"C’est sorti comme ça." Deux jours après avoir invectivé, les larmes aux yeux, des dirigeants d’Air France, la salariée devenue icône de la contestation du personnel de la compagnie aérienne a accepté, mercredi 7 octobre, de revenir pour Francetvinfo sur son cri de colère et sur le succès de son intervention, visionnée plus d’un million de fois sur Facebook et YouTube.
Erika, mère de famille de 33 ans, est agent au sol à Air France depuis 2007. Cette ancienne chargée de communication événementielle travaille dans les salons réservés aux clients VIP. Elle est syndiquée à la CGT, mais n’y exerce aucune fonction.
Francetv info : Comment vous êtes-vous retrouvée face à ces dirigeants ?
Erika : Je participais à la manifestation organisée en marge du comité central d’entreprise. Certains manifestants ont réussi à entrer dans le bâtiment, un mouvement s’est alors formé et j’ai suivi le troupeau, par curiosité. Lorsque j’ai fini par pouvoir entrer dans la salle de réunion, les scènes de violences avaient déjà eu lieu et il n’y avait plus grand monde. Des cadres ont quitté la salle en nous regardant comme des gueux, en secouant la tête.
Je me suis retrouvée face à ces dirigeants, qui me sont apparus totalement détachés et pas du tout concernés. J’ai essayé de m’adresser à eux, je n’ai eu pour seule réponse que leur silence. Cela m’a chamboulée. J’ai trouvé inacceptable que ces personnes, qui décident de nos vies, soient si légères et méprisantes. Nous nous présentions face à eux désespérés, et eux étaient presque amusés. C’est là que ma collègue a commencé à filmer, et le reste est sorti comme ça, rien n’était préparé.
Au début de la vidéo, vous parlez des "efforts" réalisés par le personnel ces dernières années. Quels sont-ils ?
J’ai perdu 21 jours annuels de congés cumulés. J’ai donc moins de temps à consacrer à ma famille, d’autant que je travaille en décalé avec des journées qui commencent à 5 heures. Mon pouvoir d’achat stagne depuis quatre ans, ma qualité de vie a baissé, et, comme beaucoup de Français, je vis à découvert.
Par ailleurs, les moyens ont diminué dans les entités. Nous nous retrouvons donc avec des charges de travail plus importantes. Par exemple, il nous arrive désormais, en cas de tension avec un client, de faire appel à un collègue en lui demandant de jouer au responsable clientèle, parce qu’il n’y a pas de vrai responsable clientèle ce jour-là. Si la machine Air France fonctionne toujours, c’est parce que nous sommes attachés à l’uniforme et que nous nous accrochons.