Pour son premier interrogatoire face aux juges, Alexandre Djouhri aura fait en sorte que ses réponses – « C’est faux », « Je l’ai appris par la presse », « Des mensonges » – ne permettent en rien d’assembler les pièces du « puzzle » que constitue sa vie. Détenu à Fresnes depuis fin janvier et son extradition en provenance de Londres, l’homme d’affaires, considéré par les enquêteurs comme la clé de l’énigme libyenne, passé par les réseaux de Jacques Chirac, Dominique de Villepin et Nicolas Sarkozy, a enfin été entendu par la justice.
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Ce premier interrogatoire, qui s’est tenu dans la plus grande discrétion le 19 février dernier devant Aude Buresi et Marc Sommerer, a surtout été l’occasion pour les juges et Alexandre Djouhri de mesurer le rapport de force. Ce dernier réfutant la moindre assertion des magistrats – même devant l’évidence –, refusant de donner des indications sur son patrimoine ou l’état de ses affaires, et se permettant quelques sorties dont il a le secret : « Je sais qu’un complot médiatico-politico-judiciaire s’est mis en œuvre et je ne veux pas y participer. J’ai à faire à la face obscure de la justice », a-t-il expliqué.
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Un patrimoine très opaque
Alexandre Djouhri n’a pas davantage voulu s’expliquer sur son patrimoine qui, selon des documents bancaires d’UBS aux mains des juges, représentait 50 millions d’euros en 2006. « C’est faux, ils ont menti. » Et l’intermédiaire de jurer ne pas avoir le nez sur sa fortune :
« Je ne sais pas, franchement. Je ne m’occupe de rien […] Peut-être maximum un million d’euros […] Quand j’ai besoin d’argent, j’appelle des amis qui me donnent de l’argent. Ils s’en foutent. C’est une autre culture. » L’argent ? « Je marche dessus, répond-il aux magistrats. Ce n’est pas important. Ça n’a jamais été ma motivation. »
L’homme d’affaires reste également sans explication plausible sur ces 465 000 euros de diamants acquis en 2011, et qui semblent avoir disparu : « J’ai dû en faire cadeau. Vous me demandez à qui ? C’est vieux. C’est ma vie privée quand même ! » Et les juges de se moquer gentiment de lui : « [Les cadeaux], c’est une tradition bédouine ? » « C’est une tradition universelle », rétorque Djouhri, qui s’est opposé, le 20 janvier dernier, à ce que UBS transmette ses relevés bancaires à la justice française : « Ce n’est pas moi qui décide, c’est mon avocat suisse. »
Guéant ? « On s’appelait pour se raconter des bêtises »
L’homme est brièvement revenu sur ses amitiés politiques :
« J’aime bien que les gens s’entendent. J’aime bien que Nicolas Sarkozy s’entende bien avec Dominique de Villepin. Ce sont deux hommes d’État, deux vrais patriotes qui agissent pour le bien de notre pays. »
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Un complot politique visant à anéantir Nicolas Sarkozy
Mais c’est lorsqu’il dépeint un complot politique visant à anéantir Nicolas Sarkozy que l’homme d’affaires se fait le plus prolixe. Selon lui,
« il y a un monsieur qui s’appelle Ziad Takieddine qui essaye de faire perdre Nicolas Sarkozy dans sa campagne de 2012. Il fallait coûte que coûte l’abattre avec un pseudo financement qui serait venu de Libye. Ensuite on fabrique un PNF [Parquet national financier, NDLR] en 2014 qui devient juste le glaive de la justice, et non plus le glaive et la balance. Le PNF est créé pour détruire la droite ».
Alors que les magistrats lui font remarquer que le PNF a été créé à la suite de l’affaire Cahuzac, un ministre de gauche, Djouhri répond qu’il s’agit d’un
« subterfuge. Vous savez très bien que c’est M. Bauer avec Valls et Hollande qui ont orchestré tout cela. Le PNF a été créé dans le but de détenir un pouvoir coercitif sur tous ceux qui ne pensent pas comme eux. C’est l’exécutif qui commande […] Après la création du PNF, tout s’accélère. Il n’y a que les hommes politiques de droite qui se retrouvent poursuivis [une affirmation fausse, NDLR]. Ceux de gauche n’avaient plus d’idées, le Parti socialiste est mort. »
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« Alexandre Djouhri est un personnage totalement romanesque »