S’exprimant devant les parlementaires nationaux et européens, réunis ce mardi à Bruxelles, le secrétaire général de l’OTAN, Anders Fogh Rasmussen, a confirmé qu’il envisageait dans ses différentes propositions qu’il fera au sommet des Chefs d’Etat et de gouvernement à Lisbonne « de mettre en place une petite capacité civile au sein de l’OTAN ».
Sentant poindre certaines craintes parmi ses interlocuteurs, il a affirmé : « Il ne s’agit pas de mettre en place une capacité qui puisse permettre d’agir par nos propres moyens. Mais une interface avec d’autres acteurs pour renforcer les efforts de développement civil et reconstruction. »
« Notre expérience au Kosovo et en Afghanistan nous a enseigné que nous avions besoin d’une structure. » Rasmussen n’a pas voulu préciser quelle taille aurait cette unité. Quand je l’ai interrogé il n’a pas voulu en dire plus. Mais il semble bien qu’elle n’aura pas une ou deux personnes uniquement.
Cela plusieurs années que l’OTAN tente de mettre un pied dans le civil. Et on peut voir cette création comme une longue suite de petits pas. On peut aussi estimer que cela ressort davantage d’une négociation à venir – avec l’Union européenne – Rasmussen se gardant ainsi une poire pour la soif. Ou d’une recherche d’échappatoire à une pression trop importante des personnels, une sorte de bouée de secours.
Pour éviter de voir le personnel trop réduit, il suffit d’élargir les tâches et donc la fonction de l’organisation.
Répondant à une question d’un député, il a eu cependant cette phrase : « Nous essayons de dégraisser au maximum notre organisation, d’avoir plus de muscles. Mais nous avons besoin d’organisation. »
Commentaire : Une proposition plus que troublante
Quelle que soit l’interprétation, cette proposition pose de nombreuses questions. Premièrement, cela présuppose que le civil est l’attribut de l’action militaire. Ce qui est pour le moins troublant dans la construction politique et philosophique moderne, et contraire à toutes les règles édictées jusqu’ici.
Deuxièmement, l’OTAN reste une organisation militaire, qui fonctionne avec certaines règles d’exception démocratique (pas de contrôle parlementaire, pas de contrôle juridictionnel, immunité diplomatique…). Cela peut se justifier pour des intérêts de sécurité suprême (à discuter).
Mais pour des actions civiles, c’est injustifiable. Enfin, l’OTAN va faire doublon, voire concurrence avec des organisations déjà existantes comme l’Union européenne ou l’ONU mais aussi avec les structures civiles des Etats de l’Alliance, comme les Allemands de GTZ, les Américains de Us Aid ou les Britanniques du DFID.