Egalité et Réconciliation
https://www.egaliteetreconciliation.fr/
 

Un jour en France : mercredi 4 mai 2016

Bolloré, François Ruffin, Sami Bouajila

Trois figures dominent l’actualité de ce mercredi 4 mai 2016 : Bolloré et sa télé boulet, i>Télé, la chaîne d’information continue du groupe Canal+, François Ruffin, l’initiateur du mouvement Nuit Debout et le réalisateur d’un film social contre Bernard Arnault, Merci patron !, qui tourne actuellement dans les salles, dans lesquelles le public friand d’action pourra voir Braqueurs, avec Sami Bouajila. Il y a du social dans l’air...

 

 

C’était couru d’avance. Et pourtant, ils l’ont fait. Ils, ce sont les hommes en gros de Canal, la chaîne qui dégoulinait de fric, mais du fric des abonnés. Emportés dans leur élan de développement, et leur « esprit » qui devait symboliser l’idéologie gagnante, le groupe éponyme a sorti sa chaîne d’info continue, avec Bernard Zekri aux manettes. Rien que du bon trotskard rompu à ces manipulations médiatiques qu’on appelle platement « des émissions », qui permettent de transmettre le programme politique et la parole dominante aux foules.

Sauf que là, c’était avec de jeunes recrues, carrément des novices, un matériel pas toujours au point, et un parti pris gauchiste dangereusement assumé. Lancée en 1999 dans les derniers mois de gabegie et d’insouciance, avant que Jean-Marie Messier ne vienne mettre son groin de banquier dans l’affaire, la chaîne « tout info » mettra 15 ans à ne jamais décoller d’un petit « pour cent » d’audience. Tout ça pour un budget de plus de 40 millions d’euros annuels, soit une perte quasi sèche. À ce niveau d’influence, la pub ne rapporte presque rien. Des changements de rédaction en chef (au moins un tous les deux ans, sans compter les présidences), de stratégie, de marketing, de décor, d’animateur, n’y changeront rien : quelque chose était vicié dans l’ADN même du nouveau-né, mais quoi ?

 

 

Eh bien la bien-pensance, ducon. Qui tombe au pire moment : au moment où l’Internet sort de sa gangue, et surtout, qu’il explose avec l’arrivée du haut débit dans le mitan des années 2000. Là, ça commençait à devenir plus dur pour l’info officielle, qui sera dépassée progressivement par l’auto-information, comme il y a l’automédication (dont les médecins et les journaux télévisés nous disent que c’est très mal et très dangereux, toujours les mêmes menaces). Malgré une seule concurrente, LCI, qui revient depuis peu en grâce et en gratuit sur la TNT, i>Télé ne sera jamais prise au sérieux. Et en 2005, à son arrivée sur la TNT gratuite après avoir végété sur CanalSat, elle doit se coltiner une tueuse (de coûts), BFMTV. La chaîne d’Alain Weill cartonnera en livrant plus d’images, plus vite, avec moins de bien-pensance et d’émissions magazines au ton professoral. Le modèle américain appliqué à la France. C’est tout, la clé du succès de toute entreprise médiatique tient en trois mots : moins de bien-pensance. Ceux qui s’y entêtent le payent cher, on pense à Libération, au Monde, jusqu’au Canard enchaîné.

Bolloré, qui est méchant mais pragmatique, ne voit pas pourquoi il s’encombrerait d’une chaîne qui a misé sur le mauvais cheval politique, qui creuse le déficit du groupe, et qui ne rattrapera jamais sa rivale BFMTV, celle qui a compris avant tout le monde l’importance de la vidéo virale sur le Net. Son credo se résume ainsi : pourquoi s’emmerder avec l’info, qui coûte cher, qui peut déraper à tout moment, déplaire aux puissances du moment, et où grouille toujours un quarteron de journalistes qui croient bêtement à la déontologie. Par exemple, le traitement positif du phénomène Nuit Debout, où les capitalistes se font insulter en permanence, où les journalistes de gauche donnent facilement la parole à François Ruffin, qui cible Bernard Arnault dans son documentaire Merci patron !, même si un coup de patte à son grand concurrent national n’est pas pour déplaire à Bolloré…
Résumé : l’info ne rapporte rien, à part des emmerdes. Seul le service public est tenu d’en faire, et ça lui coûte très cher. En argent et en indépendance.

