François Bousquet, rédacteur en chef adjoint de la revue Éléments, déboulonne dans son livre « Putain » de Saint Foucault la statue faite à l’intellectuel, passage obligé de tous les étudiants en philo, psycho et sociologie. Bousquet voit en Foucault l’origine théorique de la haine de soi française, de la théorie du genre, et de la destruction des valeurs.
Armé de mots choisis et d’une solide culture – ce qui change des admirateurs universitaires de Foucault –, Bousquet démonte tranquillement sur Radio Courtoisie (le 30 octobre 2015) l’architecture conceptuelle du philosophe libertaire (et libéral), un des chefs de file de la si creuse mais si destructrice french theory.
Il voit dans la pensée de Foucault celle qui donnera naissance à la deuxième gauche, dite Terra Nova, dans laquelle la figure du lumpenprolétariat va remplacer celle du prolétariat, d’où une fascination pour les marges, la délinquance, qui se traduit en termes de très grande tolérance pénale [d’où Taubira, NDLR].
« Et Foucault va jouer un rôle considérable dans le basculement du social vers le sociétal. »
Pour Bousquet, les avant-gardes européennes ont préparé Michel Foucault depuis un siècle : usure civilisationnelle, culpabilité qui ronge les peuples... C’est sur ce terreau que la haine de soi européenne, qui nous explose à la figure aujourd’hui, va s’épanouir. L’auteur fait le procès de la décadence qui accompagne le grand mouvement de l’effondrement de l’Europe : ne pouvant plus porter le grand projet européen, Foucault le démolit... Et s’en va aux États-Unis.
Et au-delà de cette fatigue à porter le projet européen, Bousquet voit la fatigue de porter le projet de l’Homo sapiens. Il fait du philosophe le coproducteur de la fameuse théorie du genre, avec des motivations pas toujours très « philosophiques », ce mal-être physique dans son corps d’Homo sapiens, et son goût pour les sexualités extrêmes. Si Foucault n’est pas le père à proprement parler de la théorie du genre, Judith Butler, celle qui l’a popularisée, se réclame bien de lui et de la french theory.
« Le jour et la nuit, l’homme et la femme, le mal et le bien, il va brouiller les frontières. »
Plus globalement, Foucault incarne le désir très post-moderne de faire voler en éclats les frontières naturelles, physiques, identitaires, et géographiques. Bousquet passe ensuite a la moulinette le nietzschéisme supposé de Foucault, qu’il estime de façade, car il lui permet de tout relativiser. Et de liquider la ou les vérités, pour arriver aux interprétations, mobiles, mouvantes, liquides. Tout doit disparaître.
Avec un certain humour, Bousquet (re)place Foucault entre Friedrich Hayek, le pape du libéralisme, et le Marquis de Sade, « que Michelet appelait l’apôtre des assassins ». Cependant, son influence n’est pas nulle, puisque les campus américains ont été foucaultisés, enfin, se sont servi de cette figure tutélaire pour dégommer le pouvoir du père, l’autorité, le mâle blanc occidental, et lui substituer la domination des victimes, sexuelles et raciales, à savoir, les femmes, les homosexuels et les afro-Américains. Entre autres.
« Le marxisme, l’État-nation, pour lui c’étaient des archaïsmes, la souveraineté était à abolir, pourquoi ?, parce qu’il voulait sans arrêt faire prévaloir sa singularité de minoritaire... À travers lui triomphe la figure du minoritaire, du référent minoritaire. Il fallait également liquider les majorités, parce que les majorités sont conservatrices, hétérosexuelles, et plutôt patriarcales. »
Argument de poids en faveur d’un Foucault « libéral », ce dernier ne se préoccupait pas du problème social, des ouvriers, qui incarnaient une droite des valeurs paradoxale pour la doxa des années 70. Toute la caste intellectuelle française « a tiré un trait sur peuple, qui était culturellement conservateur », incarné par Georges Marchais le paléomarxiste... Le même peuple qui aujourd’hui vote, logiquement, Marine Le Pen.
Foucault, ou le porte-parole de l’antihumanisme français des années 1970-1980. Un antihumanisme sans lequel on ne peut pas penser la théorie du genre. Ni la gauche sociétale actuelle, perverse dans sa trahison de classe, et perverse dans sa libéralisation pornocratique. Il faut bien donner du plaisir à ceux qu’on entube.