Nous avons relayé samedi dernier une vidéo du Parisien sur le travail d’un maraîcher qui cultive en région parisienne sans le moindre apport en eau de sa part. Une vidéo qui a suscité beaucoup de réactions, en partie positives, car le propos est conforme à la critique d’une agriculture devenue folle, industrielle, pleine d’intants, mais aussi négatives, car un peu trop caricaturale.
Voyons d’abord un droit de réponse d’un youtubeur-cultivateur, qui fait lui aussi pousser des légumes bio :
Le reportage du Parisien, c’est, comme en ont l’habitude les journalistes, probablement quelques heures sur place, de longs entretiens, pour au final trois minutes de reportage, dont quelques dizaines de secondes pendant lesquelles le maraîcher s’exprime. Peut-être son propos était-il un peu moins caricatural que ce que le montage en a fait.
Voyons maintenant un autre reportage, plus ancien, et moins orienté, qui ne tente pas de nous dire que lorsqu’il n’y a pas d’eau, eh bien il suffit de faire sans (et le secret pour sortir de la pauvreté, ça doit être d’avoir de l’argent…), mais se contente d’exposer le travail d’un maraîcher qui vit se son travail :
On en sait déjà un peu plus. En fait, le modèle économique est sans doute viable, grâce notamment à des dépenses réduites : pas de couverture du sol à gérer, pas d’apports en eau… Soit un manque à dépenser. Une vente directe aux consommateurs parisiens, donc une absence de manque à gagner à cause de la présence d’intermédiaires. Ce qui permet au cultivateur d’encaisser les années sans, grâce à des années avec qui sont très bénéfiques. On apprend ainsi qu’il ne réussit ses tomates qu’une année sur trois. Donc si cette année remarquablement sèche il peut montrer des tomates croissant sans arrosage, c’est, comme le fait remarquer le youtubeur, grâce à des précipitations de printemps et de début d’été (juin) favorables. Les longues racines de cette plantes lui permettant d’aller chercher l’eau qui reste encore en profondeur. Et si l’on voit le maraîcher planter des semis de salades, c’est sans doute parce que sa manière de faire et de gagner sa vie permet d’encaisser un probable échec, à moins que des pluies ne surviennent (ce qui n’a pas été le cas !). Une pratique culturale qui ne valide guère le propos de la vidéo du Parisien, qui voudrait nous faire croire qu’un plant de tomate peut croître dans une terre totalement sèche.
Ce qui peut énerver un autre maraîcher, qui ambitionne de nourrir la population avec des produit sains, c’est aussi ça : quand il explique à ses clients qu’il faut faire avec la nature et qu’en conséquence, quand il n’y a rien, eh bien il n’y a rien et il faut faire sans. Ce qu’il fait d’un point de vue économique, mais que celui qui doit s’alimenter ne peut accepter. Sauf à aller voir un autre producteur, qui lui fera autrement, que ce soit en bio, ou en « conventionnel ».
Le reportage n’était donc pas inintéressant, mais remarquablement partiel, et partial. Au final, le message est donc plutôt négatif pour l’agriculture biologique, laissant entendre que telle qu’elle ici pratiquée (avec un amalgame implicite avec l’ensemble de la bio), elle n’est pas à même de nourrir le monde, ce que lui reprochent tous les promoteurs de l’agriculture industrielle. Cela ressemble aussi à une promotion à peine déguisée pour la pénurie et le rationnement, qui caractérisent dorénavant le monde que les médias nous vendent.