Dans le courant de l’été, une étrange délégation du Croissant-Rouge qatari est arrivée à Gao, dans le nord du Mali. Prétexte officiel de la visite : évaluer les besoins humanitaires de la population, à bout et traumatisée après le séjour en ville du MNLA (Mouvement national de libération de l’Azawad).
Avant de repartir, les visiteurs qataris ont promis quelque 3 milliards de francs CFA de médicaments et de matériel divers, comme des semences et des engrais. Problème, l’aide n’est jamais vraiment parvenue dans sa totalité aux habitants de la région, qui ont bien reçu près de vingt tonnes de denrées alimentaires comme le riz, l’huile ou le lait, mais n’ont jamais vu la couleur des médicaments…
Ce qui intrigue en premier lieu, c’est le caractère intempestif de cette visite « humanitaire », accomplie sans que le CICR (Comité international de la Croix-Rouge) dont le rôle est de coordonner l’aide d’urgence, en soit initialement informé. De plus, le Croissant-Rouge qatari a jeté son dévolu sur l’hôpital de Gao aux mains des hommes du Mujao (Mouvement pour l’unicité du jihad en Afrique de l’Ouest), plutôt que de se déployer dans les zones isolées où aucune aide n’était encore parvenue.
Enfin, comme l’ont rapporté plusieurs témoins cités par Radio France Internationale, tous acteurs humanitaires dans la région, le Croissant-Rouge qatari joue facilement du chéquier, n’hésitant pas à offrir des primes très élevées à certains personnels soignants de l’hôpital de Gao, multipliant par cinq le montant moyen des sommes habituellement proposées ! Résultat, les infirmiers ne veulent plus travailler que pour les Qataris, et cela créé évidemment de nombreuses jalousies.
Prié de formaliser son action en signant une convention avec la Croix-Rouge malienne, le Croissant-Rouge qatari a obtempéré, en recevant une délégation à Doha. Et puis, plus rien ! Plusieurs mois après, aucune des actions communes envisagées n’a pu être entamée. Et quand un élu local sollicite l’intervention humanitaire des Qataris, il se voit opposer un refus catégorique au motif que le Mujao n’est pas implanté dans sa circonscription…
Autant d’éléments qui peuvent amener à penser que le Qatar soutient en douce le Mujao et que le Mali est dans la ligne de l’émir… Cheikh Hamad Bin Khalifa al-Thani a toutefois démenti la présence, sous couverture humanitaire, d’agents qataris auprès du Mujao. Ouf ! Nous voila rassurés…