Boko Haram a lancé dimanche un nouveau raid meurtrier dans l’Extrême-nord du Cameroun, enlevant une soixantaine de personnes. Parallèlement, l’armée tchadienne a commencé à se déployer dans cette zone avec l’objectif de stopper les attaques du groupe islamiste nigérian.
Le déploiement de l’armée tchadienne n’impressionne pas les terroristes de Boko Haram. Dimanche 18 janvier, une soixantaine de personnes, dont des femmes et des enfants, ont été enlevées dans deux villages de la zone de Tourou, dans l’arrondissement de Mokolo (région de l’Extrême-nord, à environ 200 km de Maltam), lors d’un nouveau raid du groupe islamiste armé. L’attaque, dont le bilan est encore flou, aurait fait plusieurs morts.
Il s’agit du plus important rapt perpétré dans la région camerounaise de l’Extrême-Nord par les insurgés islamistes nigérians, dont les incursions dans ce secteur sont récurrentes depuis des mois. Beaucoup d’habitants de la zone, de même que la plupart de policiers et gendarmes en poste dans les localités proches de la frontière, ont fui plus à l’intérieur des terres afin de se prémunir de ces raids.
400 véhicules militaires et des hélicoptères de combat
Boko Haram avait lancé lundi dernier une offensive contre une base militaire camerounaise à Kolofata, également dans l’Extrême-Nord du pays. Cette attaque semble avoir été un des déclencheurs de l’intervention du Tchad, qui a envoyé des troupes au Cameroun, autorisé l’envoi de soldats au Nigeria et demandé aux pays d’Afrique centrale de former une large coalition pour lutter contre le groupe islamiste.
Les militaires tchadiens ont commencé à traverser la frontière ce week-end. Samedi, un impressionant convoi de 400 véhicules militaires (chars, véhicules blindés, pick-ups...), appuyé par des hélicoptères de combat MI-24, a quitté N’Djamena pour pénétrer au Cameroun. Le président Idriss Deby Itno, qui a accompagné ses troupes jusqu’à la frontière, a souligné qu’elles devaient être "opérationnelles" dès dimanche. Ce contingent s’est installé à Maltam, située juste en face de N’Djamena, à l’ouest de Kousseri, et devrait bénéficier de travaux d’aménagement engagés par le génie militaire camerounais.
Baga dans le viseur
Les Tchadiens ont aussi affiché leur volonté de reprendre Baga. Située dans le nord-est du Nigeria, cette ville stratégique des rives du lac Tchad est tombée aux mains du groupe islamiste début janvier. Des témoignages glaçants sur les exactions perpétrées par Boko Haram ont horrifié la communauté internationale. Le président français François Hollande et le secrétaire d’Etat américain John Kerry ont dénoncé des "crimes contre l’humanité".
Selon Amnesty International, l’attaque de Baga est "la plus grande et la plus destructrice" jamais perpétrée par Boko Haram depuis le début de son insurrection en 2009. Celle-ci a fait plus de 13 000 morts et 1,5 million de déplacés. Baga abritait un temps le quartier général d’une force armée régionale regroupant des détachements nigérians, tchadiens et nigériens. Mais Tchadiens et Nigériens s’étaient retirés bien avant l’attaque, et la force régionale est en réalité peu active.
Le Nigeria, qui n’arrive pas à stopper seul Boko Haram, a exprimé samedi un soutien conditionnel à la perspective de l’arrivée de soldats tchadiens sur son territoire. "Tout soutien à nos opérations sera bienvenu mais il doit se conformer à nos propres opérations en cours étant donné qu’il s’agit du territoire nigérian", a déclaré Chris Olukolade, porte-parole de l’armée nigériane.