Canal Plus, sous l’ère Bolloré, a dégagé ses stars trop payées et ses émissions horriblement chères (120 000 euros par jour pour Le Grand Journal de Denisot) mais a conservé son humour ricanant. En vérité, « l’humour Canal » a toujours été majoritairement parodique : il ne s’exerce que sur du matériau existant considéré comme ringard. C’est le ressort principal de l’humour parodique. Les Nuls en étaient l’expression la plus aboutie.
On a donc vu apparaître une pastille nommée Broute, qui est la parodie de Brut, la plateforme de vidéos sur les réseaux sociaux de l’ancien producteur du Grand Journal, Le Van Kim. Ça sent la petite vengeance mais dans le domaine de l’humour, tous les coups sont permis, Gad Elmaleh en est la preuve. On pique, repique, parodie et re-parodie tout ce qui traîne.
Voici ce que donne un épisode de Broute, qui se moque de l’humanisme bienveillant de Brut (c’est vrai que Brut est ultra bien-pensant) :
Broute Now : des T-shirts humanistes et responsables.
Rdv sur : https://t.co/fkv8OT8aHC pic.twitter.com/XF9RQTHeN5— Bertrand Usclat (@BertrandUsclat) March 18, 2021
Et la version pour les handicapés de Twitter :
Ce sketch a beaucoup plu à Claude Askolovitch, qui l’a retweeté en le commentant d’un simple « génie ». Mais Broute, c’est aussi ça, une charge contre les prétendus complotistes :
Et là, on comprend que l’humour Canal, c’est une autorisation de ricanement, mais jusqu’à une certaine limite, celle établie par les autorités du pouvoir profond. À deux ou trois exceptions près, sur Canal, que ce soit aux Guignols de Gaccio ou au Groland de Moustic, on n’a jamais franchi la ligne rouge.
On réalisait un sketch sur la première dame qui se caresse avec son sac de luxe, mais jamais on aurait touché à la sacro-sainte Autorité, la Haute, la vraie, pas celle du CSA, cette farce fantôme qui coûte quand même près de 40 millions d’euros par an aux Français. De gros, de très gros salaires pour des fonctionnaires toujours en déplacement, aux abonnés absents, qui pondent des rapports que personne ne lit...
Puisqu’on est dans le populisme antiparlementaire, on a retrouvé une coupure de presse du Figaro en date du 22 novembre 2012 qui expliquait que 16 % des 55 000 fonctionnaires européens gagnaient la bagatelle de 100 000 euros par an ! Suite à cette révélation (venue des perfides Britanniques), le président du Conseil Herman Van Rompuy sabrera « 500 millions dans l’enveloppe des frais d’administration » ! Soit 10 000 euros de frais en moins par an pour chaque euro-branleur... Heureusement, les lobbies des multinationales sont là pour re-remplir les fesses, pardon, les caisses.
Cessons cet humour Canard enchaîné et revenons à notre mouton, Broute, prompt à se foutre des ringards mais ne touchant pas aux princes de ce monde. Cet humour, au fond très bien-pensant, valide le Système : il n’en critique que la partie inoffensive.
On a l’air de critiquer l’esprit Canal mais dans la maison d’en face, dans Quotidien sur TMC, du groupe TF1, c’est pas mieux : on se moque aussi des prétendus complotistes, qu’on tente de ringardiser devant la caméra :
Ce journaliste n'est pas chômeur, loin s'en faut. https://t.co/SbndqeXC4c
— jean durand (@cortadot) March 16, 2021
Finalement, les humoristes qui ne sont pas au chômage ressemblent beaucoup aux journalistes qui ne sont pas au chômage...
L’animateur Canal, par Alain Soral :