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Nouvelle constitution en Islande : la conspiration du silence...

L’Islande a terminé l’année 2011 avec une croissance économique de 2,1% et devrait, selon les prévisions de la Commission européenne, atteindre le taux de 2,7% en 2013 grâce principalement à la création de nouveaux emplois.

L’Islande est le seul pays européen qui a rejeté par référendum le sauvetage des banques privées, laissant s’effondrer certaines d’entre elles et jugeant de nombreux banquiers pour leurs crimes financiers mais curieusement les médias français et européens n’en parlent pas ou très peu…

Il n’y a pas de censure officiellement dans les médias presse, radio ou télé mais les journalistes et experts de tous bords, si prompts à parler de ce qui se passe en Egypte, en Lybie ou en Syrie, ne disent absolument rien sur ce qui se passe en Islande. En a-t-on parlé dans les nombreux débats politiques en vue de l’élection présidentielle ? A-t-on vu des images à la TV ? Bien sûr que non car les citoyens européens pourraient avoir la mauvaise idée de s’en inspirer...

En Islande, le peuple a fait démissionner un gouvernement au grand complet. Les principales banques ont été nationalisées et il a été décidé de ne pas payer la dette qu’elles avaient contractée auprès de banques en Grande Bretagne et en Hollande, dette générée par leur mauvaise politique financière.

- 2008 : Les banques Glitnir, Landsbankinn et Kaupthing sont nationalisées pour éviter leur faillite plutôt que d’injecter inconditionnellement des capitaux publics, comme en Espagne ou dans les autres pays européens. L’ensemble des dettes de l’Islande égale alors 9 fois son PIB. La monnaie s’effondre et la bourse suspend ses activités après une baisse de 76%.

- 2009 : Le FMI, comme à son habitude, exige, en échange de mesures dites "d’ ajustement" des coupures dans les dépenses sociales qui provoquent la colère de la population, la chute du gouvernement et la convocation d’élections anticipées.

La gauche remporte la majorité absolue, provoquant l’effondrement du Parti de l’Indépendance, un parti conservateur qui était traditionnellement la force dominante dans le pays et qui ne conserve que 23,7% des voix. Johanna Siguroardottir est choisi pour diriger le gouvernement réunissant des sociaux-démocrates et les écologistes de gauche.

La situation économique désastreuse du pays persiste. Par le biais d’une loi, il est proposé à la Grande Bretagne et à la Hollande le remboursement de la dette et un paiement de 3.500 millions d’euros, montant devant être payé mensuellement par toutes les familles islandaises pendant 15 ans à un taux d’intérêt de 5%. Mais le peuple descend à nouveau dans la rue et demande que la loi soit soumise à référendum.

- Janvier 2010 : Le Président refuse de ratifier cette loi et annonce qu’il y aura une consultation populaire.

- Mars 2010 : Le référendum a lieu et le Non au paiement de la dette l’emporte par 93% des voix.

Pendant ce temps, le gouvernement essaie de régler juridiquement les responsabilités de la crise. Les détentions de plusieurs banquiers et cadres supérieurs commencent. Interpol lance une enquête et tous les banquiers impliqués quittent le pays. Dans ce contexte de crise, une assemblée est élue pour rédiger une nouvelle Constitution en vue de se substituer à l’actuelle qui est une simple copie de la constitution danoise.

Pour ce faire, on a recours directement au peuple souverain qui élit 25 citoyens sans filiation politique parmi les 522 qui se présentent aux candidatures (condition : être majeur et avoir recueilli le soutien d’au moins 30 personnes).

- Septembre 2010 : L’ancien Premier ministre Geir Haarde est poursuivi pour négligence dans la gestion de la crise. Interpol émet également un mandat d’arrêt international contre l’ancien président de Sigurdur Einarsson.

- Février 2011 : L’assemblée constituante commence ses travaux afin de présenter, en partant des avis collectés dans les diverses assemblées qui ont eu lieu dans tout le pays, un projet de Grande Charte.

- Mars 2011 : Suite à quelques critiques concernant la faible participation (36%) pour nommer les membres de l’assemblée constituante, le Premier ministre, en accord avec les chefs des principaux partis représentés au Parlement, met sur pied un comité consultatif pour poursuivre la révision de la constitution. Ce dernier propose au Parlement de nommer un « Conseil constitutionnel » constitué des 25 membres de l’Assemblée constitutionnelle dissoute.

- Avril 2011 : Les citoyens disent de nouveau Non à un second référendum sur le paiement de la dette, après que le président islandais Olafur Ragnar Grimsson ait refusé de contre-signer la loi du 16 février 2011 (connue sous le nom de « troisième loi Icesave »). Le nouveau gouvernement de centre-gauche assurait en effet que le nouvel accord Icesave avait été mieux négocié que le précédent mais la population islandaise maintient son refus d’être mise à contribution pour la faillite de banques jugées irresponsables.

