Les troupes israéliennes ont assassiné deux Palestiniens lors d’une journée de commémoration de la Nakba près de la ville de Ramallah en Cisjordanie.
Deux Palestiniens, Mohammad Abu Al Thaher et Nadim Nuwara, ont été assassinés par des soldats israéliens jeudi lors de la Journée de commémoration de la Nakba, près de la base militaire israélienne d’Ofer juste à l’extérieur de Ramallah, en territoire palestinien sous occupation.
Les Palestiniens en Israël, en Cisjordanie et dans la bande de Gaza commémoraient ce jour-là ce qu’ils appellent la « Nakba » ou « catastrophe », moment où les Palestiniens ont été chassés de chez eux lors de la guerre de 1948.
A midi, le silence est tombé sur la ville de Ramallah en Cisjordanie tandis que les sirènes ont retenti pendant 66 secondes. Après une marche depuis le mausolée du défunt président Yasser Arafat, des centaines de personnes se sont rassemblées au centre-ville.
A côté d’un groupe de musiciens et de groupes de scouts locaux, les Palestiniens, jeunes et vieux, portaient des cartes de la Palestine historique et de grandes clés, symboles de leurs maisons perdues il y a des décennies et du droit au retour. Des acteurs, depuis la plateforme d’un camion à l’arrêt, jouaient des scènes représentant la Nakba.
Mohammad Eliyan, qui dirige le Comité de commémoration de la Nakba, a déclaré que le droit des Palestiniens de retourner dans leurs foyers ancestraux était la clé d’une juste solution au conflit. « Ce 15 mai, alors que nous commémorons ce triste événement, nous disons que nous sommes plus forts et plus déterminés que jamais pour résister à la politique du gouvernement israélien qui continue à déposséder les Palestiniens » a-t-il dit.
Des marches similaires ont eu lieu dans les villes de Bethléem, Naplouse, Qalqilya, Jénine et Tubas, en Cisjordanie, pour marquer la journée. Au moins cinq Palestiniens, dont deux ont été plus tard déclaré morts, ont été blessés par des soldats israéliens dans les environs de Ramallah et de la ville du sud d’Hébron, alors que les manifestants subissaient des tirs à balles réelles, de grenades de gaz lacrymogène et de balles en acier recouvert de caoutchouc.
Les Palestiniens ont également tenu des rassemblements à travers Israël [Palestine historique] où ils représentent 20 pour cent de la population. Au moins deux personnes ont été blessées et plusieurs autres arrêtées, lorsque la police de l’occupant a tenté de disperser une manifestation pacifique devant la porte de Damas dans la vieille ville de Jérusalem.
« La Nakba nous affecte encore trop », a déclaré Abed Hassoura , un habitant de Jérusalem tenant un portrait de son fils Louay qui a été emprisonné il ya trois ans pour de soit-disant infractions en matière de sécurité. « Nous vivons ici, mais l’État [israélien] ne nous voit pas comme des égaux, il nous voit comme une menace. »
Les manifestants brandissaient des banderoles qui disaient : « Retour » et « Toute la Palestine est à nous », et faisaient écho aux commentaires de Eliyan sur le droit au retour. La question a été un sujet de controverse pendant des décennies de négociations, Israël insistant sur le fait qu’il n’acceptera pas plus d’un nombre symbolique de réfugiés. L’ex-président palestinien Mahmoud Abbas a apparemment capitulé sur ce droit dans une interview en 2012 avec la télévision israélienne, disant qu’il n’avait plus le droit de vivre à Safed, la ville où il est né.
« Droit sacré »
« C’est un droit, un droit sacré. Vous ne pouvez pas nous demander d’accepter une solution si notre peuple ne peut pas revenir, et si peut-être nous ne pouvons même pas rester », a déclaré Asmaa Majid, se référant aux propositions soutenues par certains hommes politiques israéliens qui intérgreraient certaines localités israéliennes avec de larges populations palestiniennes dans un éventuel État palestinien.
Au cours de la dernière année, le gouvernement israélien a élaboré des projets pour expulser des dizaines de milliers de Bédouins de leurs terres ancestrales dans le sud d’Israël et pour réduire la représentation palestinienne à la Knesset en relevant le seuil électoral. Le Premier ministre Benjamin Netanyahu a déclaré plus tôt ce mois-ci qu’il présenterait une « loi fondamentale », l’équivalent israélien d’un amendement constitutionnel, en déclarant le pays un « État juif ».
« Depuis le début de l’actuel gouvernement avec sa coalition de racistes d’extrême-droite, nous avons été confrontés à des guerres sur plusieurs fronts » a déclaré jeudi Bâle Ghattas, un député palestinien à la Knesset.
Des manifestations étaient également prévues jeudi soir à Jaffa, Haïfa et d’autres villes avec de grandes populations palestiniennes. Dans la ville d’Akka au nord, les habitants tiendront un rassemblement de souvenir chez une résidente qui fait face à une menace d’expulsion de la maison famiiale où elle vit depuis près de 50 ans .
Le mercredi, la veille du jour anniversaire, des Palestiniens, vêtus de chemises noires ont porté 66 torches dans les rues de Ramallah. Dans un communiqué diffusé à la télévision locale plus tard cette nuit-là, Abbas a accusé le gouvernement israélien de rendre la solution à deux États plus difficile à atteindre en laissant que l’une ou l’autre de deux possibilités : un État bi-national ou un régime raciste et d’apartheid.
« Il est temps que les dirigeants d’Israël comprennent qu’il n’y a pas de patrie pour les Palestiniens à l’exception de la Palestine, et c’est ici que nous resterons », a déclaré Abbas. « Il est temps de mettre fin à la plus longue occupation de l’histoire moderne. »
En 1948, plus de 800 000 Palestiniens, soit 67% de la population, ont été chassés de leurs maisons puis empêchés d’y revenir.
Selon les chiffres publiés cette semaine par le Bureau central de statistiques basé à Ramallah, le nombre de réfugiés palestiniens enregistrés aujourd’hui est de 5,3 millions. Ces Palestiniens réfugiés vivent dans 58 camps installés par les Nations Unies - en Syrie, au Liban, en Jordanie, en Cisjordanie et dans la bande de Gaza.
Le dirigeant du Fatah Marwan Barghouti, emprisonné en Israël sur des accusations de crimes [pour faits de résistance - NdT], a déclaré dans une communication écrite que toute solution au conflit israélo-palestinien qui ne garantit pas le droit au retour était inacceptable.
« Le droit au retour des réfugiés palestiniens dans leurs foyers d’où ils ont été expulsés de force, est un droit sacré qui ne souffre aucun compromis, un droit garanti par le droit international et consacré dans la résolution 194 de l’Assemblée générale des Nations-Unies » a-t-il rappelé.
A Gaza , des dizaines de Palestiniens ont manifesté près de la clôture qui sépare le territoire assiégé et Israël, portant des drapeaux et des banderolles appelant au droit au retour.
« Le droit au retour fait l’unanimité dans tout le peuple palestinien, où qu’il soit », a déclaré Zakaria al-Agha, un membre du comité exécutif de l’OLP, dans un discours à Beit Hanoun. Il a ajouté que la revendication d’Israël d’être reconnu comme un État exclusivement juif était destiné à priver les réfugiés palestiniens de leur droit.
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