Le retour de l’Occident à la civilisation passe par l’abandon de l’actuelle « Société de l’avoir » pour rendre à la « Société de l’être », parfaitement incarnée par la tradition culturelle française aujourd’hui malheureusement abandonnée, la prééminence qu’elle n’aurait jamais dû perdre. Autrement dit, le « fait politique » doit reprendre le pouvoir sur le « fait économique » et « l’économie politique » doit remplacer « la science économique » si l’on veut que la civilisation reprenne le cours de son existence.
Après une petite mise au point politico-spirituelle sur l’état de la « civilisation européenne », qui sera faite à titre introductif, cet article présentera l’un des aspects du retour de la France à la Civilisation de « l’Être » : celui de la mesure économique et individuelle. Plus précisément, le retour des Sociétés européennes sur la voie de la civilisation impose de supprimer les scories verbaux qui sont des facteurs bloquant toute évolution de la pensée. Il est aujourd’hui absolument nécessaire de réinvestir par et dans le langage commun les unités de mesures de la valeur tant sur les plans économiques que sur les plans individuels.
Sur un plan économique et sociétal, nous détaillerons les raisons qui militent pour la suppression des notions de PIB et PNB. S’agissant de l’individu, nous expliciterons pourquoi il est tout aussi nécessaire d’abandonner les velléités de mesure de l’intelligence humaine au moyen de QI.
Petite mise au point politico-spirituelle s’agissant de la « civilisation européenne »
En réponse à une vidéo dans laquelle Alexandre Douguine invite les « Européens » à lutter pour sortir des griffes de la caste dominante mondialiste et globalisatrice, appelée « le marais », il convient de rappeler quelques principes de base sans lesquels aucune lutte ne pourra être victorieuse et, bien au-delà, sans lesquels aucune lutte ne pourra être tout court.
La première précision concerne la notion d’Europe politique. Les institutions européennes, de type fédéraliste, sont précisément le fruit mûr de ce « marais », pour ne pas dire « marécage », sans lequel jamais les pays européens ne se seraient unis dans des institutions communes. Ce fait est amplement étayé par nombres d’historiens et d’historiennes (Annie Lacroix-Riz), des sociologues (Pierre Hillard) et beaucoup d’autres chercheurs, en particulier américains, moins connus sur le continent européen. Si certains politiques français se font le relais de cette triste réalité, ces derniers mettent toutefois bien malencontreusement d’avantage l’accent sur l’incarnation américaine du « marais » que sur le « marais » lui-même, dont la source se trouve à la City bien avant d’être à New-York ou à Washington.
Ainsi, les anciennes nations européennes sont aujourd’hui politiquement et spirituellement agglomérées, par une volonté oligarchique extérieure aux peuples concernés, dans un amas institutionnel de type autoritaire qui trouve sa source dans le « marais » dénoncé par Alexandre Douguine. Mais ce « marais » n’est pas essentiellement localisé à Washington, qui n’en a été que l’incarnation temporaire, il est géo-localisé au centre mondial de la finance internationale qu’est la City et il a étendu ses ramifications dans tous les systèmes politiques des anciens – car ces États ont de facto perdu l’essentiel de leur souveraineté en intégrant les traités de Maastricht et de Lisbonne – États européens.
La seconde précision concerne la « culture européenne ». Celle-ci est incontestablement, historiquement, formée par l’appartenance à la religion chrétienne. Plus précisément, la chrétienté de l’Europe occidentale est principalement faite de catholicisme romain, de protestantisme et d’orthodoxie.
