Le double attentat terroriste de Damas et celui d’Alep, ce week-end, ne changeront pas la nouvelle donne sur le terrain. Ces actions barbares, qui ont fait des dizaines de morts et de blessées dans les rangs des civils et des militaires, dénotent le désespoir de ceux qui pensaient que détruire la Syrie et renverser son régime étaient une simple promenade, comme en Libye.
Jusqu’en février, les provinces de Homs, Hama, Idleb, Deraa ainsi que plusieurs localités au nord de Damas échappaient partiellement au contrôle de l’État. Afin d’éviter de lourdes pertes dans les rangs des civils, le pouvoir a pris son temps avant d’agir. Le soutien logistique, financier et militaire fourni aux insurgés par l’Arabie saoudite et le Qatar, ainsi par des membres des forces de l’Otan qui opéreraient d’ores et déjà en Syrie dans des missions de reconnaissance et d’entraînement des rebelles, ont finalement convaincus Damas de la nécessité de frapper d’une main de fer.
Le gouvernement a donc lancé une offensive par étapes contre les zones qui échappent à son contrôle, à commencer par la banlieue nord-est de nord de la capitale syriennes. L’armée syrienne a établi un plan en trois étapes baptisé "nettoyage des villes et villages des groupes armés", qui prévoit en premier lieu un assaut militaire dans la province de Damas, puis une offensive dans les villes et les campagnes de Hama et Homs. La troisième étape sera la campagne d’Idleb, récupérée la semaine dernière.
L’importance de l’offensive contre les trois campagnes et l’élimination des hommes armés appartenant à la confrérie des Frères musulmans et aux courants salafistes réside dans leur proximité des frontières libanaise et turque, par ou transitent l’argent et les armes destinés aux rebelles.
Lors de ses réunions avec les commandants militaires, le président syrien a ordonné à l’armée de n’autoriser aucune zone d’influence et de venir à bout des poches contrôlée par les insurgés.
Tout au long des deux premières semaines de février, l’armée déloge sans difficultés, les rebelles de la banlieue de Damas et des villes de Zabadani et Rankous. À Homs, elle encercle les quartiers rebelles et lance des opérations ciblées contre les miliciens de l’Armée syrienne libre. Le lieutenant dissident Abdel Razzak Tlass, chef de la brigade Farouk, est tué.
Pendant la deuxième moitié de février, l’armée procède au ratissage de la province de Hama. Elle appelle les civils à quitter les zones contrôlées par les rebelles à Homs, et renforce le siège des quartiers de Jobar, Karm el-Zeitoune, Inchaat et Baba Amr. Le quartier symbolique de Baba Amr tombe aux mains de l’armée. Cet épisode est perçu par plusieurs analystes politiques et militaires comme un "tournant" dans la bataille qui oppose les insurgés au régime, similaire à la bataille de Hama qui a abouti à la déroute des Frères musulmans en 1982. S’ensuit la chute des villes de Rastan et Qousseir aux mains de l’armée gouvernementale, qui ratisse les poches rebelles et procède à l’arrestation de milliers d’insurgés, dont des dizaines d’étrangers.
Le 5 mars, l’armée a entamé la troisième étape de son offensive visant à reprendre la province volatile d’Idleb, au nord-est de la Syrie. Plusieurs villes et villages longeant la frontière turque, sont aux mains de miliciens islamistes.
La reprise en main de la totalité de la province par l’armée n’est qu’une question de temps. La date du 7 mai, fixée par le président pour la tenue d’élections parlementaire, semble être une échéance pour la reprise de toutes les poches contrôlées par les rebelles. La décision des pétromonarchies du Golfe d’accentuer le soutien militaire des extrémistes fera traîner pendant plusieurs mois la guérilla qui n’aura plus cependant la capacité d’influer sur le cours des événements. Malgré les moyens colossaux mis en œuvre par les pays du Golfe et leurs sponsors occidentaux, l’armée reste intacte. Les défections restent limitées à des officiers marginaux. Elle ne donne aucun signe d’essoufflement en n’a pas utilisé sa force de frappe.
Pendant ce temps, l’opposition peine à surmonter ses divergences. Les conflits qui déchirent l’opposition découlent d’une friction entre deux mentalités diamétralement opposées. D’une part, il y a ceux qui réclament une intervention étrangère sans laquelle ils s’estiment incapables de renverser le régime, et de l’autre, il y a ceux qui rejettent toute ingérence étrangère
Toutes les tentatives d’unir les deux coalitions ont échoué... et échoueront.