d’attirer plus facilement les Français vers ces métiers ».
Ce manager a travaillé en région parisienne, il connait son sujet :
« à Paris, certaines cuisines de grands restaurants sont entièrement occupées par des travailleurs immigrés. Certains managers les répartissent même par nationalités pour que cela fonctionne mieux. C’est une réalité que personne ne semble vouloir prendre en compte ».
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Et ce dernier de s’interroger :
« En province, comme ici en Bretagne, outre le fait que ce phénomène puisse peser sur les salaires à la baisse, c’est en terme de qualité de service que cela va jouer également. Vous imaginez un instant le scénario cocasse dans lequel un serveur venu d’Érythrée va décrire l’huître de Cancale à un normand ou à un anglais venu se restaurer sur la côte ? Ou ce jeune Afghan devenu réceptionniste à Châteaulin à qui on va expliquer qu’il faut parler d’Huelgoat ou de la Vallée des Saints à nos clients ? Cela n’a aucun sens, aucun ».
Au final, il semble assez fataliste sur la suite des évènements :
« En gros, pour les Français, il va falloir accepter de travailler sans avoir le salaire correct qui devrait aller avec le métier envisagé, ou sinon de laisser sa place à d’autres. Si vous cumulez cela avec le contrôle accru des chômeurs qui vont être obligés de plus en plus d’accepter y compris des métiers qui ne leur correspondent pas forcément, on va droit dans le mur, et vers une colère qui ira en augmentant, ou bien vers une résignation. Ce n’est pas du tout la conception que je me faisais du travail en hôtellerie restauration quand j’ai débuté ma carrière ».
On se souvient qu’en Allemagne, le ministère du Travail allemand avait annoncé en 2016 qu’il comptait créer 100.000 emplois à destination des migrants arrivés dans le pays « pour favoriser l’intégration de ceux qui ne disposent pas de titre de séjour », des employés payés … 80 centimes de l’heure. Des entorses au salaire minimum légales étaient également envisagées, toujours dans l’optique de permettre l’accès à l’emploi de ces immigrés.
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Une enveloppe chiffrée par le député (pas par les experts pour l’instant) à plus de 600 millions d’euros. À la fin, ce sont en effet toujours les Français qui paieront l’addition…