Pour rappel, comment se déroule une interruption médicale de grossesse ? [1]
L’interruption médicale de grossesse est réalisée :
soit par technique médicamenteuse : la femme reçoit des médicaments qui déclenchent des contractions et donnent lieu à l’accouchement
soit par technique chirurgicale après échec de la technique médicamenteuse : curetage par aspiration, évacuation du « contenu utérin » après dilatation du col de l’utérus
Quand la grossesse a plus de 22 à 24 semaines d’aménorrhée [2], une anesthésie fœticide est recommandée avant le déclenchement de l’accouchement. Le plus souvent, il consiste à injecter dans le cordon ombilical une drogue anesthésiante ou analgésiante puis une drogue fœticide (entraînant la mort du fœtus).
La crise du conoravirus a vu l’instauration d’un régime dérogatoire en matière de réalisation d’interruptions de grossesse et comme souvent il est à craindre que ces mesures dérogatoires entrent dans le droit commun.
En effet, quand bien même les cancers du sein n’ont pas été dépistés, tout a été fait pour que le « droit des femmes à disposer de leur corps » – entendez par là non pas le droit des femmes à refuser un rapport sexuel ou à accéder à la contraception, mais le droit des femmes à supprimer la vie que leur corps abrite et protège – reste effectif durant le confinement.
Ainsi, le premier confinement a vu, par l’arrêté du 14 avril 2020 [3], la généralisation des téléconsultations pré-abortives et post-abortives, la distribution dématérialisée de la pilule abortive par envoi de l’ordonnance et l’extension du délai de réalisation d’IVG médicamenteuses, réalisables à domicile, de la 7e à la 9e semaine d’aménorrhée. Les femmes, comme s’en vante le ministre de la Santé Olivier Véran, ont pu avorter « sans devoir à aucun moment se rendre dans un cabinet médical » [4] – entendez « l’avortement par Skype ».
Pire, l’accès à titre dérogatoire à l’interruption médicale de grossesse, qui ne souffre d’aucun délai et peut être réalisée jusqu’au terme de la grossesse, a été facilité. Habituellement autorisée lorsqu’il est considéré qu’il y a une forte probabilité que l’enfant à naître soit atteint d’une affection d’une particulière gravité, reconnue comme incurable au moment du diagnostic, ou que la grossesse met en péril la santé de la mère, Olivier Véran a estimé que la détresse psychosociale devait être considérée comme un péril pour la santé de la mère et qu’il existait un risque psychosocial lié au confinement [5]. Ainsi, par courrier en date du 23 avril 2020, il a assoupli explicitement les conditions d’accès à l’interruption médicale de grossesse, incluant la raison de « détresse psychosociale ».
Et ce qui devait être dérogatoire pendant la durée du confinement a déjà été entériné par l’Assemblée nationale dans la nuit du 31 juillet au 1er août 2020 dans le cadre d’un amendement [6] au projet de loi bioéthique. Cependant, le projet de loi bioéthique doit encore être adopté en 2e lecture au Sénat.
En outre, les mesures dérogatoires pour faciliter l’accès à l’IVG durant le confinement ont été jugées insuffisantes par le Haut Conseil à l’Égalité entre les femmes et les hommes qui, dans une note publiée en date du 29 avril 2020 [7], réclame notamment l’allongement de deux semaines de grossesse du délai durant lequel l’IVG peut être pratiquée, le portant à 14 semaines au lieu de 12. Alors que l’allongement de ce délai était réclamé par les associations militantes uniquement en période de confinement, une proposition de loi visant à renforcer le droit à l’avortement et qui entérine l’allongement de ce délai dans le droit commun a été adoptée en 1re lecture à l’Assemblée nationale [8] le 8 octobre 2020, et ce, alors même qu’en 2018, en métropole, la proportion d’IVG dites « tardives », réalisées entre 10 et 12 semaines de grossesse varie seulement de 2 % à 11,7 % selon les départements [9].