« Franchement, j’vous dis la vérité. Il a dit un truc le Président, il a dit “des rumeurs comme ça, on finit par y croire”. Et j’vous jure qu’c’est vrai. Moi parfois on me dit des trucs même sur moi : n’importe quoi ! Et c’est vrai que tellement tu l’as vu, après ça devient dans l’inconscient collectif, tu te dis “ce truc-là est vrai”, et ça, c’est insupportable. »
Ainsi, dans son émission du 11 mars 2024, l’avocat-animateur star Cyril Hanouna tente-t-il de défendre son prestigieux client (ou patron) face à la rumeur. Quelle rumeur ? Que le Président ne serait pas au niveau de sa tâche ? Non, que son épouse serait née homme. L’affaire a pris depuis 48 heures des proportions internationales.
Les chroniqueurs sont sous le choc : on les sent très mal à l’aise sur cette affaire, hésitant entre la fake news et l’horrible vérité. C’est vrai que parfois, et là on ne parle pas du BrigitteGate, la vérité est dure à entendre. Le mensonge est une musique plus douce aux oreilles.
Ce qui est intéressant dans cet épisode, c’est que, pour lutter contre ce qu’ils considèrent comme une rumeur émanant des réseaux complotistes – pour reprendre la terminologie des voleurs de patates du PatyGate –, on fasse appel au complot des officines, principalement russes. Le complot, des fois ça existe, des fois ça n’existe pas, pour ces gens-là.
C’est le cas de Jean-Marc Sylvestre, à 3’13. On sait que les chroniqueurs ne sont pas libres de leur parole, que la production les briefe pour jouer un rôle, mais au bout du compte, ce qu’ils disent reste leur parole, donc leur responsabilité. L’ancien animateur économique du groupe TF1 s’emballe dans le délire complotiste :
« Moi ce que j’espère, c’est que y ait des enquêtes derrière qui sont faites, parce que y a des officines en France, y a des officines en Europe, y a des officines aux États-Unis. Sont-elles téléguidées par la Russie ou par d’autres pays ? On n’en sait rien, mais toujours est-il que tout ça participe d’une manœuvre globale de déstabilisation de l’Occident et des démocraties libérales. »
En revanche, si les infos de Faits & Documents sont avérées, alors Sylvestre va passer pour un imbécile. Parce qu’associer le BrigitteGate à une attaque sino-russe soutenue par les BRICS contre l’axe du bien, il faut le faire !
Le gars en rose, dont on a oublié le nom, parle de « rumeurs qui émanent des réseaux sociaux », ce qui reviendrait à dire, en creux, que ce qui émane des médias mainstream, comme leur émission, serait source de vérité. Décidément, le BrigitteGate les emporte loin des rivages de la raison. Le gars en rose appuie sa démonstration sur la faute du Président face à la rumeur (à 4’05) :
« Y avait plein de gens qui l’ont entendue mais je pense qu’il y a aussi plein de gens qui l’avaient pas entendue, et en s’exprimant publiquement là-dessus, y a plein de gens qui vont découvrir cette rumeur. »
Plein de gens qui vont découvrir qu’on les a peut-être pris pour des jambons, aussi...
Touche pas à mon poste !, qu’on pourra rebaptiser Touche pas à Brigitte !, n’est peut-être pas le meilleur cénacle pour défendre la communication du couple présidentiel, mais on sent qu’il y a eu trans-mission de l’Élysée au plateau d’Hanouna. À eux de se dépatouiller avec la patate chaude !
Au tour du « fils de » Cardoze aux cheveux gris-blanc d’intervenir, avec une assurance due à son rang (de « fils de ») à 4’45 :
« Même quand tu leur prouves que tout est bidon, les gens continuent de croire. »
Analysons cette affirmation : déjà, lui-même ou le camp macronien n’ont rien prouvé du tout, ou alors on a raté un épisode. Deuxio, il prend les gens pour des cons, qui croiraient les conneries qu’on leur balance, comme ça, naturellement. C’est du mépris de classe, étonnant de la part d’un fils de journaliste communiste.
Montiel : « C’est tellement invraisemblable ! »
Les chroniqueurs, l’un après l’autre, crament ce qu’il leur reste de réputation et de crédibilité sur cette affaire, qu’il ne fallait pas toucher. Ils expliquent tous que Macron a eu tort d’en parler, pour faire taire la rumeur, et eux font comme Macron : ils alimentent le foyer.
Plus sérieux, puisque c’est l’envoyé officiel de l’Élysée dans l’émission, Bernard Montiel prend la parole. Alors qu’on s’attendait à une explication subtile, à double sens, bien dans son genre florentin, voilà qu’il tombe dans la contre-accusation de bas étage (à 6’25), se mettant à la place de Brigitte, qu’il connaît bien :
« C’est pour ça qu’au bout d’un moment, t’en as plein le cul qu’on te raconte ces conneries ! »
Montiel prend alors un gros risque avec cette affirmation :
« Jean-Michel Trogneux est un homme qui existe, c’est son frère, hein, et il existe, c’est pas. »
Et là il regarde le plafond, ou le ciel. Comprenne qui pourra.
Hanouna, qui fait l’âne, demande à Montiel d’où vient cette rumeur. Réponse de Bernard à 7’37, qui va botter en touche tellement loin, qu’on ne verra plus jamais le ballon.
Hanouna : C’est parti d’où cette histoire ?
Montiel : Alors c’est deux idiotes sur YouTube, une qui se prétendait medium, et une autre journaliste, on sait pas où... En fait ça viendrait de l’extrême droite, extrême droite, extrême droite très lointaine, genre euh, genre très dure, une droite très très très.
Maillet : Genre Rivarol, quoi.
Montiel : Faits & Documents, ça vient de là, les filles manipulées.
Après ces brillantes plaidoiries, on passe à Gilles Merguez, le clown de l’équipe. Et alors là, pub nationale par le soumis d’Hanouna qui déroule le tapis rouge à Faits & Documents. Il est soutenu par la grande géopoliticienne Valérie Bénaïm, qui évoque les « officines russes qui ont intérêt à déstabiliser le pays ». Se sentant pousser des ailes grâce à cette alliée de poids, Sylvestre en profite pour partir en sucette avec l’usine à trolls du groupe Wagner...
On précisera en passant que la Macronie n’a pas besoin des Russes pour déstabiliser le pays, qui a plongé dans une crise économico-sociale sans précédent depuis la mise sur le trône, par la paire Minc-Attali (avec Rothschild derrière le rideau), d’un jeune homme venu de nulle part, sans racines ni passé, flanqué d’une épouse au passé encore plus nébuleux.