La sensation de chaleur, soudaine et insupportable, semble venir de nulle part : à 750 mètres, une antenne sur le toit d’un camion vient d’émettre un puissant rayon électromagnétique qui ne tue pas, ni ne blesse, et fait la fierté des chercheurs de l’armée américaine.
« On ne le voit pas, on ne l’entend pas, on ne le sent pas, on le ressent », résume le colonel Tracy Taffola, patron du directorat des armes non-létales, unité basée à Quantico (Virginie) et chargée de mettre au point de nouveaux armements conçus pour éviter de tuer ou de provoquer des blessures graves.
L’effet est tellement désagréable que le réflexe est de prendre la fuite, a pu constater l’AFP lors d’une démonstration de l’arme pour la presse.
L’armée américaine se veut rassurante sur le caractère « propre » de cette arme, mise au point après plus de 15 ans de recherche mais qui n’a toujours pas été utilisée sur le terrain.
Brièvement déployé en Afghanistan en 2010, ce système, baptisé « Active Denial System » (ADS), n’y a pas été employée, vraisemblablement en raison de la mauvaise image attachée à ces rayons électromagnétiques, vu comme des micro-ondes utilisées dans les fours à chauffer la nourriture.
« Il y a beaucoup d’idées fausses », déplore l’officier au strict maintien de Marine de l’armée américaine. « Nous voulons que tout le monde comprenne en quoi consiste ce système et - tout aussi important - ce qu’il n’est pas ».
Les chercheurs du laboratoire de recherche de l’U.S Air Force se trouvant avec lui l’assurent : le risque de blessure est quasi-nul avec seulement deux brûlures constatées pour 11 000 tests menés avec des humains.
« La fréquence des ondes émises par un four à micro-ondes est d’environ un gigahertz. Elles pénètrent et c’est pourquoi on peut cuire son poulet », explique le Dr Diana Loree, scientifique en chef adjointe chargée des armes à effet dirigé.
Avec une fréquence de 95 gigahertz, l’ADS émet des ondes millimétriques, qui peuvent être dirigées et qui n’ont pas de pouvoir pénétrant.
« J’ai un émetteur 100 fois plus puissant qu’un four micro-ondes mais je ne peux pas faire sauter du pop-corn parce que la fréquence radio ne pénètre pas suffisamment pour cuire à l’intérieur », résume-t-elle enthousiaste.
Selon Stephanie Miller, chargée de l’évaluation de l’effet de l’arme sur le corps humain, les ondes millimétriques « ne pénètrent la peau que sur 0,4 millimètre » de profondeur, évitant ainsi toute brûlure.
Dans la cabine de son camion militaire, l’opérateur actionne une manette et cible une personne ou un groupe à l’aide d’une caméra. La victime a la sensation d’ouvrir la porte d’un four brûlant et ressent brièvement des picotements sur la peau.
Le réflexe de fermer les paupières suffit à protéger les yeux, assure aussi Mme Miller.
L’arme est conçue pour contrôler une foule hostile, protéger l’entrée de bases ou mettre en fuite des personnes dont on ne connaît pas les intentions et donc contre lesquelles l’emploi d’une arme à feu pourrait constituer une bavure.
Si l’ADS ne provoque aucun effet secondaire, tout au moins en théorie, la durée d’exposition à ce rayonnement pourrait avoir d’autres conséquences.
Ainsi pour éviter tout accident, « si l’opérateur appuie trop longtemps par inadvertance sur la gâchette, le système se coupe automatiquement après trois secondes », assure le colonel Taffola.
Selon lui, « c’est l’arme non létale la plus sûre qui ait jamais été mise au point ».
Le Pentagone quant à lui ne s’est toujours pas décidé à passer commande.