Un grand éditorialiste américain ne dissimule pas sa colère après à la libération du cinéaste – un sentiment assez largement partagé outre-Atlantique.
Le cauchemar s’achève pour Roman Polanski. Après avoir été confiné dans son chalet de trois étages à Gstaad, la station de luxe des Alpes suisses, le réalisateur fugitif est à nouveau libre de se promener en ville, de s’offrir un bon restaurant et, pourquoi pas, de faire quelques emplettes chez Cartier, Hermès ou Louis Vuitton. Il pourrait aussi s’enfuir comme un rat pour retourner en France ou en Pologne, deux pays dont il porte la nationalité et dont les autorités se comportent depuis longtemps comme si le talent et la célébrité de Polanski pouvaient occulter les abus sexuels qu’il a commis sur une fillette de 13 ans.
Je mise sur cette seconde option, même si les autorités suisses font tout pour convaincre Roman Polanski qu’il peut profiter de sa fondue sans craindre de jamais devoir répondre de ses crimes. Après tout, ces mêmes autorités l’ont tout de même forcé à porter un bracelet électronique à la cheville pendant plusieurs mois. L’horreur absolue !
La décision de libérer l’artiste de sa cage dorée est fondée sur un vice de forme. Le problème n’était pas de "juger de sa culpabilité ou de son innocence", a déclaré la ministre de la Justice, Eveline Widmer-Schlumpf. Elle a raison, Polanski a lui-même reconnu les faits. En réalité, les autorités suisses ont jugé qu’en dépit de l’aveu de ses crimes et de sa fuite devant la justice américaine, Polanski ne sera jamais puni.
Il est important de noter que Polanski n’a jamais exprimé le moindre remords. Dans un entretien de 1979, il se disait harcelé parce que "tout le monde veut coucher avec des fillettes". Peu importe que la victime, aujourd’hui adulte, ne veuille pas continuer les poursuites et revivre un épisode traumatisant. Ce qui compte, c’est ce que Polanski a reconnu lui avoir fait subir il y a trente-trois ans et le fait qu’il ait préféré s’enfuir plutôt que d’assumer ses responsabilités.
Les autorités suisses ont entériné une évidence : Polanski ne se serait jamais rendu en Suisse s’il avait pensé un instant qu’il serait juridiquement menacé. Ne pouvant être extradé ou kidnappé par la CIA, il est à présent libre. Jusqu’au prochain faux pas. Il devra toujours faire attention à ce qu’il fait. C’est une forme de punition, mais c’est loin d’être suffisant. Pourquoi ne pas boycotter ses films tant qu’il boycottera la justice américaine ?