Elle est la dernière d’une longue série de nonagénaires à être accusés de crimes dans le cadre de la Shoah perpétré par le régime nazi et la seule femme à être jugée depuis des décennies en Allemagne. Irmgard Furchner, 96 ans, ancienne secrétaire du camp de concentration de Stutthof, à proximité de Dantzig (Gdansk) devait comparaître devant la justice, à partir de jeudi 30 septembre. Mais elle a pris la fuite quelques heures avant l’ouverture de son procès. Après quelques heures de cavale, elle a été rattrapée par la police. « Elle a quitté son foyer [pour personnes âgées de Quickborn] ce matin. Elle a pris un taxi », a précisé Frederike Milhoffer, une porte-parole du tribunal.
Elle doit être jugée par le tribunal pour mineurs d’Itzehoe, à 51 km au nord-ouest d’Hambourg, dans le Schleswig-Holstein, en raison de son jeune âge au moment des faits. En juin 1943, alors qu’elle n’avait que 18 ans, Irmgard Furchner avait rejoint le camp en tant que dactylographe et avait retranscrit des ordres d’exécution dictés par le commandant Paul Werner Hoppe, le chef du camp, et aurait ainsi participé à l’assassinat de 11 412 personnes. Elle y reste jusqu’au 1er avril 1945, précise l’hebdomadaire Der Spiegel.
Selon la presse allemande, elle aurait écrit au juge pour demander à ce que son dossier soit examiné par contumace, une impossibilité légale en Allemagne. Pour Wolf Molkentin, son avocat, qui était présent à l’ouverture de l’audience, l’accusée ignorait le massacre de masse orchestré dans le camp de concentration où elle travaillait. « Ma cliente aurait travaillé au milieu de SS expérimentés dans la violence. Mais devait-elle partager leur niveau de connaissance ? (…) À mon avis, ce n’est pas forcément évident », a t-il déclaré lors d’une interview accordée au Spiegel.
La brève fuite de la suspecte a suscité la consternation, notamment du président du Centre Simon-Wiesenthal, qui traque les nazis encore en vie. « Suffisamment en bonne santé pour fuir, suffisamment en bonne santé pour aller en prison ! », a twitté Efraim Zuroff. « Cela montre un mépris pour les survivants et l’État de droit », a réagi auprès de l’Agence France-Presse Christoph Heubner, le vice-président du Comité Auschwitz. « Même si cette femme est très âgée, le tribunal n’aurait-il pas pu prendre des précautions ? », s’est-il interrogé.
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