Certains d’ entre vous le savent, j’étais en Syrie ces derniers mois. J’ ai donc tenu à vous tenir informés de la situation telle que la voient les syriens "de leurs fenêtres", autant dire très différente de tout ce que j’ai pu lire dans les médias à travers les pages web françaises.
Voilà un peu plus d’une semaine qu’on nous parle de manifestations violemment réprimées dans le sud de la Syrie et surtout d’une révolution en marche à laquelle le gouvernement ne pourra pas résister (voir le discours d’Alain Juppé).
Voilà donc, la situation, telle que je l’ai vécue de l’intérieur durant cette période.
Nature des manifestations
Avant le jeudi 24 mars 2011, nous avions tous entendu parler des incidents dans le sud mais de nos fenêtres, il ne se passait pas grand chose, pour ne pas dire rien du tout.
Mais du coup, à partir de jeudi soir, beaucoup de manifestations ont commencé à Alep en soutien au président. La place principale d’Alep était remplie et ce jusqu’ à 5h du matin. Dans la cité universitaire, de nombreux étudiants défilaient jusqu’à 3h du matin, et entre les deux endroits, certaines rues principales étaient bouchées par les rassemblements de voitures, au son des klaxons, je le répète en soutien au président.
Le lendemain (vendredi 25 mars), au lieu des manifestations de contestations, promises par nos médias, les rues étaient encore plus remplies que la veille. De partout on pouvait voir des regroupements de voitures portant des drapeaux syriens, ou encore des manifestants scandant : « Dieu, Syrie, Bashar (le président), et c’ est tout !!! » ou encore « par nôtre âme, par notre sang, nous nous sacrifierons pour toi !!! »
Jusqu’à samedi soir, j’ ai assisté à ces événements qui n’ont d’égal en France que la ferveur populaire que nous avons connu en 1998, lorsque l’ équipe de France a remporté la coupe du monde. La comparaison est certes ridicule, mais il est difficile d’ imager cette situation autrement car dans notre pays, nous ne connaissons les rassemblements populaires de cette ampleur que pour du football. Il faut croire que c’ est plus intéressant de se rassembler pour soutenir des millionnaires, qui jouent à la baballe (quand ce n’est pas avec des prostituées de 17 ans), que pour un combat politique.
Manière dont la presse et les politiques occidentaux ont relayé l’information
J’ai été très surpris de constater que notre presse ne parlait quasiment que de l’opposition, aussi minuscule soit-elle, alors que l’immense majorité des gens descendus dans la rue criaient avec ferveur leur soutien au président.
Les rares articles qui ont relayé cette information prétendaient tous que ces rassemblements avaient été organisés par le parti Baath comme outil de propagande.
Avant de répondre à cette attaque, il convient de préciser que cette phrase sous-entend que les manifestants pro-gouvernements étaient en fait des éléments liés au parti Baath. Bien entendu, les auteurs de ces articles ne se sont pas donné la peine de savoir si l’opposition était liée à israël ou au wahhabisme (extrémisme islamiste saoudien)… ce qui démontre la subjectivité de leurs écrits.
Mais peu importe, répondons à cette attaque.
D’une part, que le parti Baath ait organisé une parti des rassemblements est fort possible. Ceci ne veut pas dire que les gens qui s’ y sont rendus soient forcément des membres du parti, comme le sous entendait l’article. Les syriens étant tout à fait libres de s’ y rendre ou non, nous ne voyons pas en quoi ils auraient été victimes d’ une quelconque manipulation ou propagande venant du parti Baath.
D’autre part, si c’ était le cas et qu’ effectivement, tous les manifestants étaient des membres du parti Baath (ce qui semble plus qu’improbable vu leur nombre), cela voudrait dire quoiqu’il en soit que les syriens adhèrent massivement aux idées de ce parti. Et s’ ils y adhèrent massivement, nous ne comprenons pas pourquoi les auteurs de ces articles continuent d’ affirmer que le peuple ne suivrait pas son président.
Dans les deux cas, ces articles visent à discréditer le soutien dont à bénéficié le président Bashar Al-Assad pour pouvoir cautionner son éventuel renversement.
