Comment aller ensemble dans la bonne direction, après que les revendications féministes du 14 juin auront été formulées et – avec un peu de chance – écoutées ? Le Temps a donné la parole à trois experts de la masculinité en leur posant une question simple : que peuvent faire les hommes au quotidien ?
Sébastien Chauvin est professeur associé au Centre en études genre de l’Université de Lausanne
Aux hommes qui nous lisent, j’ai envie de dire : « Vous devriez vous intéresser à ces questions, car elles s’intéressent à vous ». Pour agir correctement, il faut d’abord prendre conscience de son privilège. Qu’on soit un homme sympa ou pas, on bénéficie des avantages associés à la discrimination envers les femmes, quand bien même on n’y participe pas personnellement.
« Il faut identifier son propre privilège et ne pas attendre d’être félicité à chaque initiative »
Je pense aux femmes qui renoncent à faire carrière, à cause du harcèlement sexuel ou de la culture de « boys’ club » dans tel ou tel milieu professionnel. Qui dit discrimination des unes dit privilège des autres ! Autre exemple : dans l’univers domestique, il ne suffit pas de partager les tâches. Les travaux sur la « charge mentale » ont montré que le seul temps n’était pas une bonne mesure du partage réel : si on se contente d’« aider » en laissant la charge aux femmes, aux mères et aux sœurs, alors les dés sont pipés. En outre, lorsqu’un homme s’efforce d’assurer davantage de tâches, par exemple liées à la parentalité, on a tendance à lui dire bravo et à le juger particulièrement vertueux. Cela alors que les mêmes tâches effectuées par des femmes sont perçues comme normales ! Partager réellement, c’est aussi accepter de ne pas être félicité.
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Mélissa Blais est post-doctorante à l’Institut d’étude de la citoyenneté, Université de Genève, et codirectrice de l’ouvrage Antiféminismes et masculinismes d’hier et d’aujourd’hui, publié aux Presses universitaires de France.
La féministe Rebecca West disait : « Je n’ai jamais réussi à définir le féminisme. Tout ce que je sais, c’est que les gens me traitent de féministe chaque fois que mon comportement ne permet plus de me confondre avec un paillasson ».
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« Il est crucial d’écouter les femmes, de lire les textes féministes, de désapprendre certains comportements, et de faire un travail sur soi-même »
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Enfin, on ne dit pas suffisamment que les hommes doivent accepter de perdre, de la même manière que les patrons d’entreprise perdent du contrôle et du revenu lorsque les syndicats revendiquent de meilleurs salaires. En ce sens, les hommes doivent accepter de perdre notamment du temps de loisir puisqu’ils doivent accomplir plus de tâches domestiques.
Les hommes qui ne se sentent pas concernés par la question sont lucides : ils ont compris tout ce que le féminisme exigeait d’eux. Mais ils pourraient faire preuve d’empathie en s’érigeant contre les discriminations et les violences qui marquent la vie de tant de femmes. Sur une note plus optimiste, les hommes hétérosexuels qui s’intéressent de près aux luttes féministes sont susceptibles d’avoir une vie de couple plus épanouissante et une sexualité plus satisfaisante, comme le souligne l’étude menée à l’Université d’Indianapolis.
Francis Dupuis-Déri est professeur en science politique à l’Université du Québec à Montréal (UQAM), auteur de La Crise de la masculinité : autopsie d’un mythe tenace (Ed. Remue-ménage, 2018)
Les hommes pro-féministes devraient – je présume – écouter les féministes et agir en conséquence, être des des complices de leurs combats. Cela passe par exemple par les conversations en non-mixité masculine, quand les hommes se retrouvent seuls entre eux : il nous est possible de nous confronter à des hommes sexistes ou lesbophobes et de rompre des liens importants, inhérents à ce qu’on a appelé les « boys’ clubs », par solidarité avec les femmes et les féministes.
« Les hommes pourraient commencer par se confronter à d’autres hommes en relevant les propos sexistes qu’ils tiennent entre eux »
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Je me demande : les hommes qui ne se sentent pas concernés n’ont-il pas une mère, des sœurs, une conjointe (s’ils sont hétéros) et des filles qui méritent un salaire égal et la fin des violences physiques et sexuelles, entre autres enjeux ?
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L’antiféminisme s’exprime sur tous les fronts parce que les groupes dominants n’abandonnent jamais le moindre privilège sans résister, sans ridiculiser, sans mentir. Les féministes ont bien des luttes à mener pour que nous cédions enfin.
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Cet article de L’Express va faire trembler 95% des hommes...
La justice argentine a condamné un homme à indemniser son ex-femme en lui versant 8 millions de pesos – environ 173 000 dollars – pour les tâches ménagères qu’elles a faites pendant leurs 27 ans de mariage, a rapporté lundi la presse locale.
Cette femme de 70 ans, diplômée en économie, s’est consacrée à l’éducation de ses enfants et aux travaux du foyer pendant leur vie commune. « La dépendance économique des femmes vis-à-vis de leurs maris est l’un des mécanismes centraux à travers lesquels on subordonne les femmes dans la société », a expliqué la juge Victoria Fama.
La magistrate a fixé une « somme raisonnable pour rééquilibrer la situation économique disparate des époux ». « Après 27 ans de mariage, le prévenu l’a quittée alors qu’elle avait 60 ans révolus, âge auquel les femmes perçoivent la pension de retraite, se voyant privée d’accès au marché du travail », lit-on dans le jugement.
OK, on va faire plus le ménage mais c’est pas gagné pour tout le monde :
Il y a un mais, et les femmes pourraient bien en pâtir :