« Seule l’alliance des classes populaires et des classes intermédiaires permet de contester la toute puissance des riches » (Ruffin)

Au fait, ce Ruffin, qui c’est ? C’est le fondateur du journal Fakir, de gauche radicale selon les uns, d’extrême gauche selon les autres, une sorte de Canard enchaîné moins la richesse, ou de Charlie Hebdo moins les insultes. 300 000 Français ont vu Merci patron !, et Ruffin est devenu son propre porte-parole un peu malgré lui. Il est en charge de la revanche sociale, contre les riches, les patrons, les capitalistes. Sur l’injustice sociale et la trahison du Parti socialiste, on ne peut pas lui donner tort. Ce retour à l’esprit de gauche, à l’image des rockers dévoyés qui reviennent à un rock plus brut quand ils ont trop bifurqué dans le « commercial », il se développe sur les ruines de la déception hollandaise. C’est justement ce qu’explique, avec beaucoup d’innocence, jouée ou pas, Ruffin :

 

 

Ce qui est intéressant, ce ne sont pas les propos, cent trente mille fois entendus en télé ou dans la rue, mais la liaison cérébrale entre la journaliste et l’activiste. On sent une concordance des pensées, et derrière, des idéologies. L’employée de France 3 ne cherche pas à mettre le gauchiste en difficulté, comme on pourrait le voir avec un Soral, qui n’est d’ailleurs jamais interviewé. Et pour cause : il pourrait répondre de travers, et incriminer l’intervieweuse, qui n’est évidemment pas neutre, même si elle le croit. Ainsi, le mouvement Nuit Debout bénéficie-t-il de la bienveillance presque parentale du système médiatico-politique.

 

La Révolution Culturelle de François Hollande

Les petits débordements et autres violences des centres-villes rappelleront aux Bernard Zekri et autres Julien Dray leurs échauffourées langagières ou gestuelles contre la police ou l’extrême droite, au choix. La gauche des médias pardonne tout à la gauche des rues, la gauche du haut à la gauche du bas. La surgauche réserve sa hargne, sa rogne et sa grogne aux « fachos », qui ne font pas dans la subversion acceptable. C’est bien le problème de Nuit Debout, tous les observateurs un peu lucides l’ont assez dit : subversion de pacotille, probable billard de Hollande contre Valls, qui faisait le fier-à-bras contre les terreurs djihadistes, mais qui fait canard devant la colère gentillette des enfants de la bourgeoisie. Coincé, le Manu, par un Hollande manipulateur, ce que Villepin n’avait pas réussi à faire lors des émeutes de 2005, quand Sarkozy, alors ministre de l’Intérieur, avait lui su surfer sur le mouvement pour apparaître en sauveur de la Nation. Il est probable que le président de la République, dans un geste auguste, recevra bientôt dans un moment de noblesse paternaliste, une délégation de Nuit Debout, pour leur jeter quelques piécettes pré-électorales. Une sorte de Plan Jeunes, que son conseiller très spécial Julien Dray serait en train de lui concocter…

Mais fi de la politique-fiction, et retour au concret. Au « Michael Moore français », comme la presse en mal de héros l’a surnommé. Rappelons que Michael Moore est devenu riche en dénonçant les défauts de l’Amérique. Ruffin, avec ses 300 000 entrées pour un investissement de 40 000 euros, est sur la voie du succès. Saura-t-il gérer ce miracle de rentabilité capitaliste ? Nul ne saurait le dire, mais il n’a pas droit à la sortie de route, les « purs » l’attendant déjà au coin de la rue avec leurs battes de mots, toute la phraséologie sartrienne des « salauds » de bourgeois. Impossible de décevoir les troupes, Ruffin ne doit pas finir en Hollande !

