Alors que doivent se réunir [le 17 mars 2016] les vingt-huit membres de l’Union européenne à Bruxelles, avec la Turquie, afin de finaliser l’accord censé résoudre la crise migratoire, le journaliste turc Can Dündar, récemment emprisonné par le pouvoir turc, déplore dans une tribune publiée dans Le Monde, que l’Europe, fragilisée, cède au « chantage » de la Turquie où les droits de l’homme ne cessent de reculer.
Le recul des droits de l’Homme en Turquie, Can Dündar en a été l’une des victimes les plus emblématiques. Pour avoir publié des informations, en mai 2015, sur une livraison d’armes opérée par les services de renseignement turcs en Syrie, ce journaliste de 54 ans, directeur en chef du quotidien laïc Cumhuriyet, a été arrêté en novembre dernier et jeté en prison, après une plainte déposée par le propre président turc, Recep Erdogan, auprès du Parquet d’Ankara.
Inculpé pour « espionnage » et « divulgation de secret d’État », il a passé plus de trois longs mois derrière les barreaux, en détention provisoire, avant que la Cour constitutionnelle ne le remette en liberté au début du mois de mars. S’il prend aujourd’hui la plume, dans l’attente de son jugement – il risque la prison à vie – c’est pour dénoncer le « marchandage » voire le « chantage » exercé par le président turc Erdogan envers une Europe fragilisée par la crise des migrants, dans une tribune publiée jeudi 17 mars par Le Monde. Les vingt-huit membres de l’Union Européenne doivent en effet se réunir à Bruxelles, avec la Turquie, afin de finaliser l’accord censé résoudre la crise migratoire.
Ainsi l’Europe, emmenée par la chancelière Angela Merkel, et la Turquie, s’apprêtent-elles à mettre en place un système de « réadmission » sur le sol turc des futurs réfugiés syriens débarqués en Grèce. Pour chaque Syrien renvoyé en Turquie, un Syrien en provenance de Turquie serait réinstallé en Europe. À ce « un pour un » d’ores et déjà très critiqué, en raison notamment du fait que l’Allemagne a écarté des négociations ses partenaires, l’Europe débloquerait non plus une enveloppe de trois milliards d’euros mais six milliards d’euros d’aide, et libéraliserait la procédure d’obtention de visa pour les ressortissants turcs.