Le révisionnisme byzantin d’Anthony Kaldellis
28 novembre 2023 01:29, par GenevièveArticle très intéressant et vivifiant, mais un peu de nuances serait souhaitable.
Par exemple :
"Contrairement à ce qu’il s’est passé dans l’Occident latin sous l’influence de Tertullien, d’Augustin et quelques autres, les Pères de l’Église d’Orient n’ont pas condamné l’héritage païen ».
"La plupart des papes médiévaux avaient une sainte horreur de tout ce qui était « grec », terme toujours péjoratif chez eux (à commencer par Augustin et Grégoire le Grand). »
Si les papes n’aimaient pas ce qui était grec, cela ne veut pas dire qu’ils n’appréciaient pas la culture antique païenne latine, notamment Virgile
Virgile qui a continuellement été lu et recopié en Occident pendant plus de 2000 ans !
Quant à Augustin s’il a rencontré des difficultés dans l’apprentissage de la langue grecque, il n’a pas rejeté le platonicisme qu’il a tenté de marier avec le christianisme. Il n’a pas condamné l’héritage païen, il en a pris tout ce qu’il contenait de bon, y compris sa rhétorique dont il a fait abondamment usage !
Quasiment tous les évêques latins de l’Antiquité tardive ont été formés dans des écoles de rhétoriques païennes, et personne ne trouvait à redire quelque chose à cela. Si on lit n’importe quel écrivain latin chrétien du IVe siècle jusqu’à Isidore de Séville au VIIe siècle, on voit bien qu’ils connaissent tous les auteurs païens latins et grecs qui les ont précédés.
Ensuite, l’antique culture latine a été perpétué à l’abri du monde, dans les monastères, à une époque de relative barbarie où la chasse et la guerre passionnaient plus l’élite féodale que la culture livresque. La langue grecque et ses auteurs ont bien été oublié, mais pas les auteurs païens latins ; si les moines ne les avaient pas recopié leurs oeuvres, on ne les connaîtrait pas !
Donc non, l’héritage païen n’a pas été condamné par les héritiers occidentaux de l’Empire romain. C’est l’héritage grec qui s’est vu rejeté à partir du IXe siècle.
"Une conséquence majeure est que la philosophie politique qui guidait l’élite dirigeante était fondamentalement classique, alors que la « théologie politique occidentale était tirée de l’Ancien Testament, les princes se prenant souvent pour de nouveaux Moïse, Josué ou David (jamais comme un nouveau Jésus)".
Avant de se chercher des racines dans l’Ancien Testament, les princes occidentaux se sont tournés du côté d’Enée, modèle des Romains, et ont fait remonter leur origine à la glorieuse Troie, ennemie des Grecs !