 

D’une déception l’autre

Ceux qui veulent rigoler un bon coup se souviendront du thème de la soirée du 23 février à la Bourse du Travail, à Paris, qui a lancé le mouvement : « Leur faire peur ». Par « leur », comprendre les puissances de l’argent, la finance, tout ça. On devait déjà à Ruffin, en 2003, la sortie du très remarqué Les petits soldats du journalisme, où il dénonçait (les gauchistes dénoncent beaucoup) le formatage mental des étudiants du Centre de Formation des Journalistes. Un travail inspiré des thèses de Bourdieu, le sociologue fonctionnaire qui critiquait le Système dans son fauteuil roulant universitaire. Et qui n’a jamais eu à se battre. C’est là toute la différence entre les vrais et les faux résistants. La souffrance. Qui elle, ne ment pas (comme la terre). Sinon Ruffin collabore au Monde Diplomatique, qui a bien compris où était la ligne rouge, et à France (?) Inter, chez Daniel Mermet, le dinosaure de gauche un peu tyran sur les bords. Nul doute que Faits & Documents saura étoffer la fiche de ce trublion.
Bon, on n’est pas là pour déboîter les gens, on est là pour parler cinéma.

Si on n’a pas encore vu Merci patron !, c’est qu’on a peur d’attraper des maladies vénériennes de la pensée au contact des gauchistes dans la salle, mais aussi parce que Braqueurs est sorti. Braqueurs ? Encore un film à la con qui glorifie les bandits ? Oui et non. De la série B efficace, avec le toujours excellent Sami Bouajila. Attention aux rôles stigmatisants, Sami.

 

 

Staline aimait les voyous, il en était un, à l’origine (les Américains disent qu’il l’est resté), il les préférait aux bourgeois. Braqueurs c’est un peu l’anti-Merci patron !, dans le genre social, ou plutôt antisocial. Du social ni traître ni cucul, plutôt suicide, car celui qui vit par la kalach meurt souvent par la kalach, n’est-ce pas. Sauf qu’entre-temps, le braqueur vit la vie du grand bourgeois. C’est un peu le rêve américain du jeune des quartiers : bagnole, vitesse, gonzesse et cash. Sauf que le bourgeois bien né reste bel et bien vivant, jouissant jusqu’au bout de son haut standard de vie, tandis que le braquo finit avec un trou grand comme une assiette dans le dos. L’effet d’une balle à haut vélocité. Vivre vite, mourir très vite aussi, avec quelques cases prison au milieu. Au-delà des considérations morales – voler c’est pas bien etc. – le braquo doit faire montre de qualités assez remarquables de sang-froid, de courage, de détermination, de résistance, d’organisation, de lucidité, d’instinct, de décision. Qualités qui auraient pu le faire « réussir » dans un autre contexte de naissance, on pense aux grands capitaines d’industrie, ou aux leaders de partis politiques, qui ont tous traversé une forêt d’embûches pour arriver au soleil.

« Pour des gens comme nous, Mesrine était le représentant du petit peuple face aux puissants » (Rédoine Faïd)

Oui mais voilà, la naissance, autant dire le hasard, du bon côté de la barrière tu nais Vincent Bolloré, héritier pouponné par Antoine Bernheim, le parrain du capitalisme français, qui a aussi « fait » Bernard Arnault, et de l’autre Rédoine Faïd, qui flashe sur le film Heat de Michael Mann, et qui applique avec plus ou moins de frime les techniques du braquage à l’arme de guerre… pour finir « cerveau » d’un énième coup qui tourne mal, avec la mort de la policière Aurélie Fouquet. Il aura été la vedette des médias, écrit un livre avec Jérôme Pierrat (dit le Ravi), péroré sur le plateau du Grand Journal, et donné une interview-repentance aux naïfs de Lyon Capitale. Prix à payer : 18 ans de prison. Ruffin peut dormir tranquille.

Voir aussi :

