La civilisation européenne ne pourra jamais avoir un point de vue juste sur Byzance. La sainteté et la grandeur aux yeux de l’érudit orthodoxe, ne relèvent pour eux que de l’extérieur, du ritualisme, du formel et leur restent étrangères. Cela leur semblera manquer de culture pour la seule raison que cela n’est pas européen ; et hétérodoxe, parce que cela ne rentre pas dans le cadre du catéchisme latin. Au mieux, le savant occidental ne verra dans la culture byzantine qu’un exotisme brillant et curieux. Son exigence d’ "objectivité critique ", imprégnée du venin de la tradition critique de l’école de Tübingen, lui ôtera toute liberté « critique » de prendre parti. Il ne comprendra ni ne ressentira jamais l’âme et la figure de la culture orthodoxe byzantine. L’érudit occidental restera soit thomiste et papiste, soit rationaliste, protestant, et en tous les cas, adepte du scepticisme non sans une forte dose de sarcasme. Pour vraiment aimer et ressentir le coeur de Byzance de tout son être, il faut être baptisé dans les eaux de Byzance, être brûlé par le feu de son soleil, être enveloppé par les volutes de la fumée de ses encensoirs, et lui appartenir sans réserve. On n’aborde pas l’étude de la religion, du christianisme, de la Byzance orthodoxe, comme celle d’une curieuse espèce de scarabée, ou du folklore. Mais il faut s’incarner dans l’objet de sa recherche. Pour parler comme Berdiaev, on ne doit pas ici « objectiviser », mais il faut comprendre « existentiellement ». C’est-à-dire seulement après avoir le sentiment de ce que ce tout est profondément quelque chose de familier, et non issu de l’extérieur, qu’il appartient entièrement au chercheur, que le chercheur s’y est pleinement adonné de toute son âme, de tout son coeur et de toute son intelligence, et qu’il s’est incarné en lui. Seulement le byzantin en esprit peut vraiment parler de la culture orthodoxe byzantine et de ce qu’elle recèle.