Le comportement de Denis Baupin est évidemment immonde. Il illustre les dérives que l’hyper-professionnalisation de la politique permet. Beaucoup de nos dirigeants se considèrent comme au-dessus des lois et protégés par une impunité pénale à presque toute épreuve. Leur sédimentation dans le microcosme politico-médiatique les coupe de notre réalité ordinaire, dont le premier principe est celui de la responsabilité à assumer dans les actes délictueux.
Baupin victime d’un règlement de comptes
Dans l’affaire Baupin, il est évident que le bonhomme est plus sanctionné pour avoir imaginé que sa misérable petite personne, devenue vice-présidente de l’Assemblée Nationale, pouvait exister et prospérer en dehors du système particratique qui l’a fabriquée, que pour ses agissements sexuels proprement dits. Tant qu’il restait dans la coquille protectrice du parti sous la bannière duquel il a fait carrière et dont il retirait des émoluments confortables, rien ne pouvait lui arriver. Il a suffi que sa femme devienne ministre en quittant son poste, au prix d’un superbe reniement, et que lui quitte les rangs de son parti, pour que tous ses anciens amis s’en donnent à cœur joie sur les horreurs qu’on lui prête, sans plus aucun bénéfice de la présomption d’innocence :
Le message est clair : tant que tu sers le système qui t’a fait élire (même chez les Verts, c’est comme ça !), tu es protégé. Dès que tu t’en affranchis, tu plonges !
Baupin et le rêve d’émasculation de la politique
On s’amusera particulièrement de voir qui, aujourd’hui, se précipite sur les plateaux de télévision, pour jeter la pierre à Denis. Les traditionnelles harpies de la politicaillerie française ont enfin trouvé une proie idéale à dépecer façon Empire des Sens. Personne n’est dupe : le prétexte moral ne peut pas dissimuler un instant le geste quasi-primitif d’émasculation, de moralisation dans ce qu’elle a de plus rigide, de plus frustrant, de plus castrateur, qui anime ces saintes nitouches cathodiques. C’est une véritable fête féministe qui se livre sous nos yeux, avec un sacrifice testiculaire en guise de moment expiatoire.
Les grandes prêtresses de cette célébration festive sont sans surprise : Clémentine Autain, Caroline de Haas, Esther Benbassa. Les unes et les autres jubilent de pouvoir prendre la main dans le sac, ou au panier, l’un de ces horribles délinquants sexuels coupable d’utiliser le pouvoir que la République lui donne pour affirmer le pouvoir libidinal que la nature lui a donné.
Et vas-y que je commence la longue litanie des antiennes où la culpabilité principielle de l’espèce masculine appelle d’interminables gémissements.
La morale des connivents plutôt que la justice
Au passage, aucune de ces dénonciatrices du mal absolu sur terre ne se souvient qu’elle savait, mais qu’elle n’a pas eu le cran de saisir la justice. Toutes ces pleureuses qui inondent nos écrans ont beau jeu de se livrer aux imprécations aujourd’hui. Lorsque Baupin était protégé par son parti, pas une ne s’est levée pour dénoncer les scandales et informer un procureur sur les agissements du vice-président de l’Assemblée Nationale.
Les raisons de ce silence sont bien connues : la peur de déplaire et de laisser des plumes. La peur de perdre son poste. La peur d’affronter la loi du système qui assure l’impunité des puissants et rejette à ses marges tous ceux qui conteste l’ordre aristocratique français. Clémentine Autain répète à qui veut l’entendre : « Tout le monde savait ». Et elle prend bien soin d’agiter qu’elle est une femme tellement importante qu’elle tenait ses informations des confidences même de la députée Attard. Mais qu’a-t-elle fait lorsqu’elle l’a appris ?
Comme les autres, pour ne pas apparaître comme la vilaine petite cane qui refuse les règles du jeu, elle s’est tue.