Nos journalistes, un peu naïfs ou corrompus, ainsi que des réseaux plus puissants, espéraient faire rentrer en Syrie des idées tendant à renverser le gouvernement. Pour cela, ils tentent d’ établir des parallèles entre les revendications légitimes du noble peuple égyptien, présent par millions dans les rues et celles de quelques centaines de syriens tout au plus alors que les 2 situations diffèrent sur plusieurs points :
1) Les manifestants, en Egypte, n’ont pas attendu Obama, Sarkozy ou leur presse pour activer leur mouvement puisque çà faisait environ 6 mois que l’Egypte connaissait des rassemblements de protestation contre le pouvoir en place (alors même que tous les pays occidentaux vantaient, les mérites de Moubarak, qui selon eux étaient un des intermédiaires les plus respectables de la région). En Syrie, on a jamais vu ou entendu quoi que ce soit avant que la presse occidentale et ses dirigeants ne ramènent leurs soi-disant infos sur la question. Et jusqu’à présent, nous n’ avons rien vu de nos propres yeux concernant les opposants, hormis les quelques images diffusées sur le net, mettant en scène, tout au plus une centaine de contestataires.
2) Une des revendications du peuple égyptien était la lutte contre la pauvreté. Au Caire, plusieurs millions de personnes vivent dans des tombeaux, faute de pouvoir se payer un logement. D’ autre part, on parlait pour l’Egypte d’émeutes de la faim. En ce qui concerne la Syrie, ces habitants n’ont surement pas le niveau de vie de la suisse, mais je n’ai jamais entendu quoi que ce soit à propos de familles vivant dans un tombeau ni à propos de personnes mourant de faim.
3) Un des points les plus importants est que le président égyptien a humilié son peuple et l’Islam en fermant les passages frontaliers vers Ghaza (notamment pendant les bombardements de 2009) et en appuyant le régime sioniste depuis de nombreuses années. J’ai rencontré des Egyptiens cet été qui en pleuraient, rien que d’en parler. D’ avoir sali ainsi l’image de l’Egypte, encore une fois, diffère totalement de la situation des syriens dont la fierté est d’ être depuis 40 ans la nation arabe la plus efficace et déterminée dans la lutte contre le régime sioniste. La Syrie qui accueille sur son sol plusieurs millions de palestiniens, qui leur donne le même droit que les syriens eux-mêmes et qui pour finir accueille et aide le Hamas, représente le fer de lance de la lutte arabe contre le régime sioniste. Ceci constitue la grande fierté de son peuple, contrairement aux égyptiens qui vivaient dans la honte sur ce sujet.
Conséquences des derniers évènements
La politique, çà ne s’analyse pas en 5 minutes ou en quelques jours donc je ne m’aventurerai pas dans des prédictions trop précoces. Je ne sais pas ce que réserve l’ avenir mais pour l’ instant, on peut dire que la situation telle qu’elle était relayée en France est totalement fausse, la majorité de la rue n’ est ABSOLUMENT PAS contre le président Syrien. Et mon avis personnel est qu’ au contraire, il est sorti renforcé des récents événements pour 2 principales raisons :
la démonstration qu’une grosse partie du peuple est derrière lui.
le fait que les médias et hommes politiques occidentaux, ainsi que certaines chaînes arabes du golf, aient relayé ces événements avec une mauvaise foi plus qu’évidente.
Ce deuxième point a permis à certaines personnes qui à la base ne s’ étaient pas positionnées ou qui n’ étaient pas très favorables au gouvernement, de constater les intérêts que portaient les états pro-israéliens dans le renversement de Bashar Al-Assad. Et laissez moi vous dire que de servir les intérêts d’ Israël, çà fait tâche dans un pays dont le Golan, territoire du sud, est occupé illégalement depuis 1967 par le régime sioniste (Cette annexion de la région a été condamnée par le conseil de sécurité des nations unies et n’a jamais été reconnue par la communauté internationale).
J’ ai donc pu constater que certaines personnes, sans être des inconditionnels de Bashar Al-Assad, refusent de s’ y opposer, en ayant vu la manière dont l’impérialisme occidental et sioniste tente d’ importer le conflit pour ensuite profiter des divisions internes.
Pour finir, je ne nie pas qu’il y ait eu quelques manifestations en Syrie en opposition au gouvernement (même si je n’ en ai vu aucune), mais pour l’instant, dire ou laisser entendre qu’ils sont une majorité est un énorme mensonge. Pour ce que j’ai vu à Alep, c’est même exactement l’inverse.
A la seconde ou j’ai commencé à écrire cet article, j’entendais depuis ma chambre, la rue crier avec ferveur son soutient au président. J’ai donc ressenti, qu’il était de mon devoir de porter leurs voix jusqu’à vos oreilles. Voilà donc une nouvelle que je vous encourage à relayer autour de vous pour contrer cette infâme propagande qui rêve de voir tomber le seul président arabe qui s’oppose avec force et efficacité au régime sioniste.