Peu d’événements ont autant d’importance politique que la Shoah. Sa mémoire pèse sur la diplomatie et la politique militaire, notamment au Proche-Orient. Sa simple évocation rend difficiles l’expulsion d’immigrés clandestins ou les démantèlements d’un camp de Roms. Son enseignement est au cœur des programmes de l’Education nationale. Elle est devenue une pièce centrale des discours mémoriels. Or la connaissance que nous avons de la Shoah a beaucoup évolué au cours des 70 dernières années. Sans faire de concessions aux révisionnistes qu’il appelle « révigationnistes », Philippe Mozart présente une très intéressante histoire de l’histoire de la Shoah. Derrière le titre impertinent Shoah Story, cette histoire en abyme est pleine d’enseignements pour les esprits libres. Philippe Mozart a bien voulu répondre à nos questions.
Polémia : Pourquoi un énième livre sur la Shoah ?
Philippe Mozart : Dans A quoi sert l’histoire, Hannibal a montré que la Shoah fonde la démocratie occidentale – à la manière dont la Passion du Christ a fondé le christianisme et dont la Torah régit le judaïsme. La Shoah commande notre jugement politique et moral sur le Proche-Orient, sur la dernière guerre, sur l’immigration, elle cause de profondes modifications doctrinales dans l’Eglise catholique, elle a servi la propagande décolonisatrice, elle définit ce que les Italiens nomment l’arc constitutionnel, c’est-à-dire l’ensemble des partis autorisés à gouverner. Elle est enseignée, avec l’appui de l’ONU, pour fonder le civisme des jeunes.
Polémia : Alors vous la rejetez en bloc ?
Philippe Mozart : Pas du tout. J’examine ces récits et ces controverses, afin de déterminer quand et pourquoi ils sont apparus. En quelque sorte j’esquisse l’histoire des variations de la Shoah, ou encore l’histoire de l’histoire de la Shoah. C’est par le biais de l’historiologie que je tente une nouvelle approche d’un sujet traité de façon plutôt décevante jusqu’à présent.
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