Constitutions, souveraineté et Grèce
15 décembre 2014 14:13, par listenerVous énoncez :" À travers cette manipulation, elles (les institutions européennes) peuvent faire disparaître le principe de souveraineté (...) Mais, cette remise en cause est aussi à l’ordre du jour en raison de l’irruption du constitutionnalisme économique sur la scène publique".
Mais le "constitutionnalisme économique" ne ferait pas disparaître la souveraineté ! Le "Marché" serait souverain, c’est tout. Entreprendre la critique de cela suppose de commencer par l’Europe qui est directement à l’origine de ce concept ubuesque.
Il faut distinguer le concept "institution" (qui repose sur l’autorité ("auctoritas"), et le concept "constitution" (issue d’une co-volonté, du peuple, et qui donne cohérence au "droit", qui le "légitime" et dont découlent des "pouvoirs" ("potestas"), choses plus lourdes. Des institutions ont des sujets. Des constitutions ont des citoyens.
Le concept de "constitutionnalisme économique" peut-il être "constitutionnel" ? Une constitution suppose une volonté collective. certes Mais elle n’a pas pour objet de proclamer pompeusement et arbitrairement des "droits" (constitution à l’américaine) mais d’organiser la séparation des pouvoirs pour assurer la "garantie des droits" (article 16). Cela revient à mettre les pouvoirs sous "interdits" ! Les citoyens sont libres mais les titulaires des pouvoirs ne le sont pas. Il est interdit au législateur de juger et d’exécuter, au juge de légiférer et d’exécuter, au pouvoir exécutif de légiférer et de juger ! Une "institution" doit être "légale" est soumise à la loi et à la constitution. Mais elle se détermine comme elle l’entend dans ce cadre.
Faire du marché le Souverain à la place du peuple n’est pas a priori impossible en soit. Louis XIII a bien mis la France sous la souveraineté du Sacré-Cœur ! Mais il faudrait écrire une "constitution" qui organisât la séparation des pouvoirs de "Sa Majesté le Marché" ! Réaffirmer les trois pouvoirs, législatif, exécutif et judiciaire, les remettre sous les interdits supra-constitutionnels ! Déterminer donc les limites de son pouvoir. Là est le problème.
Mais disons le : c’est le triomphe final et complet de l’article 17 de la déclaration des droits de l’hommes : "la propriété est un droit inviolable et sacré". Base d’une société dominée par les riches, le concept de "constitutionnalisme économique" ne fait qu’adapter l’article 17 "aux exigences de notre temps" ! On sort de la ruralité ! Mais c’est la même chose.