On a beaucoup lu et beaucoup entendu de choses depuis ce dimanche 27 juin, 20h. Mais rien qui ne nous ait paru définitivement pertinent. La défaite du Rassemblement national ? L’effondrement de la République en marche ? La victoire de la droite institutionnelle et le maintien à flot du parti socialiste ? L’ancrage des écologistes ? ll nous semble que toutes ces assertions peuvent être argumentées tout aussi bien que démenties. Et bien malin qui pourra en conclure quoi que ce soit pour l’élection vers laquelle tous les regards se tournent : la présidentielle 2022.
En effet, que penser d’une élection où la plupart des sortants sont réélus, sans grande surprise, où aucune force politique n’émerge particulièrement ? Le Rassemblement national continue une lente dégringolade débutée aux municipales où il avait perdu déjà 44 % de ses conseillers, la droite molle gagne dans des régions déjà acquises mais ne marque aucun renforcement particulier, à l’instar de la gauche molle mais dans des scores inférieurs ; quant aux écologistes ou à l’extrême gauche, ils ne restent que des supplétifs bien utiles à une gauche institutionnelle malingre et épuisée après 40 années de méfaits et de mensonges.
Et puis, surtout, que veulent dire ces chiffres lorsque l’abstention bat tous les records, avec au moins 65 % des Français qui ne se sont pas déplacés ? Bien sûr, l’on pourrait affirmer que l’abstention elle-même est une information. Et si celle-ci n’était due qu’à l’étourdissements de citoyens en train de sortir (ou se l’imaginant) d’une grosse année de restrictions diverses et bien plus occupés à se divertir l’esprit plutôt qu’à s’intéresser à des élections qui, déjà, ne motivent guère habituellement ?
Éventuellement, l’on pourrait penser que l’érosion du Rassemblement national fait écho à leur positionnement extrêmement conformiste sur la crise sanitaire, perdant des électeurs déçus. Il est certain que l’électeur du Rassemblement national ressemble plutôt à un admirateur du professeur Raoult que du télévangéliste (mais peu chrétien) Deray.
Tellement inquiet de paraître marginal, le Rassemblement national a accepté les contraintes imposées (confinement, couvre-feu et masques) ainsi que les autres mesures sanitaires et sociales, avec quelques critiques à la marge, certes, mais une soumission totale au scénario officiel sur le virus et sa dangerosité. Cependant – car une fois encore une telle conclusion serait rapide et incomplète –, les scores du parti de droite nationale avaient déjà commencé à s’éroder lors des municipales, dès le premier tour du 15 mars !
Localement, on ne peut rien dire d’un Renaud Muselier qui fanfaronne alors qu’il a été élu avec les voix d’une gauche prête à se faire hara-kiri plutôt que de donner une région à un RN qui eut été minoritaire et bien en peine d’appliquer quelque programme fasciste que ce soit, montrant une fois encore combien le gauchisme est une maladie mentale.
Valérie Pécresse, qui nous disait il y a encore 4 jours que c’était bien normal que les forces de l’ordre tapent sur les jeunes qui avaient l’outrecuidance de sortir danser alors que nous étions en pleine crise sanitaire, n’a probablement pas été réélue par ceux-ci mais plutôt par cette petite bourgeoisie bêtement de droite et portant bien docilement son masque. Et surtout qui se mobilisent pour aller voter sagement, là où l’électorat jeune et l’électorat populaire sont bien moins disciplinés.
"Il faut que les jeunes aillent se faire vacciner" "Tant qu'ils ne seront pas vaccinés ce sera dangereux et tant que ce sera dangereux, le gouvernement aura raison d'envoyer les forces de l'ordre", indique Valérie Pécresse pic.twitter.com/R0pYmQdaF4
— franceinfo (@franceinfo) June 24, 2021
L’éternel pubère et insupportablement lisse Laurent Wauquiez, qui arbore désormais une barbe et garde ostensiblement ses cheveux devenus totalement blancs pour lui donner un air un peu plus mâture, fait carton plein en Auvergne-Rhône-Alpes, augmentant ses scores de 2015, passant de 40 % à 55 %. Mais, une fois encore, avec si peu de votants, dont une mobilisation naturelle des personnes âgées et des citadins bien propres sur eux, comment pouvait-il en être autrement ?
Quant à la star de la soirée, Xavier Bertrand, avec un score qui lui fait dire qu’il a « gagné sa primaire », se sent gonfler des ailes présidentielles. En effet, espérant court-circuiter les étapes de son parti, il avait annoncé : « Ma primaire, ça sera le scrutin régional des Hauts-de-France. Je ne veux plus de filtre entre le peuple et moi et je ne me soumettrai pas à des règles fixées par les partis politiques ».
Il avait prévenu : « Nous ne voulons plus revivre ce duel Macron-Le Pen et ça, certains ne veulent peut-être pas l’entendre mais moi, je l’entends et j’ai conscience que c’est la profondeur du pays qui veut autre chose, une autre voix. » Une autre voix peut-être, mais moins baratineuse avec ses ritournelles politiciennes éculées : « La droite républicaine peut gagner l’an prochain, une droite populaire qui gagnera sur ses valeurs et ses convictions, sans aucune compromission. » Ses valeurs et ses convictions et sans compromissions ? Avec de telles boniments, l’on peut comprendre que les électeurs se détournent chaque jour un peu plus des élections.
Il n’en faudra en tout cas pas moins pour que la presse s’invente un duel possible d’un nouveau genre Bertrand-Macron. Finalement, on échangera un jeune enfant pourri-gâté et sa maman, contre un vieux politicien bedonnant et sa jeune donzelle de 22 ans sa cadette. Au moins on pourra reluquer la première dame de France. Ce vaste cloaque électoral force à des plaisirs modestes.