Alors que les troupes de la Force internationale d’assistance à la sécurité (ISAF), déployée sous l’autorité de l’Otan, quitteront l’Afghanistan d’ici la fin de cette année, le mouvement taleb a lancé une importance offensive depuis quelques jours dans la province de Helmand, dans le sud du pays. Ce qui donne un aperçu de ce qui pourrait se passer dans les mois qui viennent…
Ainsi, selon les autorités afghanes, 800 insurgés ont lancé des assauts dans 4 districts situés au nord de cette province, dont Nowzad, Kajaki, Sangin, Musa Qala. Ces secteurs, plus particulièrement les deux derniers, ont beaucoup fait parler d’eux depuis 2005.
Le district de Sangin, placé sous la responsabilité de la British Army jusqu’en juillet 2010, avait été qualifié de région la « plus dangeureuse du monde ». « Vous ne pouvez aller nulle part sans avoir un détecteur de métal devant vous », confiait, à cette époque un officier des Royal Marines au quotidien The Telegraph. Le contingent britannique y avait lors subi le tiers de ses pertes en Afghanistan.
Cette fois, les taliban n’ont plus à s’opposer aux troupes de l’Otan mais à l’armée nationale afghane, placée en première ligne depuis 2013. Préalablement à leur offensive, ils auraient placé des engins explosifs improvisés sur les routes et aux abords de plusieurs villages pour empêcher, ou du moins gêner la progression des forces de sécurité locales.
Toutefois, les autorités afghanes assurent que les forces de sécurité, qui ne disposent pas d’appui aérien, n’ont déploré aucune « perte importante de territoire ». Toujours selon elles, les talibans auraient subi de lourdes pertes, avec plus de 100 tués, tandis que l’armée afghane compterait 21 morts et au moins 40 blessés dans ses rangs. Ce bilan n’a pas pu être confirmé par une source indépendante. Le porte-parole du gouverneur de la province de Helmand a quant à lui indiqué que les combats avaient provoqué l’exode de 2 000 familles (entre 10 000 et 20 000 personnes).
Le ministère afghan de la Défense a fait valoir que les insurgés, qui compteraient parmi eux des combattants étrangers, « ont rencontré une vive résistance de la part de l’armée nationale afghane positionnée dans ces districts, et n’ont pu atteindre leurs objectifs ».
Le porte-parole du ministère de la Défense, Mohammad Zaher Azimi, a expliqué que les talibans ont pu lancer leur offensive parce que l’armée afghane « n’a pas la couverture aérienne que l’Otan pouvait lui fournir par le passé », ce qui leur a permis de « se déplacer librement dans certains endroits et de se mobiliser pour de grandes attaques ». Toutefois, il a ajouté que « si les talibans pensent qu’ils peuvent battre les forces afghanes, lorsque les forces de l’Otan ne sont plus là, nous leur montrerons qu’ils se trompent ».
Les talibans ont lancé leur traditionnelle offensive de printemps – appelée cette année « opération Khaïbar » – au début du mois de mai, entre les deux tours de l’élection présidentielle afghane. L’issue de cette dernière pourrait faire avancer l’accord bilatéral de sécurité conclu entre Kaboul et Washington en novembre 2013 mais que le président Karzaï a jusqu’à présent refusé de ratifier. Il permettrait le maintien d’environ 10 000 soldats américains sur le territoire afghan jusqu’en 2016 et le lancement de la mission de soutien « Resolute Support », planifiée par l’Otan au profit des forces afghanes.
En 2013, selon l’Institut d’études International Crisis Group (ICG), basé à Bruxelles, les insurgés ont infligé aux forces de sécurité afghanes autant de pertes qu’ils n’en ont eux-même subies. « Il y a des craintes que la balance puisse pencher en faveur de l’insurrection, en particulier dans certaines zones rurales, à mesure que les troupes étrangères se retirent », a-t-il estimé dans un rapport publié en mai.
À noter que cette offensive a lieu alors que l’armée pakistanaise a lancé une vaste opération dans la zone tribale du Nord-Waziristan. Ce bastion de diverses organisations jihadistes proches d’al-Qaïda et du réseau Haqqani, membre du mouvement taleb afghan, jouxte les provinces afghanes de Paktya et de Paktika.