Les députés brésiliens ont donné jeudi à Brasilia le coup d’envoi de la procédure destitution de la présidente de gauche Dilma Rousseff, qui tangue au milieu d’une tempête politique majeure. Par ailleurs, l’avocat général de l’Union, José Eduardo Cardozo, a annoncé jeudi avoir fait appel de la décision d’un juge de Brasilia qui a suspendu dans la matinée la nomination de l’ex-président Lula comme ministre clé de la présidente Rousseff.
Les parlementaires ont élu une Commission spéciale de 65 députés, qui sera chargée de rédiger un rapport préconisant ou non la poursuite de la procédure contre la présidente, accusée par l’opposition de maquillage des comptes publics en 2014, l’année de sa réélection, et début 2015.
Ce rapport sera ensuite soumis à l’Assemblée plénière du Congrès des députés où un vote des deux tiers (342 sur 513 députés) serait nécessaire pour prononcer la mise en accusation de la présidente devant le Sénat. Dans le cas contraire, la procédure serait enterrée. En cas de mise en accusation, Dilma Rousseff serait écartée provisoirement de ses fonctions pendant 180 jours au maximum.
Deux tiers des voix des sénateurs (54 sur 81) seraient requises pour la destituer immédiatement, faute de quoi elle réassumerait immédiatement ses fonctions.
Cette procédure avait été lancée en décembre à l’initiative de l’opposition, puis freinée par le Tribunal supérieur fédéral (STF) qui en a fixé définitivement les règles mercredi soir.
Le vote des députés est intervenu dans le contexte politique explosif de la nomination controversée au gouvernement de l’ex-président Luiz Inacio Lula da Silva, pour voler au secours de son héritière politique en grande difficulté.
Suspension provisoire de Lula
Un juge de Brasilia a suspendu provisoirement la prise de fonctions de Lula, intervenue plus tôt dans la journée, y voyant une possible manoeuvre pour le faire échapper à un placement en détention dans le cadre de l’enquête sur les détournements de fonds au sein du géant étatique pétrolier Petrobras.
Lula est soupçonné de « corruption » et « blanchiment » par le juge en charge de ce dossier.
Sa nomination comme chef de cabinet de Dilma Rousseff lui confère un statut privilégié, puisqu’il ne peut désormais plus répondre pénalement de ses actes que devant le Tribunal suprême fédéral, chargé du volet politique du dossier.
L’avocat général de l’Union, José Eduardo Cardozo, a annoncé jeudi avoir fait appel de la décision du juge de première instance de Brasilia qui a suspendu dans la matinée la nomination de l’ex-président Lula comme ministre clé de la présidente Rousseff.
« Il n’y a pas de détournement de pouvoir » dans le choix de l’ex-président Luiz Inacio Lula da Silva (2003-2010) et « la raison de sa nomination n’est pas de le soustraire à une enquête », a assuré M. Cardoso, ex-ministre de la Justice de Mme Rousseff.
Trois millions de Brésiliens ont réclamé dimanche le départ de la présidente lors de manifestations d’ampleur historique alors que sa majorité se délite dangereusement.
Samedi, le grand parti centriste PMDB, pilier incontournable de sa majorité parlementaire, lui-même éclaboussé de plein fouet par le scandale Petrobras, s’était donné 30 jours pour claquer ou non la porte du gouvernement.
En cas de destitution de Mme Rousseff, c’est son vice-président Michel Temer, chef du PMDB, qui assumerait le pouvoir jusqu’aux prochaines élections générales prévues en 2018.
Des images de la manifestation du 13 mars :