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Ces communistes qui quittent le PCF

Habituellement, ces départs-là se font sur la pointe des pieds. Pour une fois, ils ont décidé de quitter le PCF, « collectivement » et par un grand claquement de porte. A une semaine du 35e congrès prévu du 18 au 20 juin, ils sont 200 « communistes unitaires », lassés de batailler depuis des années avec la direction, qui ont décidé de rendre leur carte.

« La fin d’une époque, d’un monde communiste », dit sans nostalgie, Gilles Alfonsi, un des animateurs des Communistes unitaires. « Cela fait vingt-six ans qu’on essaie de changer le parti de l’intérieur : il y a eu des avancées et tout de suite après, des replis sur soi, rappelle le député de Seine-Saint-Denis, Patrick Braouezec, figure des refondateurs. C’est un constat d’échec, mais aussi une perspective d’avenir. »

« Incapacité à changer son fonctionnement, à produire des idées » selon Alfonsi, « entêtement du PCF à parler à la place des gens » explique Pierre Zarka, autre unitaire. Structure recroquevillée, déconnectée des réalités, un « poids dans l’espace public marginal » : ils ont longtemps cru pouvoir faire sauter ces verrous. « Aujourd’hui, ce mouvement n’est plus possible de l’intérieur », tranche Roger Martelli, l’historien communiste et refondateur, lançant un « cri d’alarme » à toute la gauche radicale.

La création, fin 2008, du Front de gauche avec le Parti de gauche de Jean-Luc Mélenchon et Gauche unitaire (ex-NPA) de Christian Picquet, n’a pas suffi à les convaincre de rester. La veille, la numéro 1 communiste, Marie-Georges Buffet, et ses partenaires se sont rencontrés, trois mois après les régionales, pour réactiver le Front de gauche : ils ont proposé la mise sur pied d’un « comité de liaison du programme partagé » et la possibilité de rejoindre directement le Front de gauche sans adhérer à l’une des formations qui le composent.

« Le Front de gauche a un avenir à condition que ce ne soit pas un tête-à-tête, il faut une autre composante qui soit citoyenne », estime Bernard Calabuig, aussi « démissionnaire ». « Ce ne sont que deux appareils réunis entre eux », juge Braouezec tandis que la députée des Hauts-de-Seine Jacqueline Fraysse déplore que « le PCF [ait] créé un Front de gauche petit bras ».

Mais partir pour aller où ? « On ne quitte pas le PCF pour prendre une retraite mais pour investir d’autres espaces », promet Calabuig. Le texte cosigné par ces 200 élus et anciens membres du conseil national du PCF qui se disent « toujours communistes », s’intitule d’ailleurs « Nouveau départ ». La suite de l’aventure est un flou assumé : « On est des chercheurs de formes nouvelles, on défriche », décrit Jacqueline Fraysse.

Les discussions devraient continuer avec l’aile gauche du PS, Europe Ecologie, le Parti de gauche, et espèrent-ils, avec le PCF et le NPA. Mais pas question de resigner pour un parti dont tous considèrent la « forme dépassée ». Nombre de démissionnaires vont rejoindre la Fédération pour une alternative sociale et écologique (Fase), association dont les rénovateurs sont déjà membres aux côtés de Clémentine Autain et les Alternatifs, et comptent lancer des « Etats généraux de la transformation sociale et écologique ».

Quant au congrès du week-end prochain, ils n’en attendent rien. La direction, qui avait lancé un appel pour persuader ses membres sur le départ de rester, pleure « des larmes de crocodile, mais au bout du compte, elle se dit que c’est bien que ces emmerdeurs aient débarrassé le terrain », lâche Martelli.