Décembre 2017
Un jour en France : vendredi 22 décembre 2017
Les migrants ou nos enfants ?, le FN pour le Système, l’axe Paris-Berlin-Moscou
9
Décembre 2017
Un jour en France : jeudi 21 décembre 2017
Dealer intouchable, France à l’envers, Schiappa grosse fellation, Tex et Ruquier
13
Décembre 2017
Un jour en France : mercredi 20 décembre 2017
On fait péter la pauvreté, les roteuses et la ZAD !
15
Décembre 2017
Un jour en France : mardi 19 décembre 2017
"Marave Challenge" à Metz, Le Monde anti-Blancs, Le Drian la soumise
19
Décembre 2017
Un jour en France : lundi 18 décembre 2017
Marianne attaque Belattar, Lancelin casse Enthoven, la liste des morts de la rue
8
Décembre 2017
Un jour en France : vendredi 15 décembre 2017
Le retour de la France, le retour de Najat (et Hollande), le départ de Tex
16
Décembre 2017
Un jour en France : jeudi 14 décembre 2017
Le Thalys de Clint Eastwood, Marsault censuré, la ZAD crade
38
Décembre 2017
Un jour en France : mercredi 13 décembre 2017
Révolte anti-Ernotte, Masure déchire Haziza, Rokhaya Diallo numérisée
27
Décembre 2017
Un jour en France : mardi 12 décembre 2017
Terreur et chômage, Balkany et Johnny, sexe et galanterie
20
Décembre 2017
Un jour en France : lundi 11 décembre 2017
Les matches Mediapart/Bertin, Dupont-Aignan/Mimie Mathy, Rossignol/Ménard
38
Décembre 2017
Un jour en France : vendredi 8 décembre 2017
Théâtrale Shoah, les Français détestent Manuel Valls, Polytechnique sa mère
17
Décembre 2017
Un jour en France : jeudi 7 décembre 2017
Sus aux anti-crèches, la croix de Ploërmel, et la croix de Johnny
40
Décembre 2017
Un jour en France : mercredi 6 décembre 2017
Johnny, le Milieu, la came, les filles et l’alcool
45
Décembre 2017
Un jour en France : mardi 5 décembre 2017
Macron contre la télé publique, Mélenchon contre miss Salamé-Glucksmann, Blanquer dicte sa loi
22
Décembre 2017
Un jour en France : lundi 4 décembre 2017
Au fait la dette on la doit à qui ?, Aphatie la grosse balance, Massar mort pour le crack
17
Décembre 2017
Un jour en France : vendredi 1er décembre 2017
Porno contre féminisme, Hanouna contre JoeyStarr, Dany Machado contre le Bataclan
13
Novembre 2017
Un jour en France : jeudi 30 novembre 2017
France 2 romantise le Bataclan, Cantat la violence, Hugo Clément dérape et gicle
9
Novembre 2017
Un jour en France : mercredi 29 novembre 2017
Macron défonce le Burkina, Deschamps Cantona : 1-0, Filoche la grosse pétoche
17
Novembre 2017
Un jour en France : mardi 28 novembre 2017
Omar Sy en promo au Bangladesh, France 2 dégraisse (ouf), Satan en Concert sur Arte
40
Novembre 2017
Un jour en France : lundi 27 novembre 2017
Caroline Fourest chérie, autoracisme antiblanc, Patrick Cohen sur liste noire ?
10
Novembre 2017
Un jour en France : vendredi 24 novembre 2017
Pierre Ménès disjoncte, Raphaël Enthoven s’excuse, Raphaël Glucksmann attaque
11
Novembre 2017
Un jour en France : jeudi 23 novembre 2017
Emmanuel Petit déprimé, ouvrières harcelées, Najat Belkacem insensée
10
Novembre 2017
Un jour en France : mercredi 22 novembre 2017
Haziza brûlé, Finkielkraut chauffé, règlements de comptes chez les sionistes
12
Novembre 2017
Un jour en France : mardi 21 novembre 2017
"Ferme ta gueule", "Touche à ton cul" et "Bouffe ta merde"
29
Novembre 2017
Un jour en France : lundi 20 novembre 2017
Bienvenue aux réfugiés de Libye !, Dieudonné bat Valls, Moix avale (Attal)
27
 
 






Alerter

7 Commentaires

AVERTISSEMENT !

Eu égard au climat délétère actuel, nous ne validerons plus aucun commentaire ne respectant pas de manière stricte la charte E&R :

- Aucun message à caractère raciste ou contrevenant à la loi
- Aucun appel à la violence ou à la haine, ni d'insultes
- Commentaire rédigé en bon français et sans fautes d'orthographe

Quoi qu'il advienne, les modérateurs n'auront en aucune manière à justifier leurs décisions.

Tous les commentaires appartiennent à leurs auteurs respectifs et ne sauraient engager la responsabilité de l'association Egalité & Réconciliation ou ses représentants.

Suivre les commentaires sur cet article