Ce dimanche 11 septembre à Dourdan, le leader de Debout la République – fort de 354 promesses de parrainage – a accusé les élites dirigeantes de « haute trahison ». Bien décidé à prendre le maquis contre la dictature de l’euro, il espère récupérer les voix aussi bien des chevènemen-tistes que des villepinistes.
Un peu plus fournie que l’année dernière, bientôt trop petite, la salle de réception de l’hôtel Belambra de Dourdan a été chauffée à blanc par le vice-président de Debout la République (DLR), François Morvan. Un ancien de la LCR et du MRC de Chevènement qui a l’art du franc-parler. Le violet habituel a été troqué contre des drapeaux bleu blanc rouge et un pupitre estampillé « NDA 2012 ».
Pas de doute, en attendant Nicolas Dupont-Aignan, les maires lui ayant déjà promis leur parrainage lui taillent un costume de présidentiable. Tous reconnaissent l’« homme de terrain » qui veut lutter contre la réforme des collectivités territoriales et soutient le monde rural. Tous flattent le « visionnaire » qui a dit non à l’euro dès 92 et a fait le choix de l’indépendance en quittant l’UMP.
« N’ayez pas peur ! », « Réveillez-vous ! », « Je suis candidat parce que je veux rendre le pouvoir au peuple français et changer le système ! », s’égosille NDA devant la trentaine de jeunes – ils n’étaient guère que trois fois plus ce weekend – qui s’est mis en rang d’oignon sur la tribune. Ce discours ressemble à s’y méprendre à celui d’un Mélenchon.
Mais la différence de programme est sans appel. Le leader de DLR, lui, pense que reprendre le pouvoir, c’est avant tout sortir de l’euro. Une sortie « organisée, réfléchie et coordonnée » avec les autres pays européens. « C’est plus simple qu’on le croit », rassure-t-il même s’il conclut que ce ne « sera pas facile » et qu’il « faudra le faire avec doigté ». La référence gaulliste n’est jamais bien loin, de la sortie de l’Otan au refus d’un fédéralisme européen qui annihilerait la souveraineté de la France.
L’autre différence avec Mélenchon, à DLR, on ne se prive pas de la faire remarquer. Pas question de sacrifier « sa foi » sur l’autel de sa « famille ». Comprendre : NDA, lui, est indépendant, il a coupé les ponts avec l’UMP. Alors qu’on sait bien « que Mélenchon votera Hollande au second tour », tacle François Morvan insistant sur le fait que critiquer le PS est bien joli mais insuffisant. Tous ici nourrissent une profonde détestation pour ce couple infernal qui dit « oui » en chœur à l’austérité. Si bien qu’au détour des discussions avec certains militants on voit poindre des accents lepénistes à l’encontre de cet « UMPS ».
Paul-Marie Couteaux est un « simpliste »
« Le discours du FN a changé », admet François Morvan mais selon lui, la fille Le Pen a tout bonnement pompé les idées protectionnistes de NDA sur la sortie de l’euro et n’est pas pour autant crédible en la matière. « Même relooké, un rassemblement avec le FN n’est pas possible », affirme-t-il prenant pour exemple les « journées d’été de Marine » qui avaient lieu en parallèle ce weekend à Nice. « Ils disent trois bonnes idées et la quatrième est un propos antisémite tenu par le président d’honneur (Jean-Marie Le Pen, ndlr). »
Quid du ralliement « en bonne et due forme » au FN de Paul-Marie Couteaux, cet ancien chevènementiste proche de NDA et habitué de DLR ? Ici, on rechigne à parler de coup dur mais l’amertume affleure. « C’est un simpliste, un souverainiste traditionnel, balance le vice-président de DLR, il ne représente pas grand chose. Il fait toujours cette erreur d’aller au plus court. » « Il est assez irresponsable. Il s’est laissé séduire », acquiesce de son côté David Desgouilles (blogueur associé de Marianne2) qui suggère qu’il y a sans doute des « circonscriptions en ligne de mire » même s’il y a aussi de la « conviction » dans cet engagement.
Un discours plus musclé
Sortir de l’euro ? Une idée qui pouvait paraître farfelue avant que la crise ne vienne mettre son grain de sel dans les petites affaires de Bruxelles et de la Bourse, cette fameuse « corbeille » que le général de Gaulle avait en horreur. Mais qu’on ne s’y trompe pas, NDA propose surtout un autre euro, un « euro taille variable » au lieu de cet euro « taille unique » dans lequel se sont engoncés les pays européens – un euro « surévalué de 40% », soumis au diktat des « puissances extérieures ». Scénario de résistance à l’appui – il l’a déjà écrit il y a des mois dans son livre L’Arnaque du siècle – NDA maîtrise assez bien son sujet et n’épargne pas ses adversaires.
Une petite ménagerie de l’élite dirigeante accusée de « haute trahison » : voilà ce que le leader de DLR donne en pâture. « On le sait bien, le mauvais poisson pourrit toujours par la tête », ironise-t-il au sujet de DSK et du FMI qui étrangle la Grèce. « Ils persistent, ils signent et ils en sont fiers ! », dénonce-t-il en montrant du doigt les gouvernements qui cautionnent l’austérité et notamment Christine Lagarde : « De véritables autruches (…)
D’ailleurs la plus connue d’entre elle a été exfiltrée au FMI. » Tous les noms d’oiseaux y passent. Même les « canards sans tête » qui devraient selon lui avoir « honte » de demander aux Français des efforts supplémentaires. Il cite pèle-mêle « Pascal Lamy, le socialiste caviar », Jean-Claude Trichet, le patron de la BCE, et Alain Minc – hué à plusieurs reprises.
« Il a virilisé son discours », remarque David Desgouilles rappelant que NDA a « plutôt une réputation de gentil ». Mais au milieu de cette jungle politique mise au pilori, la petite grenouille Dupont-Aignan pourra-t-elle se muer en bœuf ? « C’est une mayonnaise qui prend.
Mais jusqu’où prendra-t-elle ? Est-ce que la cuisine sera bonne ? », s’interroge François Morvan misant sur les désistements de Dominique de Villepin et de Jean-Pierre Chevènement pour grossir les troupes. Même si les 500 parrainages semblent à portée de main, il ne suffira pas à NDA de continuer à tirer dans le tas depuis sa tranchée. Quand il sera enfin invité des plateaux télé, il lui faudra être crédible. Ce qui est loin d’être une mince affaire.