Lorsqu’Emmanuel Macron a déclaré en octobre qu’il était « dur d’avoir vingt ans » en 2020, les réactions n’ont pas manqué, souvent moqueuses, répondant qu’avoir vingt ans en 1914 était une autre paire de manches. À l’évidence, la jeunesse française n’est pas sommée de monter au front, mais cette comparaison est malvenue et interdit de saisir toutes les formes de détresse qui s’accumulent gravement au sein de cette « génération Covid ».
C’est certes le lot de toute la population que d’être soumise aux mesures et aux contraintes motivées par le contexte sanitaire et que l’accoutumance nous ferait presque considérer comme « normales » si l’on n’y prenait garde. Pourtant, la jeunesse mérite une attention toute particulière. Elle que l’on sait être très largement protégée des formes graves du virus prend de plein fouet les dommages collatéraux économiques, sociaux, psychologiques et, disons-le, anthropologiques de l’épidémie.
Quelles perspectives pour l’apprenti en filière professionnelle qui espérait décrocher rapidement son premier CDI, mais qui voit les entreprises plus frileuses que jamais à l’idée d’embaucher ? Alors que les bars et restaurants ne rouvriront finalement pas fin janvier, que devient l’étudiante qui ne parvenait à financer ses études et payer son loyer qu’à l’aide de son emploi dans la restauration, et désormais obligée de demander l’aide des Restos du Cœur ? Quelles possibilités de rebond pour ce jeune indépendant qui venait fièrement de « se lancer » et qui restera des années durant dépendant d’aides de l’État ?
Il y a ces tristes réalités matérielles, qui viennent d’ailleurs se superposer à un phénomène déjà installé de chômage de masse et de précarité tous azimuts. Il y a aussi une détresse psychologique qui s’est aggravée et dont on ne mesure certainement pas encore le caractère inédit. L’étudiant du supérieur, à peine diplômé du Baccalauréat, censé vivre « les plus belles années de la vie », est bien souvent claquemuré dans ses neufs mètres carrés, obligé de vivre sa « vie étudiante » par procuration et n’aura siégé dans les amphithéâtres que le temps d’un examen.
Les chiffres sont là, inquiétants : selon un sondage Odoxa-Dentsu, c’est pour les 15-30 que le second confinement et les mesures qui l’accompagnent ont été le plus dur à vivre. L’enquête nationale réalisée par l’Observatoire de la vie étudiante montre que la moitié des étudiants ont déjà souffert de solitude ou d’isolement au cours du premier confinement. Si l’état psychologique des Français dans leur ensemble s’est considérablement aggravé, la situation de cette jeunesse qui sera la France de demain doit nous préoccuper au plus haut point.
Lire la tribune entière sur causeur.fr