L’accord sur l’union bancaire auxquels sont parvenus les 27 hier n’est en aucun cas historique. D’abord, il ne résoud pas grand chose avec son fond ridicule de 55 milliards. Mais en plus, il consacre la toute-puissance de Berlin, qui y trouve un moyen de défaire en partie ce qui avait été fait avec le MES.
L’Allemagne obtient tout ce qu’elle veut
Il est assez étonnant que cela ne soit pas tellement souligné dans l’analyse médiatique de l’accord trouvé par les ministres de l’économie des 27 mercredi. Dans le détail, les membres de l’Union Européenne, après s’être mis d’accord pour faire de la BCE l’instance de régulation des grandes banques de la région, se sont accordés sur des règles communes pour renflouer ou liquider les banques européennes qui en auraient le besoin. L’Allemagne a bien protégé ses intérêts en obtenant que le seuil retenu pour la supervision des banques épargne ses caisses d’épargne régionales, qui financent l’industrie.
Les pertes seront d’abord imposées aux actionnaires, puis aux créanciers, en fonction de leur niveau d’assurance (des moins bien assurés jusqu’aux plus seniors) et en dernier recours aux déposants, au-delà de 100 000 euros. Ensuite, pourront être sollicités des fonds nationaux de résolution, financés par les banques et enfin des ressources soit nationales, soit européennes.
Un fond de 55 milliards sera monté d’ici à 2025 par des prélèvements sur les banques, mais cette somme est totalement ridicule au regard de la crise de la 2008. Après 2025, le MES pourrait servir, mais les conditions sont encore très floues, et cela est très lointain.
En fait, l’Allemagne, les Pays-Bas et la Finlande voulaient absolument éviter tout recours à l’argent public. En clair, les pays créanciers voulaient quelque part revenir sur les engagements pris avec le MES, qui permettaient d’utiliser l’argent pour les banques de tous les pays. Avec ce nouveau mécanisme, il devient extrêmement peu probable que les contribuables allemands puissent être mis à contribution pour le sauvetage d’une banque étrangère. Non seulement Angela Merkel a réussi à éviter d’engager son pays plus encore, mais elle a réussi à faire reculer ses engagements !
Nous sommes tous des chypiotes en puissance
Il y a des éléments positifs et d’autres très négatifs dans cet accord. En positif, au final, la marche fédéraliste est arrêtée en matière bancaire puisque si le mécanisme de résolution est commun à l’échelle de l’Europe, il n’inclut pas un centime d’argent public et maintient les Etats dans le jeu. Nous sommes bien loin du chèque en blanc que certains eurocrates cherchaient à obtenir. Les euro obligations sont un lointain souvenir. Point positif également, les actionnaires et les créanciers seront mis à contribution avant les contribuables : ainsi, ils seront poussés à faire un meilleur travail de contrôle des banques.
En revanche, il est absolument scandaleux d’institutionnaliser le mécanisme mis en place à Chypre, à savoir que les épargnants pourront être mis à contribution dans le cas d’une faillite bancaire. Certes, il s’agit uniquement des dépôts supérieurs à 100 000 euros, mais cela est totalement anormal. Dire que les partisans de l’euro disaient que l’euro protégeait l’épargne. Dans la réalité, c’est l’inverse. Cette remise en cause formelle de l’intégrité de l’épargne est une grave remise en cause du lien de confiance qui devrait normalement exister entre les banques et les épargnants.
Il y a un grand vainqueur dans cette négociation sur l’union bancaire : le contribuable allemand. Berlin a réussi à bien mieux le protéger que cela avait été fait au moment du MES. Et comme sous Nicolas Sarkozy, l’Allemagne dicte ses conditions à une France qui accepte toutes les contraintes bien sagement.