Le soleil de plomb qui s’abat sur la jungle colombienne ne semble pas perturber Tomas. Ordinateur en main, ce guérilléro en uniforme expose à ses « élèves » ce qui les attend une fois que les armes se seront tues.
Tomas a déjà combattu 14 ans au sein des Forces armées révolutionnaires de Colombie (Farc), la rébellion marxiste aujourd’hui en passe de conclure des négociations de paix avec le gouvernement colombien après un demi-siècle de conflit et plus de 260 000 morts.
De l’aveu propre de cet homme à la barbe soigneusement taillée, la mission qui lui a été confiée est délicate : entre deux marches dans les montagnes du nord-ouest de la Colombie, il doit expliquer à ses camarades les enjeux des pourparlers menés depuis fin 2012 à Cuba.
« Comment allons-nous nous séparer de cette arme que nous portons depuis tant d’années ? », résume Thomas face à des journalistes de l’AFP exceptionnellement admis dans cette zone sous contrôle de la guérilla.
Une main sur son ordinateur, l’autre sur le fusil d’assaut Kalashnikov dont il ne se sépare jamais, cet expert en zootechnie dispense la « pédagogie de la paix » à une trentaine de guérilleros installés comme des écoliers sur des bancs qu’ils ont eux-mêmes découpés et montés.
Avec cet enseignement, la guérilla entend persuader ses quelque 7 000 combattants (dont près de la moitié sont des femmes) du bien fondé de l’abandon des armes et du retour à la légalité comme points de départ de la transformation du mouvement en parti politique.
Ces élèves ont longtemps suivi l’enseignement militaire dans ces classes à ciel ouvert. Mais après avoir échoué à conquérir le pouvoir au prix de sanglants affrontements avec l’armée et les milices paramilitaires, les Farc lorgnent désormais un destin électoral.
« Certains l’envisagent dans l’expectative, voire avec joie et optimisme. D’autres sont encore prudents, avec quelques réserves (...) et surtout la crainte de commettre un faux pas », explique Tomas.