Quand les donneurs de leçons se prennent une leçon...
Le journaliste spécialiste du Proche-Orient Gideon Kouts n’a pas l’air très bien assis sur sa chaise, quand il répond à la question sur l’apartheid du régime raciste israélien. Pourtant, c’est un fait admis par l’écrasante majorité de la population israélienne, qui ne se révolte pas contre cette injustice flagrante, par l’écrasante majorité de la population palestinienne, qui en subit les conséquences dramatiques au quotidien, et par l’écrasante majorité des nations de la Terre, qui passent leur temps à dénoncer les violations du droit international dans l’entité israélienne. Mais non, face à cela, on oppose un bon gros déni de la taille d’un mensonge d’enfant, ce qui est rétroactivement dommageable.
À la limite, il ne faudrait même pas écouter les élucubrations vasouillardes de ce pseudo-journaliste, car si on ne reconnaît pas l’apartheid israélien, alors plus rien ne peut tenir, en termes de vérités, ou plutôt de faits. Mais il faut quand même entendre le culot, la chutzpah d’un citoyen juif de première classe, qui n’a tellement pas d’arguments qu’il change en permanence de sujet en pleine phrase. Cette gêne révélatrice mérite d’être médiatisée,
Il faut dire que la présidente d’Amnesty International, Agnès Callamard, n’y a pas été avec le dos de la cuillère, selon Le Dauphiné :
« Les politiques cruelles d’Israël de ségrégation, de dépossession et d’exclusion à travers ces territoires tiennent clairement de l’apartheid », a déclaré la secrétaire générale d’Amnesty, Agnès Callamard, lors d’une conférence de presse à Jérusalem peu après la publication d’un rapport à ce sujet, ce mardi. « Qu’ils vivent à Gaza, à Jérusalem-Est, dans le reste de la Cisjordanie ou en Israël, les Palestiniens sont traités comme un groupe racial inférieur et systématiquement dépossédés de leurs droits. »
Ce qui est un fait. Face à ces vérités ignobles, qui rappellent les heures les plus sombres de la vie des juifs européens dans les ghettos des pays de l’Est à partir de 1939, notre journaliste subitement aveugle augmente le niveau de chutzpah :
Kouts : C’est très, très dommageable, très, très dommageable, qu’une institution qui a fait beaucoup de bon travail, ait partout une idée fixe sur Israël, et a écrit une livre d’une centaine de pages tout simplement pour prouver d’une façon littéraire, plus que scientifique ou plus du point de vue du droit ou de la législation, pour justifier un terme qui est utilisé contre Israël. On peut comprendre la colère d’Israël...
RT : C’est sur ce terme apartheid qu’il y a aussi des désaccords puisque les rédacteurs du rapport eux-mêmes disent qu’il n’y a pas de comparaison finalement avec l’Afrique du Sud et qu’ils se sont basés sur le terme apartheid comme le définit la justice internationale.
Kouts : Bien sûr, c’est une question de terme, et quand on écrit un document légal d’une centaine de pages qui doit prouver des problèmes des droits de l’homme, qui se posent ici et là, il y a une agence aussi, une représentation israélienne d’Amnesty International, même si le rapport a été écrit par la section anglaise, là il faut voir aussi la politique interne, par exemple le fait qu’une autre organisation Human Rights Watch a commencé à utiliser ce terme, donc ce qui est intéressant ici, c’est la politique intérieure des organismes et des organisations qui s’occupent soi-disant des droits de l’homme, là ils deviennent des organisations politiques.
C’est exactement l’argument que Macron opposait à un manifestant qui lui reprochait la destruction de l’hôpital public : « Vous êtes très politisé ». Même déni de réalité, même évacuation de la question principale.
RT : Selon vous, il y a une part de militantisme dans ce rapport ? C’est ce que vous nous dites ?
Kouts : Bien sûr, s’il s’agit d’une action politique, il y a malheureusement du militantisme, il y a du bon militantisme aussi, quand on veut défendre des droits de l’homme partout dans le monde, mais il faut quand même voir que ce gros rapport se concentre de plus en plus et depuis des années sur Israël. Par exemple Amnesty International a été demander une fois d’essayer d’écrire un rapport concernant l’antisémitisme, et là on arrive à l’antisémitisme, et ils ont refusé. En disant il y a tant de problèmes dans le monde, on peut pas écrire... Donc on peut comprendre la colère israélienne, le sujet des droits de l’homme mérite quand même un traitement beaucoup, beaucoup plus sérieux.
Surtout en Israël ! Après les dénégations du pseudo-journaliste, qui fait quand même de la politique, ce dont il accuse l’ONG, voici les dénégations du ministre israélien des Affaires étrangères, Yaïr Lapid. On est prié de ne pas rire.
« Amnesty était naguère une organisation estimée (...). Aujourd’hui, elle est exactement le contraire. Israël n’est pas parfait, mais c’est une démocratie attachée au droit international, ouverte à la critique. (...) Je n’aime pas dire que si Israël n’était pas un État juif personne chez Amnesty n’oserait s’en prendre à lui, mais je ne vois pas d’autre explication. »
La réponse d’Agnès Callamard, citée par Le Dauphiné :
« Une critique des pratiques de l’État d’Israël n’est absolument pas une forme d’antisémitisme. Amnesty dénonce fortement l’antisémitisme », se défend Agnès Callamard, qui a également rejeté les allégations selon lesquelles l’ONG « stigmatisait » Israël, rappelant qu’elle publiait notamment des rapports sur l’Iran, bête noire d’Israël.
Pour ne pas faillir à leur réputation victimaire, il n’aura pas fallu beaucoup de temps aux responsables juifs israéliens pour répondre aux accusations fondées de l’ONG en sortant la carte de l’antisémitisme, une carte qui marche de moins en moins, tant elle a été usée sur tous ses côtés, et abattue à tort et à travers. Il ne manque plus que la convocation de la Shoah dans le débat, une Shoah qui commence à se faire vieille, 80 ans déjà. Que se passera-t-il dans 20 ans, quand elle aura 100 ans ? La carte de l’intouchabilité sera-t-elle encore valable ? Quelle est sa durée de vie ?
Comment l’État d’Israël a mis en place un système de domination et d’oppression à l’encontre du peuple palestinien ?
Découvrez notre enquête ⬇️ https://t.co/93qi9bk8io
— Amnesty International France (@amnestyfrance) February 1, 2022