Pour faire face au chômage de masse et à la paralysie économique de la Grande dépression, tant le gouvernement américain que le gouvernement allemand ont mis en place des programmes novateurs et ambitieux.
Bien que le « New Deal » du président Franklin Roosevelt n’ait été que d’un secours marginal, la politique plus ciblée et exhaustive du troisième Reich s’est montrée remarquablement efficace. En trois ans le chômage a été éradiqué et l’économie allemande était devenue florissante. Mais tandis que les mesures de Roosevelt contre la Grande dépression sont assez bien connues, l’histoire du succès d’Hitler face à la crise économique n’est, en général, ni comprise ni appréciée.
Adolf Hitler devint Chancelier de l’Allemagne le 30 janvier 1933. Quelques semaines plus tard, le 4 mars, Franklin Roosevelt prit ses fonctions de président des États-Unis. Les deux hommes sont restés à la tête de l’exécutif de leur pays durant les douze années qui ont suivi – jusqu’en avril 1945 peu avant la fin de la guerre en Europe. Au début de 1933, la production industrielle était tombée à environ la moitié de ce qu’elle était en 1929. Chaque dirigeant a rapidement lancé de nouvelles et audacieuses initiatives pour s’attaquer à cette terrible crise économique et surtout au fléau du chômage de masse. Et bien qu’il y ait des similitudes frappantes entre les efforts des deux gouvernements, les résultats ont été très différents.
John Kenneth Galbraith était l’un des économistes les plus influents et les plus lus du vingtième siècle. Il a été conseiller de plusieurs présidents et fut un temps ambassadeur en Inde des USA. Il est l’auteur de plusieurs dizaines d’ouvrages, et pendant plusieurs années, il enseigna l’économie à l’université Harvard. Concernant le bilan de l’Allemagne, Galbraith note :
« … L’élimination du chômage en Allemagne durant la Grande dépression sans inflation – et en n’ayant initialement recours qu’à des activités civiles – est une réussite remarquable. Cela a été rarement salué et est passé relativement inaperçu. L’idée que d’Hitler ne peut provenir que du mal s’étend à sa politique économique, comme elle s’étend probablement à tout le reste. »
La politique économique du régime d’Hitler, poursuit Galbraith, consistait en « un recours à grande échelle à l’emprunt pour financer les dépenses publiques, et, au début, c’était principalement pour des projets civils – chemins de fer, canaux et l’Autobahnen [réseau d’autoroutes]. L’effet sur la réduction du chômage a été beaucoup plus fort que dans n’importe quel autre pays industrialisé ». « Fin 1935 », écrit-il encore, « le chômage avait disparu en Allemagne. En 1936, des hauts revenus tiraient les prix vers le haut ou rendaient possible de les monter… l’Allemagne, à la fin des années trente, connaissait le plein-emploi et la stabilité des prix. C’était, dans le monde industrialisé, une réalisation absolument unique. » « Hitler se montrait le précurseur des politiques économiques modernes » explique l’économiste, « en reconnaissant qu’une approche rapide du plein-emploi n’est possible que si elle se combine avec un contrôle des salaires et des prix. Qu’une nation à ce point pressée par des peurs sur l’économie ait fait appel à Hitler comme les Américains à F.D.R. n’est pas une surprise. »
Selon Galbraith, les autres pays, n’ont pas compris ni appris de l’expérience Allemande :
« L’exemple allemand était instructif mais pas convaincant, les conservateurs anglais et américains, en observant les hérésies financières nazies – les emprunts et les dépenses publiques – prédisaient tous un effondrement… Quant aux libéraux américains et aux socialistes anglais, ils ne voyaient que la répression, la destruction des syndicats, les chemises brunes, les chemises noires, les camps de concentration, les vociférations d’estrades, et ils ignoraient l’économique. Rien de bon [croyaient-ils], même pas le plein-emploi, ne pouvait émaner d’Hitler ».
Deux jours après avoir pris ses fonctions de chancelier, Hitler s’est adressé à la nation par radio. Même si lui-même et les autres leaders de son mouvement avaient clairement annoncé leur intention de réorganiser la vie sociale, politique, culturelle et éducative conformément aux principes nationaux-socialistes, tout le monde savait que, avec six millions de sans-emploi et l’économie nationale paralysée, la grande priorité du moment était de rétablir la vie économique du pays et, avant tout, de s’attaquer au chômage et à la création d’emplois productifs.
« La misère de notre peuple est horrible à voir », dit Hitler dans son discours inaugural.
« Aux millions de sans-emplois affamés de l’industrie s’ajoutent les millions de la classe moyenne et des artisans qui s’appauvrissent. Si cet effondrement arrive à son terme les agriculteurs feront face à une catastrophe aux proportions incalculables. Parce qu’il ne s’agira pas que de l’effondrement d’une nation, mais d’un héritage de deux mille ans fait des plus grands accomplissements de la culture et de la civilisation humaine. »
Le nouveau gouvernement, annonça Hitler, « réussira dans la grande tâche de réorganiser l’économie de notre nation au moyen de deux plans quadriennaux. Les agriculteurs allemands doivent être sauvés pour maintenir l’approvisionnement alimentaire de la nation et ainsi préserver les fondations vitales du pays. Les travailleurs allemands seront sauvés de la ruine par une attaque concertée et globale contre le chômage. »
« Dans les quatre ans », promit-il, « le chômage doit être surmonté de façon décisive.. Les partis marxistes et leurs alliés ont eu 14 années pour montrer ce dont ils étaient capables. Le résultat est un tas de ruines. À présent, le peuple allemand nous a donné quatre années et alors ils nous jugeront ».
Rejetant les vues fumeuses et impraticables de certains activistes de son parti, Hitler se tourna vers des hommes aux capacités et compétences reconnues. Il fit notamment appel à Hjalmar Schacht, un éminent banquier et financier aux états de services impressionnants tant dans le privé que dans le public. Même si Schacht n’était certainement pas un national-socialiste, Hitler le nomma président de la banque centrale allemande, la Reichsbank puis ministre de l’économie.
Le Professeur John Garraty, un éminent historien américain, relate qu’après la prise de pouvoir, Hitler et son nouveau gouvernement ont « immédiatement lancé un assaut tous azimuts contre le chômage… Ils ont stimulé l’industrie privée par des subventions et des abattements fiscaux, encouragé la consommation par des moyens tels que les prêts pour mariage, et se sont jetés à corps perdu dans un programme massif de travaux publics dont sont sortis l’autobahn [réseau autoroutier], des logements, des voies de chemins de fer et des projets de navigation. »
Les leaders du nouveau régime ont également réussi à persuader les Allemands jusque-là sceptiques voire hostiles de leur sincérité, de leur détermination et de leurs compétences. Ceci a renforcé la confiance, ce qui, à son tour, a encouragé les hommes d’affaires à embaucher et investir et les consommateurs à dépenser avec un œil confiant vers le futur.
Comme il l’avait promis, Hitler et son gouvernement national-socialiste ont fait disparaître le chômage en quatre ans. Le nombre de sans-emploi est passé de six millions au début de 1933, au moment de son accession au pouvoir, à un million en 1936.