D’un côté, un pays à feu et à sang et un peuple qui manifeste contre un Président honni. De l’autre, une minorité de grévistes et de casseurs qui bloquent le pays. Voilà en substance le traitement médiatique de l’actualité au Venezuela et en France. Une misère journalistique qui a atteint son paroxysme.
Depuis quelques semaines, le Venezuela fait de nouveau la Une de l’actualité internationale. Crise économique et politique, effondrement de l’État, pénuries, crise humanitaire… À entendre certains médias, le pays serait en train de vivre une situation apocalyptique. Alors il ne s’agit pas ici de minimiser la crise profonde que traverse le Venezuela notamment sur le plan économique mais de rétablir certaines vérités et de démasquer certaines manipulations parfois grossières.
Le 18 mai dernier, le JT de 20 heures de France 2 a diffusé un court reportage sur le Venezuela intitulé : « Venezuela : tension extrême entre l’opposition et les forces de l’ordre ». Autant vous dire tout de suite que ce sujet n’a fait qu’accentuer la vision caricaturale largement véhiculée dans les médias selon laquelle l’État vénézuélien deviendrait de plus en plus autoritaire et réprimerait à tout-va toute opposition.
Le reportage filme d’abord une foule de manifestants pacifiques rassemblés sur une place de Caracas criant des slogans anti-Maduro. On y voit ensuite un jeune homme se dresser face à un cordon de policiers. La journaliste affirme alors : « Des milliers d’opposants réclament le départ du président Maduro et font face à des forces de l’ordre déployées en nombre bien décidées à les empêcher de défiler » avant d’ajouter « blessés, certains manifestants n’iront pas plus loin » en montrant l’image d’un homme saignant abondamment de la tête. Un téléspectateur lambda qui voit ces images et écoute ce genre de commentaires sera presque automatiquement amené à penser que le Venezuela est en effet un État « autoritaire » où le droit de manifestation est bafoué et où le peuple est réprimé. Mais est-ce vraiment la réalité ? Pas vraiment.
En effet, cette image presque romantique d’un peuple assoiffé de liberté et de démocratie face à des forces de l’ordre féroces relève ici d’une conception assez biaisée de la situation. Car, comme en 2014 lors des manifestations des fameux guarimbas qui ont causé la mort de 43 personnes, une partie des manifestants qui descendent aujourd’hui dans les rues ne cherchent qu’à déstabiliser le pouvoir et à créer le chaos. Ils vandalisent, pillent les magasins et s’en prennent violemment aux policiers et pourtant ils continuent à être encensés par la majorité des médias occidentaux.
Mais au fait, pourquoi les gens manifestent-ils ? La journaliste nous apprend à propos que les Vénézuéliens sont « laminés par la crise, les pénuries alimentaires, la corruption » avant de donner la parole à…un opposant bien sûr : « On en a assez de la corruption, on en assez des files d’attente pour se nourrir, tous les jours ils nous enfument avec leur prétendue guerre économique. La seule guerre qui existe c’est celle que le gouvernement mène contre nous ».
Il est vrai que le gouvernement bolivarien a commis de nombreuses erreurs ces dernières années et que la corruption reste un fléau au Venezuela. Pour autant, pointer seulement du doigt les échecs du gouvernement ne suffit pas à comprendre la réalité économique. La nation sud-américaine fait face en effet depuis des années à une terrible guerre économique menée par les secteurs oligarchiques du pays qui s’est particulièrement intensifiée depuis la mort d’Hugo Chavez en 2013. Cette croisade contre la Révolution Bolivarienne, largement comparable à celle dirigée contre Salvador Allende dans les années 1970, est à l’origine des graves pénuries et désapprovisionnement qui frappent le Venezuela.