Le docteur Franken-Delors pensait avoir réussi à imposer une construction fédérale aux pays européens avec l’euro. Mais la fin (plus ou moins prochaine) de son enfant monétaire monstrueux pourrait bien emporter l’ensemble de son projet supranational avec lui…
Discorde dans la zone euro
D’une part, les plans européens de soutien aux créanciers des pays en délicatesse avec les marchés financiers lessivent les peuples concernés par d’incessants plans d’austérité (l’Italie, dernière en date, vient de décider de couper 26 milliards d’euros de dépenses). C’est ainsi que le PIB de la Grèce devrait à nouveau baisser de 7% cette année, le même chiffre qu’en 2011, signe de l’impasse complète de ces politiques d’austérité sauvage, que beaucoup dénoncent.
Mais de l’autre, ils ne plaisent guère non plus aux pays créanciers, où les plans de sauvetage de l’euro commencent à émouvoir les dirigeants politiques. La ministre des finances de la Finlande vient ainsi de déclarer que son pays « ne s’accorchera pas à l’euro à n’importe quel prix et est prête à tous les scénarios ». En clair, Helsinki indique être prête à quitter la monnaie unique plutôt que de prendre de nouveaux engagements financiers pour l’euro.
Une Allemagne de plus en plus hostile
La situation ne cesse de se dégrader en Allemagne, malgré la ligne dure d’Angela Merkel qui avait pourtant dit de manière bien peu diplomatique « non à la mutualisation des dettes de son vivant ». Les concessions minimes qu’elle a faites au sommet européen de la semaine dernière (qui doivent encore être traduites dans un traité) ont provoqué la colère d’une partie des députés de la CSU, qui ne veulent plus entendre parler de la moindre concession aux autres pays.
Et ce n’est pas tout. Le débat public allemand diffère largement du débat français. Pas moins de 150 économistes viennent de signer une tribune pour dénoncer l’irresponsabilité des politiques européennes de garantie aux banques ou de mutualisation des dettes sans contrôle sur les budgets. Enfin, à l’initiative d’intellectuels hostiles à l’euro, des recours ont été déposés auprès de la cour de Karlsruhe, poussant le président à repousser la ratification du MES.
Londres envisage une sortie de l’UE
Et alors qu’une partie du personnel politique des pays de la zone euro se posent ouvertement la question du maintien dans la monnaie unique, un pays va encore plus que tous les autres : la Grande-Bretagne. Il y a vingt ans, on disait que Londres regretterait tôt ou tard de ne pas avoir accepté de faire partie de l’UEM. Là encore, les partisans de Maastricht se sont trompés. Le débat qui a court outre-Manche porte carrément sur le maintien du Royaume Uni dans l’UE.
En effet, un tiers des députés conservateurs viennent de demander solennellement à David Cameron d’organiser un référendum sur le maintien du pays dans l’UE. Et le Premier Ministre semble s’ouvrir à l’idée pour contenir la progression de UKIP de Nigel Farage. L’issue d’un tel référendum est très incertaine car les médias britanniques sont vent debout contre les absurdités de cette Europe technocratique et antidémocratique, même si le marché unique est apprécié.
Bref, sachant la fragilité de l’édifice européen et le nombre grandissant de foyers de contestation, dans les pays « aidés » ou préteurs, le destin de l’Union Européenne semble déjà écrit. Cette construction artificielle va finir par s’effondrer, du fait de la monnaie unique. Reste à savoir quand.