Le gouvernement grec et les créanciers ont signé un mémorandum sur un troisième plan d’aide d’un montant de 85 milliards d’euros. L’aile radicale de Syriza, le parti du premier ministre Alexis Tsipras, gronde.
Athènes et ses créanciers ont conclu mardi, après trois jours de tractations, un accord sur un nouveau plan d’aide à la Grèce. « C’est un troisième mémorandum ! » Kostas Issychos, ex-ministre délégué à la Défense, ne parvient pas à cacher son mécontentement quand il évoque l’accord. Cette figure de Syriza ne votera pas ce troisième plan d’aide à la Grèce, bien qu’il assure au pays « un financement d’environ 85 milliards » d’euros sur trois ans, selon le gouvernement. Les 15 et 22 juillet déjà, il avait voté contre les lois passées en urgence au parlement, sur injonction des créanciers. Avant d’être démissionné lors du remaniement qui s’ensuivit. Jeudi prochain, l’accord d’hier sera soumis aux députés à la Vouli. Il devrait de nouveau marquer son opposition.
« Ce document en deux parties comprend d’une part des mesures néolibérales extrêmes, de l’autre tous les éléments d’un néocolonialisme qui s’abat sur la Grèce », précise Kostas Issychos, en citant pour preuve « la privatisation de la richesse nationale et l’exploitation des réserves du pays ». Souveraineté entachée, privatisations multipliées, empreintes néolibérales : l’accord pourra-t-il être accepté par les cadres et députés de Syriza ? Il fait grincer des dents. « C’est le résultat d’un chantage des créanciers. L’Union européenne a fait preuve d’un nouveau despotisme en exerçant des attaques sans précédent sur la démocratie et la souveraineté de la Grèce », analyse Yannis Albanis. Pour ce membre du Comité central, de l’aide gauche du parti, « ce troisième mémorandum ne peut pas devenir le programme d’un gouvernement de gauche ni l’horizon politique de Syriza ». « C’est un mauvais accord : je voterai contre ! Nous ne pouvons pas être un parti qui soutient un gouvernement appliquant l’austérité ! » renchérit la députée Ioanna Gaitani, du courant trotskiste de Syriza.
Côté gouvernemental, la consigne donnée est visiblement celle du plus grand silence. Mais on veut croire que « les députés qui voteront contre ne seront pas plus nombreux que lors des votes précédents ». Ils étaient un peu plus de 35, les 15 et 22 juillet, à s’exprimer contre les « lois de préconditions » pour l’ouverture des négociations.
Tout n’est donc pas rose pour le premier ministre Alexis Tsipras et son équipe. Parmi les opposants dans les rangs de son propre parti se trouvent en effet des personnalités importantes tant par leur rang institutionnel que par leur notoriété : Zoé Konstantopoulou, la présidente de la Vouli, Yanis Varoufakis, l’ex-ministre des Finances, Manolis Glezos, résistant aux nazis et aux colonels, ou encore Sofia Sakorafa, une des premières députées du Pasok à avoir quitté les rangs de son parti d’origine, et à voter contre tous les mémorandums depuis 2010. Ces députés sont aussi les mieux élus, dans la circonscription d’Athènes pour Zoé Konstantopoulou et même du pays pour Yanis Varoufakis, sur les listes nationales pour Manolis Glezos et Sofia Sakorafa. Autant d’indicateurs inquiétants pour Syriza et le gouvernement.
« Nous sommes en contradiction avec notre mandat électoral et l’agenda social que nous avions fixé », souligne Kostas Issychos. Comme si une scission se préparait. « Ça viendra », pressent Ioanna Gaitani. « Nous devons conserver l’unité du parti. Notre nouvelle stratégie doit tenir compte de la situation en Europe et de l’expérience de sept mois de négociations », souligne Yannis Albanis. Le service de presse de Syriza, lui, indique que « le secrétariat politique n’a pas encore émis son avis sur le nouvel accord ». Le seul point sur lequel tous sont unanimes : « Il faut un congrès au plus vite. » À moins qu’Alexis Tsipras prenne de nouveau tout le monde de court en provoquant au plus vite… des élections.