Georges Ibrahim Abdallah, né le 2 avril 1951 au Liban dans la ville d’Al Qoubaiyat, est un militant communiste libanais qui est devenu le plus ancien détenu d’Europe. Dans les années 1970, après avoir été blessé lors de l’invasion israélienne du Liban en 1978, il rejoint le Front Populaire de Libération de la Palestine (FPLP) avant de fonder sa propre organisation, les Fractions Armées Révolutionnaires Libanaises (FARL), un groupe marxiste pro-syrien et anti-israélien.
En 1984, il est arrêté à Lyon alors qu’il conduisait depuis la Suisse, initialement pour possession de faux passeports algériens et maltais. Une perquisition de sa cache parisienne permet de découvrir un arsenal comprenant des explosifs, des roquettes et des armes automatiques.
En 1987, il est condamné à la réclusion criminelle à perpétuité pour complicité dans l’assassinat de deux diplomates en 1982 : le lieutenant-colonel américain Charles Ray et le diplomate israélien Yaakov Bar-Simantov, ainsi que pour tentative d’assassinat du consul américain Robert Homme en 1984.
Le lieutenant-colonel Ray n’était pas un simple attaché militaire. Il était en réalité un officier distingué du renseignement militaire (« distinguished military intelligence officer »). Sa position d’attaché militaire adjoint servait de couverture diplomatique pour ses activités de renseignement, une pratique courante pendant la Guerre froide.
Concernant Bar-Simantov, les documents historiques révèlent qu’il était un officier traitant (« case officer ») du Mossad, bien que sa couverture officielle était celle de second secrétaire chargé des affaires politiques à l’ambassade d’Israël. Sa mission incluait officiellement la liaison avec l’Assemblée nationale française et le Sénat, ce qui lui permettait d’avoir accès à des cercles politiques importants.
Cette révélation sur leurs véritables fonctions apporte un éclairage différent sur ces assassinats, qui s’inscrivaient dans un contexte plus large d’affrontement entre services de renseignement et groupes armés au début des années 1980. Cependant, leur statut diplomatique, même utilisé comme couverture, leur garantissait une protection selon les conventions internationales, ce qui fait que leur assassinat reste considéré comme un acte terroriste selon le droit international.
Au bout de 25 ans, la justice française s’est enfin préoccupée de sauver l’honneur. Elle vient de prononcer la mise en liberté de Georges Ibrahim Abdallah condamné par une cour d’assises spéciale il y a 40 ans pour complicité d’assassinat. Militant communiste libanais, Abdallah… pic.twitter.com/SUalhZVB3v
— Régis de Castelnau (@R_DeCastelnau) November 15, 2024
En 1987, sort le livre confession de Jean-Paul Mazurier, son avocat, qui raconte comment et pourquoi il a trahi son client et a pris contact avec les services secrets français (DGSE). Cependant, la validité du procès ne sera pas remise en cause. Jacques Vergès sera ensuite son avocat, jusqu’à sa mort en 2013.
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Depuis 1999, Georges Ibrahim Abdallah est éligible à une libération conditionnelle, mais ses demandes ont été systématiquement rejetées, à l’exception d’une décision favorable en 2013 qui n’a pas été exécutée suite au refus du ministre de l’Intérieur Manuel Valls de signer l’ordre d’expulsion.
Le 15 novembre 2024, après 40 ans de détention, un tribunal français a ordonné sa libération conditionnelle à partir du 6 décembre, sous réserve qu’il quitte le territoire français. Le parquet national antiterroriste a toutefois annoncé faire appel de cette décision.
Âgé aujourd’hui de 73 ans, Abdallah n’a jamais exprimé de regrets pour ses actions, se considérant comme un « combattant » pour les droits palestiniens plutôt qu’un criminel. Son cas est devenu emblématique, soutenu par des groupes de défense des droits humains et des militants anti-impérialistes, tandis que les États-Unis et Israël, peu enclins au pardon – certains par tradition culturelle probablement – se sont constamment opposés à sa libération.