L’Union européenne (UE) a exhorté lundi la Russie à faire baisser la tension en Ukraine d’ici à jeudi, en la menaçant de sanctions si ses troupes ne se retiraient pas de Crimée.
Preuve de la gravité de la situation, un sommet extraordinaire rassemblera jeudi à Bruxelles les chefs d’État et de gouvernement des 28 pays de l’UE.
Réunis dans l’urgence lundi, les ministres des Affaires étrangères ont exprimé leur « extrême inquiétude », selon le Français Laurent Fabius. Car l’Ukraine est la pire crise en Europe « depuis la chute du mur de Berlin », a estimé l’Allemand Frank-Walter Steinmeier.
Les ministres ont directement mis en cause Moscou en condamnant la violation manifeste de la souveraineté ukrainienne par les actes d’agression des forces armées russes.
Ils ont appelé la Russie à prendre des mesures rapides et concrètes de désescalade avec, en premier lieu, le repli des forces russes déployées ces derniers jours en Crimée dans leurs zones de stationnement permanentes.
Si ce n’était pas le cas, les dirigeants européens pourraient décider jeudi de suspendre des négociations sur la libéralisation des visas ou sur un nouvel accord de coopération.
L’UE envisagera aussi des mesures ciblées, à savoir des sanctions visant des personnalités ou des entités sous la forme de gel des avoirs ou de privation de visas.
« Cela veut dire concrètement que les ponts seront coupés sur beaucoup de sujets », a souligné M. Fabius.
Les ministres ont décidé d’accorder deux jours à la Russie afin de favoriser le dialogue, alors que l’activité diplomatique s’annonce intense.
Rencontre Ashton-Lavrov mardi
La représentante de la diplomatie de l’UE, Catherine Ashton, rencontrera mardi à Madrid le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, avant de se rendre le lendemain à Kiev.
« Le dialogue à tous les niveaux est très important, a insisté Mme Ashton, car nous voulons vraiment que cette situation soit résolue rapidement, et plus important encore, de façon pacifique. »
M. Lavrov a cependant dénoncé les menaces de sanctions brandies par ceux qui essaient d’interpréter la situation comme une agression de la part de la Russie.
À Bruxelles, certains ministres, essentiellement ceux des pays d’Europe de l’Est voisins de la Russie, ont souhaité que l’UE adopte une ligne plus ferme à l’égard du président Vladimir Poutine.
« Nous savons que chez les rapaces, l’appétit vient en mangeant. L’enjeu pour le monde libre est de s’opposer à cette logique », a déclaré Radoslaw Sikorski, le chef de la diplomatie polonaise.
« Certains en Russie restent impressionnés par l’usage de la force militaire, a renchéri le Suédois Carl Bildt. Mais ce n’est pas le meilleur moyen de se faire des amis en Europe et dans le monde, et les Russes vont s’en apercevoir, pas aujourd’hui ou demain, mais un peu plus tard », a-t-il ajouté.
Devant le Parlement européen, l’émissaire du gouvernement ukrainien pour la Crimée, Boris Tarasiuk, a également exhorté l’UE à adopter une approche beaucoup plus ferme à l’égard de la Russie.
La principale décision prise jusqu’à présent est d’ordre diplomatique, avec la suspension, annoncée dimanche par les pays du G7 (Allemagne, Canada, Etats-Unis, France, Italie, Japon et Royaume-Uni), des préparatifs en vue du sommet du G8 de Sotchi en juin.
La crise ukrainienne tend un peu plus les relations entre l’UE et la Russie, déjà affectées ces dernières années par des frictions commerciales. Mais les échanges entre les deux parties ont continué à fortement s’accroître, la Russie étant désormais le troisième partenaire de l’UE après les États-Unis et la Chine, avec près de 340 milliards d’euros d’échanges en 2012.
Témoignant de l’inquiétude des investisseurs, les valeurs européennes les plus présentes en Russie ont fortement chuté lundi en Bourse.
Voir aussi, sur E&R : « BHL menace Poutine »