En 2011, Le Point avait déjà évoqué cette possibilité en la taxant de « complotisme ».
« Un événement brutal, peut-être incompréhensible, mais surtout tragiquement idiot, estiment aujourd’hui les spécialistes d’Albert Camus, parmi lesquels la thèse de l’attentat ne recueille que scepticisme. L’écrivain et journaliste Olivier Todd, auteur d’Albert Camus, une vie, assure ainsi n’avoir rien trouvé, durant ses longues recherches, qui puisse l’étayer. "Du KGB (comme d’ailleurs de ses successeurs) absolument rien ne m’étonnerait, explique-t-il. Mais je ne comprends pas quel aurait pu être l’intérêt de tuer Camus. S’il avait fallu s’attaquer à un auteur, la priorité aurait été Koestler, Orwell ou Soljenitsyne..."
Alain Vircondelet, qui a publié Albert Camus, fils d’Alger, partage cet avis. La seule raison qui aurait pu conduire le KGB à supprimer le philosophe était, selon lui, son engagement sur l’avenir de l’Algérie, qui venait contrarier l’influence soviétique. Or, "dès 1958, il avait dit qu’il n’interviendrait plus sur cette question, souligne-t-il. Durant les deux dernières années de sa vie, il était dans une sorte de retraite à Lourmarin, et n’écrivait qu’à peine." "Que les Soviétiques aient eu envie d’en finir avec lui, c’est sûr, mais pas comme ça", ajoute le philosophe Michel Onfray, interrogé par l’Agence France-Presse et qui prépare également un essai sur le plus jeune Prix Nobel de l’histoire.
En saura-t-on un jour davantage sur l’homme mystérieux qui se confie à Zábrana ? Peu probable. Mais peut-être faut-il, quoi qu’il en soit, replacer les allégations du poète tchèque dans leur contexte. Car Jan Zábrana, exclu de l’université de Prague pour "inaptitude politique à l’étude", et dont la mère avait été condamnée à 18 ans de prison alors qu’il n’était qu’un adolescent, livra durant de longues années, dans son journal, son amertume et sa haine féroce du régime qui l’opprimait. Et dont il savait qu’il était parfaitement capable d’écraser les intellectuels. Camus compris. »
Le lauréat du Prix Nobel de littérature est, officiellement, décédé le 4 janvier 1960 dans un accident de voiture. Son conducteur et également célèbre éditeur, Michel Gallimard, a perdu le contrôle du véhicule et s’est écrasé contre un arbre.
Dans sa biographie en 1978, l’auteur Herbret Lottman émettait déjà des doutes sur les circonstances de l’accident. « Les experts ont été intrigués par le fait que cela se produise sur une longue route rectiligne, une route de 10 mètres de large et peu fréquentée à l’époque », a-t-il écrit.
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« Ils ont tricoté le pneu avec un outil qui l’a probablement percé lorsque la voiture roulait à grande vitesse »
Cet ordre aurait été donné par le ministre de l’Intérieur de l’Union soviétique, Dmitri Shepilov, à la suite de la publication d’un article écrit par Camus dans le journal français Franc-Tireur en 1957.
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À l’époque, Albert Camus s’était rallié au soulèvement hongrois et avait ouvertement critiqué les actions soviétiques. L’auteur français avait également apporté son soutien à l’auteur russe Boris Pasternak, considéré comme anti-soviétique.
Pour Giovanni Catelli, le « franc-parler » de l’auteur de L’Étranger risquait d’interférer dans les relations franco-soviétiques. Camus « se démarquait aux yeux du peuple français pour rappeler le cruel impérialisme de l’URSS. Les gouvernements français et soviétique auraient grandement profité du fait de faire taire ce rappel déplaisant. Aucune enquête appropriée n’a été menée », déclare-t-il.
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Le discours d’Albert Camus en 1957 lors de la réception de son prix Nobel