Egalité et Réconciliation
https://www.egaliteetreconciliation.fr/
 

À l’ONU, l’incapacité US d’admettre la réalité

Alors que les présidents Poutine et Trump avancent sur la question syrienne, les hauts fonctionnaires d’origine US à l’ONU ont entamé un bras de fer avec la Russie. Refusant d’enquêter sur un crime qu’ils ont déjà jugé a priori, ils ont provoqué non pas un, mais quatre vétos au Conseil de sécurité. Pour Thierry Meyssan, le comportement schizophrénique des États-Unis sur la scène internationale atteste à la fois de la division de l’administration Trump et du déclin de l’impérialisme US.

 

 

Décidément peu de choses ont changé depuis le 11 septembre 2001. Les États-Unis persistent à manipuler l’opinion publique internationale et les outils des Nations unies, certes pour des raisons différentes, mais toujours avec le même mépris de la vérité.

En 2001, les représentants des États-Unis et du Royaume-Uni, John Negroponte et Stewart Eldon, assuraient que leurs deux pays venaient d’attaquer l’Afghanistan en légitime défense après les attentats commis à New York et Washington [1]. Le secrétaire d’État, Colin Powell, promettait de distribuer au Conseil de sécurité un dossier complet présentant les preuves de la responsabilité afghane. 16 ans plus tard, on attend toujours ce document.

 

 

En 2003, le même Colin Powell venait expliquer au Conseil de sécurité, lors d’une intervention relayée par les télévisions du monde entier, que l’Irak était également impliqué dans les attentats du 11 Septembre et qu’elle préparait une nouvelle agression contre les États-Unis au moyen d’armes de destruction massive [2]. Cependant lorsqu’il eut quitté ses fonctions au sein du gouvernement US, le général Powell admettait sur une chaîne de télévision de son pays que les nombreuses accusations de son discours étaient toutes fausses [3]. 14 ans après ce discours, on attend toujours les excuses des États-Unis devant le Conseil de sécurité.

Tout le monde a oublié les accusations US sur la responsabilité du président Saddam Hussein dans les attentats du 11 Septembre (depuis, Washington a attribué les mêmes attentats à l’Arabie saoudite, puis aujourd’hui à l‘Iran, sans jamais apporter de preuves dans aucun de ces quatre cas). On se souvient par contre du débat, qui dura des mois, sur les armes de destruction massive. À l’époque la Commission de contrôle, de vérification et d’inspection des Nations unies (en anglais UNMOVIC) ne trouva pas la moindre trace de ces armes. Un bras de fer opposa son directeur, le Suédois Hans Blix, d’abord aux États-Unis, puis à l’Onu, et en définitive à l’ensemble du monde occidental. Washington affirmait que M. Blix n’avait pas trouvé ces armes parce qu’il faisait mal son travail, tandis que celui-ci assurait que l’Irak n’avait jamais eu la capacité de fabriquer de telles armes. Peu importe, les États-Unis bombardèrent Bagdad, envahirent l’Irak, renversèrent le président Saddam Hussein et le pendirent, occupèrent son pays et le pillèrent.

La méthode US d’après 2001 n’avait aucun rapport avec celle qui avait précédé. En 1991, le président Bush père s’était assuré de placer le droit international de son côté avant d’attaquer l’Irak. Il l’avait poussé à envahir le Koweït et le président Saddam Hussein à s’entêter. Il avait donc obtenu le soutien de presque toutes les nations au monde. Au contraire, en 2003, Bush fils se contenta de mentir et de mentir encore. De très nombreux États se distancièrent de Washington, tandis que l’on assistait aux plus grandes manifestations pacifistes de l’Histoire, de Paris à Sydney, de Pékin à Mexico.

En 2012, le Bureau des Affaires politiques de l’ONU rédigea un projet de capitulation totale et inconditionnelle de la Syrie [4]. Son directeur, l’États-unien Jeffrey Feltman, ancien adjoint de la secrétaire d’État Hillary Clinton, utilisa tous les moyens dont il disposait pour constituer la plus vaste coalition de l’Histoire et accuser la Syrie de toutes sortes de crimes dont aucun ne fut jamais prouvé.

Si les États qui détiennent le document Feltman ont décidé de ne pas le publier c’est afin de préserver les Nations unies. Il est en effet inacceptable que les moyens de l’ONU aient été utilisés pour promouvoir la guerre alors que cette institution a été créée pour préserver la paix. N’étant pas astreint aux mêmes obligations qu’un État, j’ai publié une étude détaillée de cet ignoble document dans Sous nos yeux [5].

En 2017, le Mécanisme d’enquête conjoint ONU-OIAC, créé à la demande de la Syrie pour enquêter sur l’usage d’armes chimiques sur son territoire, fait l’objet du même bras de fer que celui qui opposa Hans Blix à Washington. Sauf que cette fois, les fronts sont renversés. En 2003, l’ONU défendait la paix. Plus aujourd’hui, Jeffrey Feltman ayant été reconduit dans ses fonctions et étant toujours le numéro 2 de l’ONU. C’est la Russie cette fois qui s’oppose à des fonctionnaires internationaux pro-US au nom de la Charte.

