La courte vidéo qui suit croise deux sujets dont nous vous reparlerons : les incendies en Australie, prochainement, et Aurélien Barrau, dans un avenir pas trop lointain.
Aurélien Barrau est un astrophysicien français, qui s’est récemment fait connaître par son implication dans le militantisme réchauffiste, option apocalypse cochée et recochée. La case a été parfaitement noircie. Il s’est fait connaître d’une partie du grand public par la publication dans Le Monde d’une courte tribune signée par deux cents personnalités, quelques scientifiques, mais surtout des acteurs, réalisateurs, metteurs en scène, chanteurs, musiciens, écrivains, bref la fine fleur de la conscience environnementale de notre temps (voir le texte et les signataires à la fin de cet article). Aurélien a pu obtenir le consentement de tous ces gens importants grâce à son amie Juliette Binoche. Car Aurélien, comme souvent les astrophysiciens, a la tête dans les étoiles et est un ami des arts.
Il s’exprime ici sur les incendies en Australie, qui donnent lieu ces dernières semaines à la plus formidable surenchère sur le front du réchauffement depuis que celui-ci a été ouvert. Le monde est en feu, il suffit d’allumer son téléviseur pour s’en rendre compte. Mais comme, devant l’impensable, il est parfois difficile d’admettre le pire, Aurélien est là pour nous aider à entendre raison.
Que l’on soit d’accord avec lui ou pas, il faut reconnaître qu’Aurélien Barrau a une pensée claire et qu’il s’exprime bien, ce qui est agréable et nous change de Jean Jouzel, le « climatologue » GIECien des plateaux télé (en fait géochimiste spécialisé en glaciologie, mais le titre de climatologue confère une aura d’une intensité supérieure à notre époque). Le discours qui se veut rationnel est aidé par les images en arrière-plan, qui montrent un pauvre koala au milieu des flammes.
Il existe deux mantras fondamentaux dans le discours sur l’apocalypse thermo-carbonée :
Quand vous parlez d’un endroit que vous souhaitez placer sous les projecteurs, il est souvent bienvenu d’affirmer que le réchauffement y est pire que partout ailleurs. Beaucoup ont eu recours à ce procédé, en bien des points du globe. Il faut seulement prendre garde de ne pas le faire pour plusieurs en même temps, car les moins idiots de ceux qui vous écoutent pourraient comprendre que quelque chose cloche.
Le second est bien connu dans sa version en anglais : worse than we thought. C’est souvent pire que ce nous pensions, que ce à quoi nous pouvions nous attendre.
Aurélien Barrau a choisi cette option. Il nous explique que la situation que nous connaissons, celle à laquelle nous sommes arrivés, a été atteinte « beaucoup plus rapidement que ce qui avait été envisagé dans le pire des scénarios ». Le matraquage médiatique est tel qu’il est difficile de ne pas être d’accord si l’on a pas les moyens de s’informer plus sérieusement. La variable servant à mesurer l’évolution de la situation en matière de réchauffement étant bien sûr la température globale, confrontons, pour savoir ce qu’il en est, l’évolution de celle-ci et les projections des modèles, qui eux nous indiquent à quoi nous devrions nous attendre (s’ils disaient vrai !).
Le graphique ci-dessous nous montre les résultats de 102 modèles, en traits fins colorés, avec leur moyenne en noir, et la réalité mesurée via les satellites. Les données RSS, provenant d’une entreprise privée, ont longtemps été utilisées par les climatosceptiques pour montrer l’absence de réchauffement entre 1998 et le milieu des années 2010. Puis, sans que l’on sache bien pourquoi, des corrections ont été apportées, relançant la courbe à la hausse légèrement, la faisant diverger de celle de l’université d’Alabama à Huntsville (UAH), la référence en matière de mesure de la température globale par satellite (qui, rappelons-le, présente l’intérêt de s’affranchir des îlots de chaleur urbains et autres changements d’usage des terres, qui modifient localement la bonne mesure de la température).
L’année 2019, qui n’est pas reportée ici, remonte la courbe UAH à +0,44 °C par rapport à la moyenne 1981-2010. Le récent pic de température dû au phénomène ENSO (El Niño–Southern Oscillation) a connu un rebond pour la même raison. Cela n’empêche pas de constater la nette divergence sur si peu d’années. Le pire des scénarios (ici, le postulat, implicite et erroné, est qu’un réchauffement est une calamité) est d’un bon degré au-dessus de la réalité telle que nous la révèlent les données UAH. Mais pour Aurélien Barrau, le pire des scénarios est dépassé…
L’histogramme ci-dessous présente les résultats précédents, sous une autre forme : le rythme du réchauffement calculé sur la période 1979-2018 (le début des mesures par satellite date de 1979), en degrés Celsius par décennie, d’après les modèles et la réalité. Si la tendance actuelle devait se poursuivre, ce qui est loin d’être le plus probable en réalité, les résultats UAH nous conduiraient à moins d’un degré de plus que la période actuelle d’ici 2100 (environ 0,8 °C), alors que le pire des scénarios modélisés ferait monter le thermomètre de 2,5 °C.
Poutine a beau jeu d’applaudir, c’est un modèle russe qui présente le plus remarquable résultat.
Alors comment Aurélien Barrau peut-il affirmer de telles énormités [1] ? Il fait confiance à ses collègues, ceux qui ont de l’audience, pas seulement sur les plateaux télé, mais aussi dans les revues qui comptent et qui sont bien verrouillées, qui affirment des consensus maladroitement traficotés, mais conformes à ce que l’on peut voir grâce au filtre des médias. Car ne doutons pas qu’il est sincère. Rien ne permet d’affirmer le contraire et tout porte à le croire. Sa sensibilité l’aide aussi à aller dans ce sens, car il est touché par le discours qui l’influence et qu’il fait sien et contribue à porter.
Au final, Aurélien Barrau, qui est sans fards, ne cache rien et permet de comprendre le fin mot de l’histoire :
« La seule chose qui me rende un peu heureux dans cette situation, c’est que nous avons le devoir de tout réinventer. C’est assez excitant. Nous sommes en demeure de reconstruire la grammaire même de notre réel. Voilà la première mesure : penser hors de l’ordre de l’ancien monde. » (source : diacritik.com)
Aurélien est sincère, il souhaite un monde meilleur. La situation est telle qu’il faut tout reprendre à zéro, faire table rase du passé. Aurélien est révolutionnaire. De ces révolutionnaires sincères, qui finissent cocus, en servant des intérêts qui ne sont pas les siens. Et qu’il pense combattre.
La tribune d’Aurélien Barrau dans Le Monde du 3 septembre 2018 :