- Juillet 2011 : Sur la base des rapports du Comité constitutionnel et du Forum national (citoyens), le Conseil constitutionnel adopte à l’unanimité un projet de constitution qui est remis au Parlement le 27 juillet. Ce dernier, chargé d’amender le projet, s’est attelé à cette tâche à l’automne 2011 et les débats se poursuivent toujours.

Les principales propositions de la nouvelle Constitution

Sur un total de 114 articles et de 9 chapitres, on peut noter en particulier :

- Article 15 : Droit à l’information. Les informations et documents détenus par les autorités publiques devraient être disponibles sans exception et l’accès au public à tous ces documents devrait être garanti par la loi.

- Article 63 : Création d’un Comité de contrôle de la responsabilité du Gouvernement. Une enquête sur les mesures et décisions du Gouvernement peut être demandée par 1/3 des membres d’Althingi (parlement islandais).

- Article 65 : Droit à la consultation directe. 10% des votants peuvent demander un référendum national sur les lois votées par Althingi.

- Article 66 : Possibilité d’interpellation directe d’Althingi. 2% des électeurs peuvent soumettre une question au Parlement et un projet de loi peut y être déposé s’il est soutenu par 10% des électeurs.

- Article 90 : Formation du Cabinet. Le Premier ministre est nommé par le Parlement.

- Article 99 : Indépendance des tribunaux. L’indépendance des tribunaux doit être garantie par la loi.

- Article 105 : Autonomie des collectivités territoriales. Les sources de revenus des collectivités territoriales doivent être garanties par la loi, tout comme leur droit de déterminer l’utilisation de ces ressources.

La nouvelle constitution devrait être soumise à un référendum, avant le vote par le Parlement. Il devrait avoir lieu le 30 juin en même temps que l’élection présidentielle ou à l’automne.

L’Islande n’est certes qu’un petit pays de 320 000 habitants mais elle donne cependant une belle leçon de démocratie aux grands États de l’Europe et du monde. Songeons par exemple qu’en France, la réforme constitutionnelle de 2008 a été entièrement rédigée à l’Élysée et que les parlementaires ne l’ont adoptée qu’à deux voix près après avoir été soumis pendant des semaines à des pressions intolérables de la part du chef de l’État…

 






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8 Commentaires

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  • #136415
    Le 16 avril 2012 à 21:13 par Réveillez-vous
    Nouvelle constitution en Islande : la conspiration du silence...

    Mais le peuple descend à nouveau dans la rue et demande que la loi soit soumise à référendum.



    Tout est dit ! Tant que les peuples européens se feront mettre à ciel ouvert sans broncher , la longue descente infernale se poursuivra

     

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  • #136708
    Le 17 avril 2012 à 09:21 par francky
    Nouvelle constitution en Islande : la conspiration du silence...

    320 000 c est la population d une ville comme Toulouse mais comme le dit E Chouard il faut bien commencer et ensuite agir comme un virus...

     

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    • #136890

      Bien sûr, on trouvera toujours 150 arguments pour dire que comparaison n’est pas raison, qu’ils sont moins nombreux, que c’est une ile, qu’il y fait froid et que leurs chevaux ont cinq allures et pas trois, n’empêche qu’ils ont bien dit merde au système, de façon tout à fait virile. La morale de l’histoire c’est que 320.000 islandais ça pèse plus que 60 millions de chouineurs.

       
  • #136887
    Le 17 avril 2012 à 11:58 par Mehdi77
    Nouvelle constitution en Islande : la conspiration du silence...

    À cette échelle là, même si les médias traditionnels mentent comme des arracheurs de dents, la vérité circule quand même. D’autant plus que d’après wikipédia, une majorité de la population est connectée à internet et possède un blog. Les habitants ont donc des réflexes que les zombies des pays plus grands n’auront pas avant longtemps.

    Le point fondamental qu’il faut retenir, c’est donc que les citoyens (et pas uniquement électeurs) d’Island étaient des gens qui se parlaient directement entre eux via internet (et autres moyens sûrement) et qu’ils étaient engagés politiquement.

    Et puis c’est vrai que leur championnat de foot ou leurs programmes télé ne doivent pas passionner grand monde, là-bas. Ça aide à s’occuper de choses plus sérieuses, plus importantes...

     

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  • #136892
    Le 17 avril 2012 à 12:07 par Esperanza
    Nouvelle constitution en Islande : la conspiration du silence...

    Ce qui va être intéressant, c’est de voir s’ils poursuivent leur processus d’adhésion à l’Union européenne. Ils seraient dingues de faire ça.

    De même, les tchèques et les polonais vont ils confirmer leur volonté de rejoindre l’euro ? Là aussi ce serait pure folie. Mais on ne sait jamais.

     

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  • #136897
    Le 17 avril 2012 à 12:19 par Rouquin
    Nouvelle constitution en Islande : la conspiration du silence...

    C’est amusant comment moins un pays est métissé et moins il a son sein une certaine communauté porteuse de Kippah, plus il résiste victorieusement aux manipulations des banquiers et des politiciens véreux..

     

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