Si les travaux du Mécanisme d’enquête ont été normalement débattus durant sa première période, c’est-à-dire de septembre 2015 à mai 2017. Ils sont devenus clivants lorsque le Guatémaltèque Edmond Mulet a remplacé à sa direction l’Argentine Virginia Gamba ; une nomination imputable au nouveau secrétaire général de l’ONU, le Portugais António Guterres.

Le Mécanisme d’enquête mobilise des fonctionnaires internationaux de l’ONU et de l’OIAC. Cette prestigieuse organisation internationale a reçu le Prix Nobel de la Paix, en 2013, notamment pour son travail de surveillance de la destruction par les États-Unis et la Russie des armes chimiques syriennes. Cependant son directeur, le Turc Ahmet Üzümcü, a évolué. En juin 2015, il était invité à Telfs Buchen (Autriche) à la réunion du Groupe de Bilderberg, le club de l’OTAN.

Lire la suite de l’article sur voltairenet.org

Notes

[1] Référence : Onu S/2001/946 et S/2001/947.

[2] « Discours de M. Powell au Conseil de sécurité de l’ONU », par Colin L. Powell, Réseau Voltaire, 11 février 2003.

[3] “Colin Powell on Iraq, Race, and Hurricane Relief”, ABC, September 8, 2005.

[4] « L’Allemagne et l’Onu contre la Syrie », par Thierry Meyssan, Al-Watan (Syrie) , Réseau Voltaire, 28 janvier 2016.

[5] Sous nos yeux. Du 11-Septembre à Donald Trump, Thierry Meyssan, Demi-Lune, 2017.

Retrouvez Thierry Meyssan chez Kontre Kulture :

Lire également :

Thierry Meyssan, sur E&R :

 
 






Alerter

4 Commentaires

AVERTISSEMENT !

Eu égard au climat délétère actuel, nous ne validerons plus aucun commentaire ne respectant pas de manière stricte la charte E&R :

- Aucun message à caractère raciste ou contrevenant à la loi
- Aucun appel à la violence ou à la haine, ni d'insultes
- Commentaire rédigé en bon français et sans fautes d'orthographe

Quoi qu'il advienne, les modérateurs n'auront en aucune manière à justifier leurs décisions.

Tous les commentaires appartiennent à leurs auteurs respectifs et ne sauraient engager la responsabilité de l'association Egalité & Réconciliation ou ses représentants.

Suivre les commentaires sur cet article

  • #1846650
    Le 23 novembre 2017 à 21:40 par René
    À l’ONU, l’incapacité US d’admettre la réalité

    Je ne sais plus trop à quoi m’en tenir sur Trump, à part qu’il se sait menacé donc qu’il doit accepter certaines concessions guerrières dont il s’acquitte de mauvaise grâce.

     

    Répondre à ce message

  • #1846723
    Le 23 novembre 2017 à 23:08 par b&b
    À l’ONU, l’incapacité US d’admettre la réalité

    @Meyssan
    Dire que Trump s’aligne sur Poutine en Syrie ... on va voir !
    Poutine viens de balancer : "Le processus de paix ne sera pas facile et exigera des compromis, y compris de la part du gouvernement syrien" (cf. Sputnik)

    C’est pas l’annonce d’un redécoupage au final non ? C’est Poutine qui s’aligne.

     

    Répondre à ce message

  • #1846730
    Le 23 novembre 2017 à 23:13 par NoHope
    À l’ONU, l’incapacité US d’admettre la réalité

    J’en ai assez de ce mensonge qui consiste à dire que Colin Powell disait avoir une fiole d’antrax à la main.

    Je vous invite à écouter ce qu’il dit en anglais pour ceux qui comprennent, ou trouver une version sous-titrée pour les autres : il dit simplement que la quantité d’antrax dans la fiole, qui correspondant à une cuillerée à café, avait été mise dans une enveloppe et envoyée au sénat américain, dont cela avait provoqué l’évacuation et le traitement des locaux au cours de l’année 2001.

    Cela pour expliquer qu’une quantité extrêmement faible d’arme biologique peut faire des dégâts à grande échelle tout en étant difficile à localiser par son faible volume.

    Les traductions foireuses de ses propos avaient déjà pour but à l’époque de manipuler l’opinion française pour qu’elle approuve sans réserve la position de Chirac exprimée par De Villepin. Je pense que ce mensonge concernant Powell était superfétatoire.

     

    Répondre à ce message

  • #1850202
    Le 29 novembre 2017 à 00:04 par RADWAN
    À l’ONU, l’incapacité US d’admettre la réalité

    Mais pourquoi, on voit pas à l’ONU des images du Yemen et ses enfants affamés et bombardés par les Saoudiens ? des Rohongyas ? etc, etc,

     

    Répondre à ce message