Quelque chose n’aurait-il pas déjà déraillé au Proche-Orient avec la guerre par procuration que se livrent l’Arabie et l’Iran au Yémen, depuis 1 an, en Syrie depuis 3 ans et en Irak depuis 10 ans… et qui débouche sur une rupture diplomatique entre les deux pays ?
Certes, ce n’est pas la première fois que Téhéran et Ryad jouent au petit jeu du « je ferme mon ambassade », mais jamais pendant que des troupes financées et armées par les deux pays se livrent à des duels d’artillerie et s’essayent désormais à des tirs de missiles.
Vu la vitesse avec laquelle le conflit s’envenime et l’absence de retenue des deux protagonistes dans tous les registres, quel sera le prochain niveau d’escalade après l’interminable enchaînement de destructions de mosquées chiite et sunnites en Irak et en Syrie, les centaines d’attentats suicides sur les marchés de façon à tuer le plus grand nombre de civils, les tirs de mortier à l’aveugle (le bilan depuis 12 ans se chiffre en centaines de milliers de victimes).
Et ne faut-il pas inclure le pilotage de l’effondrement des cours du pétrole par l’Arabie Saoudite comme un coup de billard à 3 bandes qui aurait pour objectif final d’asphyxier financièrement l’Iran, avec la complicité active du Qatar ?
Toutes les hypothèses ont été envisagées quand l’Arabie a fait délibérément s’effondrer les cours sous les 75$ en novembre 2014 : mettre à genoux l’économie russe, déjà fragilisée par les sanctions occidentales (un « coup » fomenté conjointement par Ryad et Washington). L’effondrement du baril se poursuivant en mars 2015 puis reprenant de plus belle en fin d’année – et sans que Moscou menace de refermer un peu les robinets pour faire remonter les cours –, les opérateurs ont commencé à envisager que l’Arabie cherche à rabattre son caquet aux États-Unis qui prétendaient accéder à leur indépendance énergétique en asphyxiant (ruinant) l’industrie du « shale oil » [pétrole de schiste, NDLR].
Une stratégie d’autant plus pénalisante pour les USA que 50% des dettes « high yield » sont adossées au secteur du pétrole (et gaz) de schistes.
Une hypothèse renforcée par le sentiment de « trahison » ressenti par Ryad vis-à-vis de la normalisation des relations entre Washington et Téhéran orchestrée par l’administration Obama et qui a rendu possible, sinon très probable, le retour imminent de l’Iran sur l’échiquier pétrolier international.
Mais en réintégrant la liste des pays avec lesquels il est permis de commercer, que peut espérer l’Iran avec des recettes pétrolières fantômes, sans compter que la chute du baril s’explique pour une bonne du fait du surplus d’or noir anticipé par la reprise de ses propres exportations ?
Sans argent abondant, Téhéran ne pourra signer les juteux contrats que les multinationales américaines et européennes espéraient (souvenons-nous qu’avant le boycott imposé par les États-Unis, l’Iran représentait le premier marché extérieur du groupe PSA et un très important client pour Renault).