On a du mal à y croire tant c’est pitoyablement drôle mais nos amis anarcho-libertaires à l’aboiement antifasciste chronique ont enfin entrevu lumière sur leur couarde vérité. Encore trois millénaires et il n’est pas exclu qu’ils conçoivent courage et honnêteté plutôt que pleutrerie et soumission.
Alors, retour de joint ou réalité chimique d’une rencontre fortuite entre deux neurones orphelins affamés de survie ? Peu importe, c’est en tout cas avec la hardiesse du plus féroce Rantanplan que nos courageux héritiers de Kropotkine sont passés outre les querelles intestines sur le sujet pour affirmer, sur Facebook et sans trembler, leur statut de balances collabos.
Bravo les gars, respect total, fallait vraiment en avoir pour se mettre minables à ce point sans sourciller. Faire fi des derniers récalcitrants au déshonneur en son propre camp, ignorer les miroirs qui se fendent de honte et tapiner pour les maîtres des lieux, même en taule avec Émile Louis, Gunter le Fister et DSK, ça impressionne, on reste un larbin vivant et on gagne le galon au prix de litres de vaseline. Quant à nous, camarades il est heure de faire amende honorable : on ne sera jamais à la hauteur pour baisser notre froc d’aussi haut.
Le conglomérat du CV69, sorte de fourre-tout bordélique qui regroupe dans une non-organisation moult structures politiques, fameuses ou inconnues (la liste ici), a donc fait son coming-out pour révéler au grand jour son activité de délateur, espion de bas-étage, maître-chanteur et idiot utile du système nourricier. Comme il doit être agréable de se libérer d’un tel non-dit, d’avouer une pratique différente jusque là contrainte à des recoins obscurs et de montrer enfin à la face du monde le véritable kapo qui croupit en l’homme ! Frédéric Mitterrand lui-même nourrirait grande jalousie à la révélation d’un tel soulagement qu’aucune boîte de Smecta ne saurait endiguer solidement.
Mais trêve de lyrisme laxatif et d’ode à la bravoure du repenti, car le tout est argumenté et parfaitement réfléchi. Le caftage est élaboré en deux points répertoriés, qui associent technique de la Stasi et vices d’avoués. Morceau choisi :
« Oui, c’est vrai, nous collaborons avec la préfecture et les mairies de Lyon. Cette collaboration prend essentiellement deux aspects :
informatif : nous tâchons de regrouper le plus d’informations sur les militants d’extrême-droite à Lyon : photos, adresses, situation familiale et professionnelle. Nous partageons ces renseignements avec les autorités compétentes.
Juridique : la loi est un outil redoutable. Bien maniée, elle peut permettre de porter de rudes coups aux fascistes en exploitant les vides juridiques ou dépoussiérant des textes tombés en désuétude (normes de sécurité, etc.) »
Le post termine en une sorte de rhétorique d’emphase menaçante envers quiconque refuserait la dénonciation, même Pol Pot en serait choqué :
« Nous n’avons pas peur de nous salir les mains pour notre cause, n’en déplaise à certaines ! Nous invitons toutes les personnes soucieuses de lutter contre le fascisme à employer nos méthodes. N’hésitez pas à recueillir des informations sur les personnes suspectes : au travail, dans la rue et même en famille. Ensuite envoyez un courrier (vous n’êtes pas obligées de le signer) à votre commissariat d’arrondissement. »
- (Source)
Ah ! Quel courage chevaleresque ! On se croirait à Camelot et ça nous rappelle les heures les plus claires de notre histoire ! Qu’attendez-vous pour balancer vos connards de parents qui connaissent par cœur deux vers et demi de la Marseillaise, vos salauds d’amis qui passent toutes leurs vacances en France ou ce louche voisin qui n’achète jamais de voitures de marque étrangère ? Vite, vite les cafards, antifa is watching you* !
Ni Dieu ni Maître sont dans un bateau, tous les deux tombent à l’eau, qu’est-ce qui reste ?
Un gaucho collabo.
Ruben Azahar
* Détournement de la phrase célèbre du roman 1984, de George Orwell, « Big Brother is watching you », dont la traduction habituelle est : « Big Brother vous regarde. »