Les dirigeants de l’UE, réunis samedi à Bruxelles, ont nommé deux futurs responsables européens, et devaient ouvrir la voie à de nouvelles sanctions contre la Russie, sommée de cesser ses « actions militaires illégales » en Ukraine afin d’éviter de créer une situation de « non-retour ».
Le premier ministre polonais Donald Tusk a été désigné comme futur président du Conseil européen, et la ministre italienne des Affaires étrangères, Federica Mogherini, chef de la diplomatie de l’UE.
Ces nominations ne faisaient plus guère de doute : un consensus s’était formé sur le nom de Mme Mogherini pour remplacer la Britannique Catherine Ashton, et M. Tusk apparaissait ces derniers jours comme le grand favori.
Les dirigeants des 28 devaient ensuite consacrer une partie de la soirée au dossier du renforcement des sanctions contre la Russie. Le premier ministre ukrainien, Petro Porochenko, qui était leur invité, leur a présenté la situation sur le terrain au début de la réunion.
Le choix de M. Tusk, dont le pays fait partie des États européens en pointe dans la volonté de fermeté à l’égard de la Russie, est un message clair adressé à Moscou.
Quant à Mme Mogherini, elle a voyagé en Ukraine et en Russie. Sa rencontre avec le président Vladimir Poutine lui avait d’ailleurs attiré de vives critiques de plusieurs pays d’Europe de l’Est, qui l’avaient accusée d’être « pro-russe ».
Le président de la Commission européenne, José Manuel Barroso, a qualifié la situation de « très dramatique » en Ukraine à l’issue d’une rencontre avec M. Porochenko plus tôt dans la journée. « Nous pourrions nous retrouver dans une situation où nous arriverions à un point de non-retour si l’escalade se poursuit », a-t-il mis en garde.
« Nous voulons la paix, pas la guerre », a assuré M. Porochenko. Mais « nous sommes trop près de la frontière où il n’y aurait pas de retour », a-t-il souligné alors que se multiplient les informations sur des incursions de troupes régulières de l’armée russe en Ukraine. Il a accusé la Russie d’avoir envoyé « des milliers » de soldats et « des centaines de chars » sur le territoire ukrainien, ce que Moscou nie catégoriquement.
Interrogé sur d’éventuelles sanctions supplémentaires de l’UE contre la Russie, M. Barroso a souhaité que les chefs d’État et de gouvernement « soient prêts à prendre de nouvelles mesures », précisant que la Commission avait « déjà préparé des options ». Vendredi, il avait averti au téléphone le président Vladimir Poutine que toute nouvelle « déstabilisation » de l’Ukraine aurait un « coût élevé » pour la Russie.
L’UE a préparé des options
Le président français François Hollande a indiqué que les sanctions contre la Russie seraient « sans doute augmentées ». « Nous n’allons probablement pas décider de nouvelles sanctions, mais en discuter », a tempéré le premier ministre finlandais, Alexander Stubb, en rejetant toute idée d’aide militaire à l’Ukraine.
La demande faite cette semaine par Kiev a été relayée par certains pays de l’Est, au premier rang desquels la Roumanie ou la Lituanie. « La Russie est en état de guerre avec l’Ukraine, un pays qui veut faire partie de l’Europe, ce qui signifie que Moscou est pratiquement en guerre contre l’Europe », a lancé la présidente de Lithuanie, Dalia Grybauskaité, à son arrivée au sommet. « Nous devons aider l’Ukraine, leur envoyer du matériel militaire », a-t-elle ajouté.
M. Porochenko a nuancé en évoquant un « soutien technique », sous forme notamment d’un « échange d’informations ». « Je peux dire que l’agression russe ne restera pas sans réponse de l’UE ».
Le responsable séparatiste Alexeï Mozgovoï a affirmé samedi que les insurgés contrôlaient désormais près de 50 % du territoire des régions de Donetsk et de Lougansk après les récents succès de leur contre-offensive.
Les rebelles ont affirmé se préparer à lancer une nouvelle grande offensive contre les forces gouvernementales dans l’est de l’Ukraine, temporisant toutefois une éventuelle attaque sur le port stratégique de Marioupol, à près de 100 km au sud de leur bastion de Donetsk.
Par ailleurs, le « groupe de contact » sur la crise en Ukraine se réunira lundi à Minsk, a annoncé samedi le ministère biélorusse des Affaires étrangères. Des représentants de l’Ukraine, de la Russie et de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) participeront aux discussions.
De son côté, le ministre ukrainien de l’Intérieur, Arsen Avakov, a déclaré qu’une partie des soldats ukrainiens assiégés par les rebelles prorusses à Komsomolsk étaient « sortis » de leur encerclement. À Ilovaïsk, où plusieurs centaines de soldats sont également encerclés par les insurgés depuis plus d’une semaine, le commandant d’un bataillon de volontaires a affirmé qu’un couloir avait été négocié pour leur permettre de sortir à condition de laisser les armes lourdes aux rebelles.
La Russie a de son côté fait savoir samedi qu’elle souhaitait organiser un « pont humanitaire » pour envoyer de l’aide dans les zones de l’est de l’Ukraine sinistrée par le conflit.