Or un des problèmes essentiel est précisément que le catholicisme romain n’est plus chrétien. Le pape est lui-même aujourd’hui le premier porte-parole du globalisme multiculturel et multireligieux et un interlocuteur institutionnel des principaux mondialistes tels que Peter Sutherland [1]. Cette réalité peut également être illustrée par la volonté déclarée du pape François de transformer la banque du Vatican en banque commerciale ordinaire [2], réclamant pour ce faire, l’aide précieuse des Fat Four dont la réputation de bras armé de l’oligarchie n’est plus à faire. Le mélange des genres spirituel et temporel par l’actuelle direction vaticane, qui se comporte en « chef d’entreprise », en dit long sur le traitement des âmes par le successeur de Pierre. C’est ainsi qu’en bonne logique l’Union européenne a elle-même renoncé à se prévaloir de son appartenance judéo-chrétienne. Mais là encore, le terme « judéo-chrétien » serait à préciser tant il est vrai que la religion chrétienne traditionnelle était opposée au judaïsme. En conclusion, perdu dans la globalisation politico-économique, le catholicisme romain actuel se rapproche davantage d’un réformisme schismatique que de l’orthodoxie catholique traditionnelle.
En définitive, sortir les pays d’Europe occidentale du « marais » nécessitera en tout premier lieu de reconnaître ce « marais » pour ce qu’il est, c’est-à-dire une domination oligarchique sans partage qui trouve sa source à l’intérieur même de l’organisation du pouvoir des pays occidentaux. En second lieu, il faudra, d’une manière ou d’une autre, que les peuples européens retrouvent une spiritualité pacifiée autour de valeurs sûres ; ce qui pourrait signifier la réunification des Églises chrétiennes d’Orient et d’Occident.
Indépendamment de ces précisions d’ordre général, les pays Européens ne pourront retrouver la voie de la civilisation qu’en élaborant techniquement de nouveaux systèmes de mesure de la valeur tant du point de vue économique que du point de vue individuel.
Les scories dont il faut débarrasser la Société pour lui permettre de retrouver la voie de la civilisation : l’impérieuse nécessité d’élaborer de nouveaux systèmes de mesure de la valeur
D’un point de vue pratique, il existe un certain nombre de concepts qui ont été imposés à nos Sociétés par les tenants du « fait économique » qui sont des facteurs empêchant, de façon dirimante, toute évolution civilisationnelle. Le problème, né dans les Sociétés européennes occidentales, est devenu beaucoup plus grave à mesure qu’il s’est imposé dans l’ordre international.
L’analyse ci-dessous ne prétend pas à l’exhaustivité, elle se concentrera sur certains concepts primordiaux que sont la mesure de la valeur économique générée par les Sociétés et la mesure de la valeur des individus composant cette Société. Ces deux concepts, pour essentiels qu’ils sont, n’épuisent néanmoins pas le sujet à eux seuls.
La prétendue mesure de la valeur économique d’une Société par les PIB/PNB doit être bannie
Le premier de ces concepts est double, il s’agit des acronymes PIB et PNB. Ces agrégats servent aujourd’hui, au niveau mondial, d’étalonnage absolu pour déchiffrer l’état d’une Société. Tout se passe comme si les PIB/PNB avaient définitivement été acceptés par tous les pays du monde, via le vecteur des institutions internationales – au premier rang desquelles figure l’OCDE –, en tant qu’instrument de mesure inaltérable et fiable de la situation économique des États ; un peu comme le mètre mesure les distances ou le gramme le poids. Or, cette impression fallacieusement disséminée dans les esprits de tout un chacun – entreprises, hommes politiques, économistes et simples particuliers – est fausse à plus d’un titre.
Sur le fond, elle donne une vision tronquée de ce qu’est la création de valeur, jusqu’à en arriver, de plus en plus souvent, à mesurer mécaniquement son exact contraire, c’est-à-dire non pas la création mais la destruction de « valeurs ».
Sur la forme, ces indicateurs cachent très mal le fait que la création de richesse n’est plus du ressort des États et de leurs ressortissants mais de celui des principaux détenteurs de capitaux de la planète, qui opèrent via les groupes d’entreprises. Les tenants du « fait économique » détiennent, via les groupes économiques qu’ils pilotent, un pouvoir qui transforme les États et leurs gouvernements en simples exécutants de leur volonté, de type impérial.
La lutte pour la civilisation doit en premier lieu passer par la suppression de l’usage de ces acronymes.